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On l’attendait avec impatience le Alice au pays des Merveilles version Burton. Et cette attente est merveilleusement récompensée. Disney, Lewis Carroll et Tim Burton, c’est le trio gagnant de ce mois de mars. Alice se transforme en lolita, la reine blanche à des allures de reine des damnés, le Chapelier fou est au-delà de toutes nos espérances… Bref, Burton nous en met plein la vue et nous enchante en réinventant cette aventure déjà mille fois adaptée. Poésie et féérie viennent se confronter à une vision plus cauchemardesque et terrifiante de ce pays des Merveilles.
On pourra toujours reprocher à cette Alice d’être plus disneyenne que burtonienne, mais, au fond, est-ce vraiment un mal ?
Toutes les critiques de Alice au pays des merveilles
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Transformations flippantes, atmosphère menaçante et paysages pas toujours féeriques... Tim Burton redonne tout son étrangeté au conte de Lewis Carroll. Et réussit ce petit miracle : transformer un scénario mille fois revisité par la culture populaire en une aventure singulière.
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On est bien sûr séduit par la beauté des images, des décors et des costumes. Idem pour la virtuosité de mister Burton à faire coexister créatures animées en 3D et personnages en chair et en os. Seul bémol : la dimension poétique et subversive de son conte se perd parfois dans le dédale de la prouesse numérique.
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Repoussant les limites de son art, Burton déploie des trésors d'imagination graphique, jouant sans cesse de perspectives et d'effets de montage empruntés à l'école expressionniste, pour briser la ligne un peu trop rigide de la narration et distiller un exquis climat d'incertitude et d'appréhension. Que viennent compléter de superbes effets d'optique basés sur les distorsions d'échelle et de proportion qui ne sont jamais de simples gimmicks, mais prolongent la complexité psychologique des personnages.
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Alice version Burton est avant tout un enchantement visuel d'une beauté à couper le souffle. Le monde de L'Etrange Noël de Monsieur Jack n'est pourtant pas loin dans ce conte dont le relief, dans sa version 3D, accentue la magie. Alice (Mia Wasikowska) fait des rencontres inquiétantes, saute sur les têtes des victimes de sa rivale, joue avec un chat du Cheshire au sourire carnassier et affronte un monstre cauchemardesque. Même la «gentille» est décalée. Mais Alice ne se réduit pas à un beau livre d'images. L'histoire de cette héroïne qui apprend à être elle-même en trouvant refuge dans un monde fantasmé fait écho à l'univers loufoque que Tim Burton s'est construit ado avant de l'imposer à Hollywood.
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L'une des plus belles réussites du film, collage d'acteurs et d'images de synthèse - qu'il faut absolument voir en 3D -, est la figuration du fameux Chat du Cheshire, symbole de l'impalpable en ce qu'il apparaît et disparaît, symptôme d'un esprit vagabond, félin au masque impénétrable doté d'un sourire insolent, si peu dévot, refusant de baisser les yeux devant le pouvoir. Un rien psychédélique, l'émerveillement visuel puise ses références chez les symbolistes, byzantins, et illustrateurs anglais de l'heroic fantasy.
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La vision fantastique de Burton se plie sans céder à l'univers de l'auteur anglais. Leur rencontre, à laquelle le relief n'apporte pas vraiment une dimension supplémentaire, apporte son lot de moments enchanteurs, entre rêves d'adultes et cauchemars enfantins.
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On appréciera mille et une inventions, telles ces merveilles libellules-chevaux à bascule. Mais, dans ce spectacle tridimensionnel où l'action et le spectaculaire prennent le pas sur la poésie et la logiques chères à Lewis Carroll, il n'est pas sûr que ce dernier y retrouverait ses petits !
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Rien que pour cette euphorie retrouvée des matières et des textures oniriques, Alice au pays des merveilles saisit dans sa continuité aléatoire. Dans le grand bouillon de ses rebondissements, ce ne sont pas les grands mouvements du récit (la bataille pompière et manichéenne de la fin) qui s'impriment, mais une multiplicité de détails ou de fragments qui finissent par créer l'illusion d'un ensemble. Le caméo de la petite grenouille-soldat du début, exceptionnel instant burlesque, ou bien, plus tard, le découpage de la séquence de la mort du dragon, entre autres, figurent parmi les plus belles scènes réalisées par le cinéaste. Reste Depp, fabuleux en chapelier fou, et toute une batterie de personnages (sommet : le chien neuneu) qui font crépiter cette belle expédition graphique. Burton n'a jamais été un grand cinéaste, juste un trublion baroque qui trouve, dans la pâte acidulée de la 3D et dans le simplisme disneyen le plus rudimentaire, l'occasion de mille tours de force optiques, comme cet admirable enchevêtrement de perspectives opposant au sein de mêmes plans la reine de coeur et son cavalier rouge. On en redemanderait presque.
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Dans un univers graphique éblouissant, tirant vers le conte gothique, avec une 3D mieux utilisée que dans « Avatar » et des effets spéciaux magiques, se déroule la mission d’Alice : délivrer d’un tyran, des êtres différents (Alice, elle-même en pleine quête initiatique, difformes ou bizarres, et maltraités. Un Tim Burton plus fidèle à Tim Burton qu’à Lewis Carroll.
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Le côté sombre, transgressif et baroque de la fable excentrique de Carroll a un peu été passé à l'abrasif d'une esthétique consensuelle, qui plaira néanmoins aux enfants.
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Clin d'oeil appuyé mais pas chef d'oeuvre, le tout est plaisant comme un gâteau au glaçage 3D, mais dont on connaît déjà les ingrédients.
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Rêve ou réalité ? Tim Burton, dans son adaptation, se garde bien de donner la réponse. Jouant à fond avec les effets de la 3D on doit parfois se baisser en croyant recevoir des objets en plein visage ! il a composé, comme à son habitude, un univers totalement loufoque. Seul regret : on se dit par moments qu’il s’est contenu pour ne pas trop « assombrir » le tableau dans un film estampillé « pour enfants » et produit par Disney. Mais on se console avec l’incroyable galerie de personnages qu’il a créée, du délirant chapelier pour lequel Johnny Depp fait des merveilles à la haute en couleur Reine Rouge (interprétée par la compagne du réalisateur, Helena Bonham Carter) en passant par des monstres époustouflants…
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Si le cinéaste se perd ainsi un peu en chemin, les aficionados de l’auteur pourront se raccrocher tant bien que mal, aux quelques éléments de cohérence avec son oeuvre. Le Wonderland que la jeune femme (re)découvre rappelle indéniablement l’univers de Burton - notamment la poésie mélancolique du jardin d’Edward dans Edward aux mains d’argent. De manière récurrente dans la filmographie du cinéaste, on retrouve la mise en place de deux univers dans une opposition aussi frontale que factice, voire biaisée. Deux reines, deux châteaux, deux armées, qui se battent sur un échiquier géant. On appréciera aussi l’humour typiquement burtonnien comme la scène, déjà très drôle dans le livre, de la partie de croquet avec des flamants roses, qui viennent nous rappeler que le cinéaste n’a pas perdu de sa verve. Niveau humour, mention spéciale pour la Reine Rouge, interprétée par Helena Bonham Carter, qui, avec sa tête énorme et grotesque, vissée sur son tout petit corps, crie toujours plus qu’elle ne coupe de têtes. Ouf, tout n’est pas perdu !
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Ce n'est pas un rouquin idiot qu'Alice finit par épouser, mais de vieilles théories érigées en recettes de succès par Hollywood il y a plus de vingt ans. Il n'y a plus qu'à espérer que ces deux-là ne nous fassent pas de portée.
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Une fois de plus, par le biais du conte et du rêve, Burton loue donc l'étrangeté des âmes créatives et des freaks contre la trivialité et la brutalité banale des gens « sensés »/« normaux », aboutissant à une bonne grosse bataille manichéenne. Un horizon moral qu'on peut trouver limité, voire démagogique, et sonnant d'autant plus faux qu'il est contredit par l'existence même de ce film-baudruche assommant de vulgarité, dépourvu de la moindre étincelle magique, bref « normal », et ce malgré son double étendard Disney/Burton.
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Le film, sous le déluge d’images de synthèse, est une très classique histoire initiatique qui évoque parfois davantage "le Monde de Narnia" que l’univers de Burton : la personnalité du cinéaste se révèle quelque peu soluble dans le blockbuster en relief. Ce sont les acteurs qui font la différence : Mia Wasikowska, repérée dans la série "En analyse", fait une Alice au caractère bien trempé ; Helena Bonham Carter est une hilarante Reine rouge ; Johnny Depp, en chapelier fou, emmène le film vers l’étrangeté qui lui manque.
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(...) Alice au pays des merveilles prouve que la poésie et le merveilleux ne se décrètent pas à l’avance, mais résultent d’un processus mystérieux qui n’a le plus souvent pas grand rapport avec la mise en chantier d’un blockbuster. Le film défile comme la partition d’un piano mécanique, comme du Cocteau piqué aux hormones et réglé sur pilotage automatique : nickel mais sans âme. Notre époque libéralo-techniciste a parfois le cinéma et la “poésie” qu’elle mérite.
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Plutôt un film d'aventures, où la gentille fille se transforme en superhéroïne au fil des épreuves. Il ne reste plus grand-chose du « badinage angoissé » (selon Jean-Jacques Mayoux, auteur d'une préface passionnante dans l'édition GF-Flammarion) : peu d'attention accordée aux devinettes, aux facéties de langage, bref à la création poétique. Lewis Carroll, faut-il le rappeler, est l'inventeur du mot-valise. Les mômes en auront sans doute pour leur argent, du moins celui de leurs parents. Ces derniers en revanche seront inconsolables : quand est-ce que le magicien Burton reviendra pour s'adresser à eux aussi, les adultes ?