Sony Pictures Releasing France / Twentieth Century Fox France Metropolitan FilmExport

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

PIERRE LAPIN ★★★★☆
De Will Gluck

L’essentiel
L’adorable petit rongeur espiègle créé au début du XXe siècle par Beatrix Potter est le héros d’une fable aussi impolie qu’hilarante.

Des oiseaux dans le ciel bleu éclatant de la campagne anglaise… c’est sur cette image que s’ouvre le film de Will Gluck (Easy Girl). Ils virevoltent et chantent une douce chanson au parfum bucolique. Alors qu’ils se posent dans une chorégraphie étudiée, ils se font dégommer façon strike par un Pierre Lapin pressé, en pleine course-poursuite avec un renard. Le ton est donné : que ceux qui attendent une adaptation délicate et courtoise comme une conversation entre deux British de l’œuvre millionnaire de Beatrix Potter passent leur chemin.   
Perrine Quennesson

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PREMIÈRE A ADORÉ

DON’T WORRY, HE WON’T GET FAR ON FOOT ★★★★☆
De Gus Van Sant

Exception faite de sa participation à la série When We Rise (sur l’histoire des luttes LGBTQ), on avait laissé Gus Van Sant en mauvaise posture, sous les huées de la foule déchaînée, au moment de la présentation cannoise catastrophique de Nos Souvenirs en 2015. Un fiasco. Mais le cinéaste-caméléon a la peau dure, et rebondit aujourd’hui comme si de rien n’était avec ce beau Don’t worry, he won’t get far on foot, qui le voit revenir à son inspiration la plus feel-good, aimable, grand public.
Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A AIMÉ

RED SPARROW ★★★☆☆
De Francis Lawrence

Dominika, danseuse étoile blessée sur scène, est recrutée par le KGB pour devenir un super-agent secret, afin d'embobiner un espion de la CIA sur le territoire russe. Trahisons, coups de feu secs, coups doubles et bien fourrés dans le glacis ex-soviétique : on est en terrain connu, mais la particularité frappante de Red Sparrow est de pousser les curseurs bien loin dans le rouge en tout ce qui concerne la nudité et la violence, filmés plein cadre, sans aucun fard.
Sylvestre Picard

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ABRACADABRA ★★★☆☆
De Pablo Berger

Alors que le noir et blanc de Blancanieves servait à accentuer le contraste entre les bons et les méchants, la dualité est encore au coeur d'Abracadabra, mais de façon plus complexe. Cette fois, un changement d'identité est l'occasion de suggérer que le bien et le moins bien sont quasiment indissociables. Carmen (Maribel Verdu) est une mère au foyer dont le rêve d'une vie agréable est compromis par son mari Carlos (Antonio de la Torre), un macho obsédé de foot. A la suite d'une séance d'hypnose, Carlos est accidentellement possédé par l'esprit d'un mort. Du jour au lendemain, il devient charmant et se révèle un danseur irrésistible. Mais il y a un hic: le séducteur qui l'habite était un tueur en série. A partir de cette hypothèse lointainement inspirée des Mains d'Orlac, le récit traite les différents aspects de la modification de personnalité en faisant des détours par la farce, le thriller, le documentaire social et même la comédie musicale, avant de finir en fable sur la difficulté à choisir entre le souhaitable et le détestable, entre le fantasme et la réalité. Servi par des interprétes solides, dont sa comédienne fétiche Maribel Verdu, qui jouait la méchante dominatrice de Blancanieves, Berger orchestre son ballet tragi-comique avec une générosité parfois excessive, sa tendance à en rajouter risquant de provoquer la confusion.  Mais en fin de compte, dans ce registre qui rappelle Alex de la Iglesia, trop vaut toujours mieux que pas assez.
Gérard Delorme

MOBILE HOMES ★★★☆☆
De Vladimir de Fontenay

C’est l’histoire d’une mère courage indigne. Un paradoxe qui fait le sel de ce premier long métrage, découvert à la Quinzaine des Réalisateurs. Elle s’appelle Al. Et avec son fils Bone et son compagnon Evan, elle sillonne ls routes américaines et canadiennes en espérant un jour enfin se poser, entamer une vie « normale », se sédentariser. Mais à force de jouer avec le feu en survivant de petits trafics (de coqs de combats), elle va mettre l’avenir et plus précisément la vie même de son gamin en jeu. S’en rendre compte et donner alors cet équivalent du coup de pied au fond de la piscine pour entamer une autre existence loin de ce compagnon avec qui elle vit une passion charnelle tout en devenant synonyme de menace qui rôde sans avoir l’intention d’être laissé sur le bord de la route. Il y a du Winter’s bone dans la manière dont ce film traite d’une famille en souffrance, aussi explosée qu’explosive, sans jamais verser dans le glauque ou le misérabilisme mais en cherchant toujours, et surtout dans les moments les plus noirs, la lumière au bout du tunnel.  Le tout porté par une comédienne exceptionnelle qui n’a pas encore trouvé la reconnaissance publique que son insensé talent mérite : Imogen Poots, révélée voilà 11 ans dans 28 semaines plus tard et vue depuis avec le même bonheur chez Hideo Nakata, Cary Fukunaga, Michael Winterbottom, Jeremy Saulnier, Terrence Malick et surtout Peter Bogdanovich. Voyez et revoyez Broadway therapy, une fois découvert Mobile homes et vous comprendrez pourquoi cette actrice aussi à l’aise dans la comédie pétillante que dans le drame bouleversant décrochera tôt ou tard l’Oscar qu’elle mérite
Thierry Cheze

MADEMOISELLE PARADIS ★★★☆☆
De Barbara Albert

Située en 1777 dans la haute société viennoise, cette chronique du destin de Maria Theresia Paradis, jeune pianiste-compositrice aveugle à qui un médecin sulfureux tente de redonner la vue, n’est pas sans rappeler par sa reconstitution rococo le génial Amadeus de Milos Forman. À la différence que l’étouffement des salons aristocratiques, qui fait de l’héroïne un fragile instrument au service de sa famille et des cercles scientifiques, donne ici naissance à une potentielle mais éprouvante émancipation féminine. Derrière la réussite esthétique de ce biopic historique, la réalisatrice pose surtout avec vigueur cette étonnante question : renoncer à la cécité et voir le monde tel qu’il est ne limite-t-il pas l’expérience de la liberté et n’empêche-t-il pas de percevoir l’existence avec intensité ?
Damien Leblanc

CANDELARIA ★★★☆☆
De Jhonny Hendrix Hinestroza

C’est une histoire incroyablement gonflée et ne basculant pourtant jamais dans une quelconque provocation facile. Celle d’un couple de septuagénaires cubains, subissant au quotidien la crise économique violente qui étrangle leur pays au plus fort de l’embargo américain dans le milieu des années 90. Jusqu’au jour où le mari de ce couple rentre à la maison avec une caméra et décide de filmer leur intimité… et leurs ébats. Des petits films qui vont se vendre en douce comme des petits pains par l’entremise d’un petit voyou prêt à les faire chanter s’ils décidaient de s’arrêter. Mais qui vont surtout relancer le désir dans ces cœurs et ces corps forcément quelque peu usés au terme de tant d’années passées ensemble. Il en résulte à l’écran un singulier portrait de Cuba à travers une histoire d’amour tout à la fois espiègle et bouleversante. Ces fameux volcans qu’on croyait trop vieux mais d’où soudain rejaillit le feu, si chers à Jacques Brel.
Thierry Cheze

À L’HEURE DES SOUVENIRS ★★★☆☆
De Ritesh Batra

Ritesh Batra possède cet art délicat de savoir raconter et partager des romances à l’écran. Un genre trop souvent considéré comme mineur mais qui, chez lui, tient du délice émotionnel permanent. On l’avait découvert avec The lunchbox. Il l’avait confirmé avec Nos âmes la nuit – porté par le superbe duo Robert Redford- Jane Fonda – distribué sur Netflix après sa présentation à Venise en septembre dernier. Et A l’heure des souvenirs enfonce brillamment le clou. On y suit la vie d’un senior grognon au cœur plus grand qu’il ne veut bien le montrer (Jim Broadbent, une fois encore remarquable), divorcé et père d’une fille sur le point d’accoucher, qui vit une existence tranquille dans son petit magasin de photographie de Londres jusqu’au jour où il reçoit un étonnant legs. A sa mort, la mère de son premier amour d’adolescence lui a en effet confié en héritage… le journal intime de son meilleur ami du lycée. Ce drôle de cadeau va petit à petit faire remonter à la surface des souvenirs enfouis de son passé lié à ces trois personnages. Des souvenirs si bouleversants qu’il semble avoir cherché à les chasser lui- même de sa mémoire. Construit en flashbacks et flashforwards, A l’heure des souvenirs se révèle un petit bijou de sensibilité, servi par une mécanique de précision scénaristique. Celle d’Une fille qui danse », le roman de Julian Barnes (auteur déjà porté à l’écran avec Love etc. et Metroland) adapté ici par Batra. Et où ce qu’on vit – à tort ou à raison, c’est précisément ce qui constitue tout le sel du film – comme les premières trahisons amoureuses de sa vie pousse à des gestes définitifs sans en mesurer les conséquences sur soi et son entourage, pour les années à venir. Car celles- ci semblent bien loin et infimes par rapport à la douleur insoutenable de l’instant. Voilà pourquoi A l’heure des souvenirs est un grand film romantique, y compris et surtout dans la noirceur souvent tue ou masquée que cet adjectif peut charrier.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

PERCUJAM ★★☆☆☆
D’Alexandre Messina

Le groupe Percujam sillonne la France à la rencontre d’un public enthousiasmé par ces musiciens d’un genre particulier, pour moitié atteints d’autisme. Alexandre Messina les a suivis sur scène et dans le centre spécialisé où ils vivent, entourés d’éducateurs-musiciens qui appliquent une thérapie par l’art. Visiblement, ça marche pour tous ces jeunes qui semblent avoir dépassé leur handicap et trouvé une forme d’épanouissement. On regrette toutefois que Messina n’ait pas pris un peu de hauteur par rapport à son sujet –et à ses sujets : pas de contrepoint médical ni de témoignages extérieurs (famille, amis) pour étayer et/ou nuancer le bien-fondé de la méthode dont on ne sait pas si elle marche à tous les coups, sur tout le monde et si elle constitue une alternative sérieuse aux traitements classiques.
Christophe Narbonne

UN CHEVAL NOMMÉ ÉLÉPHANT ★★☆☆☆
De Andrés Waissbluth

Un grand-père sur son lit de mort demande à ses petits-enfants, Lalo et Roberto, de libérer leur cheval. Tout droit venu du Chili, Un cheval nommé Éléphant, est sur le papier un véritable conte pour enfant. Ce n’est pas tout à fait le cas tant certains propos (grossiers) et images pourraient heurter la sensibilité des plus jeunes. L’histoire, simple, tient la route. Andrés Waissbluth signe un long-métrage touchant et familial (à un certain degré, donc), où des enfants sont prêts à tout pour honorer les derniers vœux de leur grand-père et sauver leur amie, Manuela, "au péril de leur vie". Les petits acteurs sont drôles, attachants et jouent juste, tandis que les adultes incarnent sans surprise le vice et la méchanceté. 
Alexandre Bernard

 

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

LA MORT DE STALINE ★☆☆☆☆
D’Armando Iannucci

5 mars 1953. Staline s'effondre. Que faire ? se demandent les membres du Politburo autour de l'encombrant cadavre. Le massacre commence. La farce politique, hésitant entre parodie et satire, n’est pas au niveau de ce qu’on attend du brillant Armando Iannucci (The Thick of It, In the Loop, Veep): le portrait des dirigeants soviétiques (Steve Buscemi, Jeffrey Tambor…) est celui d'une galerie de gros incapables sympathiques, meurtriers de masse par accident plus que par calcul. Cette guerre de succession organisée autour de bons mots plus ou moins vulgaires, et plus ou moins bons, est épuisante. Chaque blague est répétée et/ou expliquée plusieurs fois (exemple de dialogue : « couille de chameau ! Tu as compris ? Je dis ça parce que tu ressembles à une couille de chameau »), ce qui a l'air d'amuser beaucoup les acteurs. Pas nous.
Sylvestre Picard

LUTINE ★☆☆☆☆
D’Isabelle Broué

Isa, réalisatrice, décide tourner un documentaire ayant pour sujet le polyamour. Sauf qu’entre acteurs et vrais intervenants, les frontières se brouillent et le couple d’Isa tangue dangereusement… Drôle de film que Lutine, jamais vraiment certain de sa nature : docu-fiction ? Comédie ? Drame ? Isabelle Broué se met en scène dans cet objet indéfinissable, à la fois réflexion sur la création cinématographique (le scénario s’écrit en temps réel à l’écran, façon vrai-faux making-of) et les amours plurielles. Une idée intéressante sur le papier qui s’essouffle rapidement à l’écran. Étrangement assez conventionnel dans sa méta-narration, Lutine souffre de ne jamais déborder de son propre concept et de rester très scolaire dans la retranscription du trouble des personnages. Il manque au film une ambition formelle, un vrai regard sur ce qui sépare réalité et fiction.
François Léger

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