Flag Day
Allen Fraser - Metro Goldwyn Mayer Pictures - Le Pacte

A revoir ce soir sur Canal +.

Après le crash The Last Face, Sean Penn tentait de renouer avec sa veine « Americana » en présentant Flag Day au festival de Cannes 2021. Le réalisateur n'a pas convaincu la rédaction, même si son film reste intéressant sur plusieurs points. Il sera diffusé ce soir sur Canal +, la chaîne profitant de la 75e édition du festival pour proposer des oeuvres précédemment dévoilées au public dans le cadre de cet incontournable festival.

Critique initialement publiée le 21 juillet 2021 : Que devient Sean Penn ? En tant qu’acteur, il s’était fait assez rare ces dix dernières années – une poignée de films (Gunman, Gangster Squad…) et une série peu commentée, The First, annulée au bout d’une saison. Le Sean Penn journaliste, lui, avait fait un coup fumant en racontant sa rencontre avec le baron de la drogue El Chapo dans les pages de Rolling Stone. Quant au Sean Penn réalisateur, il s’était fait démolir dans les grandes largeurs par la critique internationale hilare lors de la présentation cannoise de The Last Face, en 2016.

Flag Day, son nouveau long-métrage, dans lequel il se met lui-même en scène pour la première fois, est donc, d’une certaine manière, le film d’un come-back. Humble, modeste. Inspiré de Flim-Flam Man, un livre de la journaliste Jennifer Vogel, qui y raconte sa relation tumultueuse avec son père, arnaqueur et faux-monnayeur, le film renoue thématiquement avec la veine de The Indian Runner, Crossing Guard et Into the Wild : c’est une réflexion sur l’inévitable trahison des pères, et sur l’impasse où mène la rébellion.

Sean Penn n’a jamais été un acteur qui réalise des films à l’occasion, pour se dégourdir les jambes. C’est un auteur, un vrai. Un héritier de la tradition beatnik, qu’il relit à l’aune d’un nihilisme caractéristique de la génération X. Comme le personnage joué par Emile Hirsch dans Into the Wild, John Vogel, le héros de Flag Day, fait une lecture maximaliste, presque absurde, de l’idéal de liberté promis par l’Amérique. Et cette incompréhension originelle va le condamner à une fuite en avant mortifère.

Esthétiquement, Penn remet ici sur le métier son goût pour une forme de collage poétique impressionniste – intrigue à la temporalité éclatée, kaléidoscope d’images et de sensations saisies à la volée, longues plages musicales. Plus que jamais, on le sent sous l’influence de deux cinéastes qui ont été essentiels dans son parcours d’acteur, Inarritu et Malick. Mais la comparaison n’est clairement pas à son avantage. Au-delà du fait qu’elle est en partie démodée, cette forme éclatée, façon mosaïque, finit par donner au film un aspect dévitalisé, désincarné. Penn papillonne et, du coup, prend à peine le temps de se poser aux côtés de ses personnages, de les caractériser autrement que par des raccourcis faciles, de laisser l’émotion s’installer. Le tandem qu’il forme avec sa propre fille, Dylan Penn, ne produit pas véritablement d’étincelles et, si on est heureux de retrouver sa gueule chiffonnée de vieux pirate, il ne parvient jamais à trouver la dimension iconique appelée par le script (qui fait penser au beau The Old Man & the Gun de David Lowery, avec Robert Redford). Sean Penn est un auteur, incontestablement. Mais pas toujours un réalisateur très inspiré.


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