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(...) Romain Gavras ne s’est pas contenté d’aligner les scènes choquantes et les répliques débiles sur le modèle de Sheitan, le premier film de son pote Chapiron, plus proche d’une production Europacorp dégénérée que d’un film à thèse. Si l’on veut parler par raccourcis, Notre jour viendra est la rencontre entre Les Valseuses et La Vie de Jésus. Un road-movie radical où pointe le nihilisme, nimbé d’un humour vachard absurde et d’une désespérance muette. (...) Emmené par un Vincent Cassel « depardiesque » et un Olivier Barthélémy sourdement inquiétant (il fait penser au Vincent D’Onofrio de Full Metal Jacket), Notre jour viendra se présente non pas comme une apologie de la violence, mais, au contraire, comme sa condamnation. Une séquence, en particulier, ne laisse planer aucun doute : celle où Patrick s’en prend gratuitement à des putes puis à un couple dans un Jacuzzi. De concevable, sa croisade contre la société devient indéfendable. Le nihilisme final, signe d’un dogmatisme aveugle, confirme que Romain Gavras est un cinéaste responsable. Pas le sale gamin qu’il est impérieux de diaboliser.
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Revendiquant l'absence d'explications quant aux comportements des protagonistes, Romain Gavras appuie néanmoins beaucoup sur la piste du racisme et de l'enfermement identitaire. En quête d'attaches, Patrick et Rémy finissent ainsi par imaginer qu'ils appartiennent à la communauté des Roux, forme de justification ironique à leur révolte. Mais à force de jouer avec différentes formes d'exclusion (une séquence sur le racisme anti-arabe, une sur le racisme anti-juif, une autre sur le racisme anti-albinos), le film vire presque à l'obsession monomaniaque. De même, l'insistance sur le thème de l'homosexualité - Rémy s'interrogeant constamment sur son identité sexuelle - tourne rapidement en rond.
Peu convaincante sur le fond, cette fable sur l'absence de repères cultive cependant une esthétique intéressante, en faisant du Nord-Pas de Calais un décor de western crépusculaire. Le vent du large offre un cadre idéal à la quête de liberté des personnages, tandis que l'horizon bouché transforme le paysage en purgatoire géant. Les dernières minutes, lyriques à souhait, font regretter que Romain Gavras ne se soit pas appuyé sur un scénario plus solide pour exprimer le « brouillard mental » de l'époque. En l'état, Notre jour viendra ressemble plutôt à une coquille vide. -
(...) loin de provoquer la réflexion, leur nihilisme facile souffre d’un manque cruel de sincérité, à des années-lumière de la rage humaniste d’un Spike Lee ou de l’anarchisme d’un Blier. D’autant que, tout en entendant dénoncer la stigmatisation de la différence, le film ne parvient jamais à se départir d’une terreur galopante de l’homosexualité, présentant par ailleurs une image limitée et calamiteuse des femmes. Du côté des protagonistes, l’absence délibérée de caractérisation laisse les acteurs seuls responsables de leurs personnages. Résultat : on n’oublie jamais que l’on est en train de regarder le-grand- Vincent-Cassel, plus théâtral que jamais, nous servir son numéro de Vincent Cassel. Et si Romain Gavras fait preuve d’une maîtrise technique certaine – qualité
suffisamment rare dans le cinéma français pour être signalée –, sa mise en scène reste trop appliquée et attendue, échouant même à asséner le coup de poing dans la gueule que sa réputation pouvait laisser présager.
Toutes les critiques de Notre jour viendra
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Ce premier long-métrage de Romain Gavras, 29 ans, a l'esprit provocateur et la violence des premiers films de Bertrand Blier, mais peut-être pas leur humour et leur second degré. (...) L'image est ample, les couleurs sont travaillées, mais à force de vouloir choquer, le film laisse à distance.
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L’intelligence de Gavras est d’avoir su déplacer sa caméra dans la région Nord en créant une inquiétante étrangeté sans pour autant jouer sur les fantasmes populaires inhérents à cette région. Comme il le faisait justement pour la banlieue avec Kourtrajmé. Le climat du film est joyeusement malsain, le cinéaste faisant montre d’un humour féroce servi par le cabot Cassel (sosie saisissant de Daniel Emilfork dans la dernière partie) et d’une poésie visuelle désespérée grâce notamment à un sens du cadre épatant. Le délire paranoïaque et gentiment absurde des deux protagonistes relève plus de la maladie mentale que d’une quelconque persécution anti-roux. Ne nous y trompons pas, l’histoire qui nous est contée n’est en aucun cas une parabole sur l’intolérance. Non merci, ce n’est pas le lieu pour cela. C’est avant tout une histoire qui nous dépeint la relation ambigüe entre deux hommes qui finissent par s’envoyer en l’air, mais pas comme on aurait pu l’imaginer. Le tandem Cassel/Barthélémy est remarquable et s’inscrit dans la lignée du duo des Valseuses Depardieu/Dewaere (le personnage de Cassel ne s’appelle pas Patrick pour rien). C’est à se demander si Romain n’est pas plutôt le fils de Bertrand Blier ! Un léger bémol vient tout de même gâcher l’affaire. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, et contrairement à ses ambitions revendiquées, Gavras est resté plutôt sage dans sa volonté de bousculer les repères du spectateur. Certes, au fil du métrage, le cinéaste tend vers l’abstraction mais pas assez à notre goût. De la gentille provoc’ et une conduite de récit raisonnable rendent ce premier essai tout à fait fréquentable, loin du foutoir que nous ne souhaitions pas, mais également loin des théories « révolutionnaires » de l’auteur que nous espérions voir illustrées à l’écran.
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Dans l'une des scènes les plus hardies de Notre jour viendra, qui n'en manque pas, Vincent Cassel se masturbe dans le jacuzzi d'un hôtel, sous les yeux interdits d'un couple dont la femme est handicapée. On retrouve chez Romain Gavras, bien né malgré lui, cette volonté de choquer le bourgeois, de tuer le père. Comme elle existait chez Bertrand Blier, autre « fils de » en colère. Notre jour viendra a indubitablement des airs de Valseuses revisité par le cynisme et l'humour trash de Groland. Jusque dans l'ambiguïté sexuelle du couple Cassel-Barthelemy, double moderne de la paire Depardieu-Dewaere. Mais même la bagatelle n'excite plus les héros de Gavras. Seule la violence leur prouve qu'ils sont encore vivants. Notre jour viendra doit son titre au slogan de l'IRA : « Our day will come. » Du cinéma de terroriste ? Disons de guérilla.
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Le film assène sans grâce un message niaiseux de solidarité et d'espoir. Non, le jour du mélange de C'est arrivé près de chez vous et de Forrest Gump n'est pas venu.
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Hélas, en lieu et place d'esprit grinçant et satirique, nous n'avons le droit qu'à un pénible numéro du grand frère Cassel radotant ses gammes périmées d'anar de droite. (...) il faut un peu plus qu'un buzz pour transformer un long-métrage en coup de poing visuel. Il faudrait surtout un scénario qui ne se délite pas dès son premier tiers. Faute de quoi, cette charge anesthésiée couvre tant bien que mal les oripeaux d'un film déjà vieux. Même pas punk !
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(...) aucune note ne parviendra jamais à masquer le ridicule d'un scénario bâclé. La fin est superbe, mais il est déjà trop tard.
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Romain Gavras, 28 ans, fils de qui vous savez, est certainement un surdoué dont on attendra encore un peu le chef d'oeuvre. Auteur de nombreux clips pour des groupes forts comme Justice, ou récemment la chanteuse Mia, il signe un premier film qui dit sa fascination pour la violence, non sans humour. Tout la première partie du film est la plus réussie, avec un Vincent Cassel exceptionnel en aiguillon du mal, cocasse, libertin, ou d'une folie humoristique. Mais quand, avec son compagnon, ils basculent dans la démence puis la violence gratuite, difficile de ne pas penser à une relecture superficielle de Taxi Driver, d'Orange mécanique, etc...
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Tous ceux qui attendaient de ce long des éclaircissements sur son travail en seront pour leurs frais. Cette odyssée de deux roux (Vincent Cassel et Olivier Barthélémy) vers une Irlande idéalisée n'est qu'une succession de micro-provocs (faire pipi dans la baignoire d'une handicapée, par exemple). Ce qui pourrait ressembler à un plaidoyer pour le droit à la singularité ne dépasse finalement pas le stade de l'interrogation existentielle adolescente. Du style, mais quel piètre discours.
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Le racisme antiroux comme allégorie des dérives d’une société disloquée était déjà le ressort de Born Free ; il est à nouveau le moteur de ce road-movie un peu minable (on y parcourt cent bornes à tout casser) sur des types minables, embarqués dans une fuite en avant forcément meurtrière. Sous l’influence du Blier 70’s (Les Valseuses, Calmos…), Gavras n’en reproduit hélas que les tics les plus agaçants, compilation grandguignolesque de futures scènes “cultes” et malaisantes, sans l’humour et la portée libertaire de son maître. Ou quand le poème noir devient un pensum niais.
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En 2009, dans un clip destiné à la rappeuse américaine M.I.A., le metteur en scène imaginait une milice chargée d’éliminer les roux. Rouquins aussi, Patrick (Cassel) et Rémy (Olivier Barthelemy), les deux antihéros de « Notre jour viendra », rêvent d’une nation où ils ne seraient plus une minorité et mettent le cap sur l’Irlande le temps d’un road movie servi par des images splendides du nord de la France et une bonne dose d’humour mais aussi émaillé de tirades racistes et de scènes inutilement chocs.
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Clipeur fameux et controversé (pour Justice et M.I.A.), Romain Gavras déçoit avec ce premier long métrage foutraque. Road-movie sur l'errance de deux copains roux dans un monde qui leur semble hostile, le film accumule les effets épate-bourgeois autour de Vincent Cassel et d'Olivier Barthélémy. La virtuosité technique peine à masquer la vacuité d'un projet qui ne parvient qu'à agacer, alors qu'il cherchait visiblement à déranger. Dommage.