Trente ans après avoir travaillé sur le film de Jan de Bont, Ben Snow, pro des effets visuels pour ILM, décrypte son travail à la post-production du blockbuster évènement.
Depuis sa sortie mi-juillet, Twisters connaît un joli succès en salles, aussi bien américaines que françaises. Les critiques s’accordent à dire que c’est surtout pour ses effets visuels, saisissants, que le film de Lee Isaac Chung sort son épingle du jeu. Déjà, le film original de Jan de Bont, Twister, était nommé pour l’Oscar des Meilleurs effets spéciaux en 1997. Le principal nom qui relie les deux films ? C’est Steven Spielberg, pointure dans le domaine, qui produit les deux blockbusters, à presque trente ans d'écart.
Aux côtés de Spielberg, la société Industrial Light and Magic (ILM pour les intimes), et Ben Snow, spécialiste des VFX. Trente ans après, il est revenu dompter les tornades pour ce nouveau film catastrophe avec Daisy Edgar-Jones, Glen Powell et Anthony Ramos en tête d’affiche. Les choses ont bien changé en trois décennies, comme le raconte Ben à IndieWire :
“Pour le film original, tout était plus difficile. Nous étions en train d'inventer une grande partie de la technologie et nous ne savions pas vraiment ce que nous faisions. C'est pourquoi je pense qu'il est vraiment bon de pouvoir y revenir et de le revisiter avec un ensemble d'outils modernes.”
Il a aussi fallu s’adapter à la nouvelle vision des tornades de Lee Isaac Chung, une vision naturiste où les tornades présentent des caractéristiques singulières. A chaque tornade sa personnalité, en somme.
“Il était très important pour le réalisateur de pouvoir les identifier. Nous avons passé en revue quelques images pour voir à quoi chacune ressemblerait. Nous avons également visionné des clips vidéo des différents rythmes que nous voulions, car l'un des avantages que nous avons aujourd'hui, c'est qu'il y a beaucoup de séquences disponibles sur YouTube. Nous avons donc pris les photos et les clips de référence qu'Isaac nous avait donnés et nous avons discuté du caractère de chaque tornade. Nous avions une équipe d'animation assez importante, et nous avons commencé par déterminer à quoi ressemblerait la tornade, puis nous avons essayé de lui donner une impression de mouvement par le biais de l'animation.”
Toute l’intrigue du film repose sur la confrontation à une tornade d’intensité EF-5, qui a emporté les proches de Kate, jeune thésarde qui travaillait alors sur un projet universitaire. Des années plus tard, changement climatique oblige, les tornades se multiplient et font des ravages dans le Midwest, et Kate revient tester un nouveau dispositif qui pourrait aider à les étudier. De fait, Twisters présente pas moins de six tornades qui montent en intensité tout au long de son intrigue, allant de la EF-1 à la EF-5.
Ben Snow a trouvé la recette pour une tornade parfaite : un entonnoir entouré d’une fine couche de poussière ou de vapoteur, un champ de débris poussiéreux, un champ de débris rigides, un nuage mural pour raccorder l’entonnoir aux nuages et un nuage de plateau qui raccorde le tout au ciel en arrière-plan.
“Ces éléments ont été déterminés par nos études visuelles des séquences de vraies tornades, que nous avons sélectionnées sur la base de ce que la science nous dit sur la façon dont elles sont constituées.”
Bien évidemment, le technicien n’a pas créé toutes les images à partir de rien, et a trouvé une parade pour gagner un temps précieux, ainsi que de l’argent :
“Dans certains cas, j'ai pu trouver des images de vrais chasseurs de tempêtes. Je faisais des compilations avec des extractions brutes dans un logiciel de montage. Nous les examinions avec nos artistes ILM pour nous assurer qu'elles conviendraient à l'équipe VFX, et de manière créative avec Isaac Chung. Une fois qu'Isaac les avait approuvés, ce matériel pratique constituait notre point de départ.”
Le plus gros challenge restait les deux tornades EF-5 qui encadrent la narration, une au début du film, l’autre à la fin. Attention, c'est un poil technique :
“Pour les tornades EF-5, nous avions essentiellement les mêmes ingrédients. Mais au lieu d'un entonnoir, nous avons utilisé une gigantesque cale. Pour obtenir les détails dont nous avions besoin dans la simulation, nous pouvions diviser le coin de la tornade en tuiles volumétriques 3D, comme de grands voxels (un pixel en volume, NDLR). Cela a permis une grande précision dans chaque simulation, et l'outil pyro de LFL (logiciel qui permet de faire des flammes, NDLR) nous a permis de faire passer les vitesses et les vecteurs directionnels à travers les limites des tuiles volumétriques, afin que le résultat final soit un ensemble cohérent en termes de physique et de comportement des nuages et de la poussière.”
Si tout cet assemblage se fait principalement sur ordinateur, les acteurs ne sont pas ressortis indemnes de leurs rencontres avec les tornades sur le plateau. Dans un entretien, Anthony Ramos, l’interprète de Javi dans le film, racontait à Première le tournage de ces séquences d’actions :
“Le tournage s’est déroulé sur le terrain, avec l’idée que tout devait être le plus réaliste possible. Pour créer l’illusion des tornades, l’équipe des effets spéciaux a utilisé des réacteurs d’avion. Et on était plus sur du Boeing 707 que sur un petit gabarit. Poursuivre les tornades en voiture n’était pas plus évident que dans la vraie vie. Entre le rideau de pluie artificielle, le souffle des réacteurs et la terre qu’on nous balançait au visage, on n’y voyait pas à deux mètres. En plus, la caméra – qui était à l’abri, sur un camion qui roulait devant nous, – était très serrée sur nous, donc on devait faire attention à nos expressions de visage. C’était vraiment une expérience pas comme les autres.”
Twisters est toujours à découvrir au cinéma. Voici la bande-annonce du film, avec des tempêtes dedans :
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