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Truffaut et Godard, frères ennemis. Écrit par Antoine de Baecque, ce documentaire basé sur des images d’archives, des extraits de films et des articles, retrace l’histoire de la Nouvelle Vague à travers les relations entre ses deux figures de proue. La compétition larvée que le premier gagne souvent d’une courte tête (Les 400 Coups sera primé à Cannes en 1959 ; À bout de souffle recevra le Prix Jean-Vigo en 1960), la séparation consommée dans un échange épistolaire sanglant... Aucun témoignage, mais les commentaires d’Isild Le Besco, en exploratrice d’une époque épique.
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Le charisme des acteurs de cette histoire, la beauté de leurs films et l’impact durable de la révolution esthétique qu’ils portaient font de ce docu un film extrêmement plaisant à regarder, même si le cinéphile un tant soit peu informé n’y apprendra pas grand-chose de neuf. Mais on ne se lasse pas de revoir cette histoire de cinéma pleine d’éclat(s) et de panache, déclinable à l’infini (Lucas-Coppola, Desplechin-Rochant…).
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La première force du film vient de son respect minutieux de la chronologie en même temps que son obsession des archives. Cela n'étonne pas venant de l'historien de Baecque pour qui le film est le prolongement logique des deux sommes biographiques qu'il a consacrées à Truffaut en 1996 (avec Serge Toubiana) et à Godard en 2010. Le défilement du temps porté par la voix du commentaire donne à voir un parcours à deux sidérant de vitesse et d'intelligence, comme une course inconsciente où ils réalisent en dix ans leurs rêves de jeunesse. Il y a un canevas d'ensemble qui est une découpe en trois décennies. D'abord, 1949-1959, ou le temps de la cinéphilie et de la critique aux Cahiers du cinéma, avec une longueur d'avance pour Truffaut, polémiste de génie, critique qui prendra sur lui toute la haine qui s'accumulera vite sur la fronde des jeunes Turcs insolents (la Nouvelle Vague est attaquée dès 1963). C'est aussi le temps des maîtres à filmer que seront Hitchcock pour l'un, Lang pour l'autre, Rossellini pour les deux. Puis 1959-1969 ou la décennie prodigieuse qui transforme les deux cinéastes français en stars internationales, avec ici un léger avantage pour Godard (voir la dithyrambe de Truffaut qui écrit en 1966 : il y a un avant et un après Godard). Le dernier acte avant rupture se joue bien sûr autour de 1968 avec deux archives magnifiques parmi tant d'autres dans le film : d'abord, un clip pro-Cinémathèque française - leur berceau à tous les deux - au moment de l'affaire Langlois en février. Godard et Truffaut, debout face aux spectateurs, maladroits dans leur expression, récitent leur texte à tour de rôle comme deux enfants timides. Ensuite, la célèbre prise du Palais des festivals en mai 68 à Cannes où les deux exigent avec d'autres l'arrêt du festival. Comme le souligne le commentaire, leurs deux positions différent à ce moment-là. Quand Truffaut évoque la nécessité d'être solidaire avec la révolte générale, Godard insiste sur le fait de changer le manière de faire des films : « Vous me parlez travelling et gros plans, vous êtes des cons ! », réplique magnifique qui annonce la querelle terrible.
Corps emblème de cette relation d'amitié qui l'accompagne de sa présence poétique pendant dix ans, Jean-Pierre Léaud ouvre et conclut le film : le petit Doinel court sur la plage, se retourne vers nous et nous regarde : Deux de la vague est aussi un portrait de Léaud, par qui sont passées la grâce, l'intelligence, l'énergie des années 1960 et qui incarne aujourd'hui à lui tout seul la beauté de ce temps perdu. Ce qui reste de Truffaut et de Truffaut-Godard, c'est lui, l'enfant-témoin et son regard-caméra qui semble dire : et pourtant ! -
Deux de la vague, c'est un peu "La Nouvelle Vague pour les Nuls". (...) L'approche sensible n'est pas assez poussée; Truffaut n'a pas eu le temps d'user de sa tendresse. Et Godard, en vieil acariâtre, s'est enfermé dans sa colère sans donner à la jeune génération les moyens de lui dire merde. On ne se refait pas.
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Maintenant, pour ceux qui découvrent l'histoire du cinéma, Antoine de Baecque et Emmanuel Laurent offrent un résumé intéressant sur la portée de la Nouvelle Vague. Ce que les "jeunes turcs" voulaient changer ? D'où venaient-ils ? Tout ça est très bien expliqué. On regrettera cependant que la contribution de Chabrol au mouvement soit un peu traitée à la légère.
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Cette tourneuse de pages est Isild Le Besco. Elle est censée incarner la Nouvelle Vague 2010, représenter le lien entre la jeunesse d'aujourd'hui et celle des auteurs des 400 Coups et d'A bout de souffle. Un parti pris moins convaincant que le montage par lequel les auteurs égrènent des épisodes, connus des anciens (sans qu'ils aient nécessairement perdu leur impact émotionnel), mais que les moins de 20 ans peuvent ne pas connaître.
Deux de la vague multiplie les clins d'oeil, qu'il s'agisse d'objets fétiches, de correspondances biographiques, d'admirations cinéphiliques partagées, qu'on retrouve, recyclées, dans les films de l'un et de l'autre cinéastes.
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Cet excellent documentaire, intensément romanesque, parvient a faire revivre l’histoire de la Nouvelle Vague à travers le récit d’une amitié mouvementée.
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Biographe des deux cinéastes et spécialiste de la Nouvelle Vague, Antoine de Baecque a construit l'essentiel de son récit sur les documents d'archives. Pari réussi : son commentaire érudit et la réalisation sobre d'Emmanuel Laurent (hormis quelques séquences artificielles avec Isild Le Besco en témoin muette) tirent le meilleur parti des photographies en noir et blanc et des coupures de presse au papier jauni. Deux de la vague acquiert même une puissance romanesque quand il s'attache à la figure émouvante de Jean-Pierre Léaud, écartelé entre ses deux pères de cinéma qui se partagent l'acteur comme un couple en instance de divorce se dispute la garde de son enfant.