Affiches sorties de film mercredi 24 novembre 2021
Universal Pictures/ Wild Bunch Distribution/ The Walt Disney Company France

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
HOUSE OF GUCCI ★★☆☆☆

De Ridley Scott

L’essentiel

Les cabots maquillés aux accents bizarres qui peuplent le nouveau Ridley Scott étouffent ses fascinantes saillies sur l’art et ses escrocs.

"It’s all bullshit", en fait. La noble généalogie de la famille Gucci, la fortune fondée sur des sacs en cuir de luxe alors qu’en réalité ce sont les imitations chinoises les plus profitables : bullshit. "La qualité, c’est pour les riches", commente l’oncle Aldo Gucci (Al Pacino) face aux copies made in China. L’art, ou bien une vaste escroquerie menée par de vieux croulants : c’est là l’idée la plus fascinante, et la plus convaincante, du nouveau Ridley Scott. En tout cas, ça semble plus intéresser le cinéaste que le destin tragique du couple formé par Maurizio Gucci (Adam Driver) et Patrizia Reggiani (Lady Gaga). Il signe ici une farce noire hésitant entre le grotesque vintage d’American Bluff (avec lequel il partage son goût de la malle à costumes, et l’utilisation de I Feel Love de Donna Summer) et la noirceur terrible des meilleurs Scott récents comme Cartel. Mais House of Gucci n’est pas assez bien écrit pour supporter la comparaison avec Cartel, et se repose sur le jeu de son casting. A part Leto, rien à dire sur les performances du casting. Même si l’accent forcé de Lady Gaga, au demeurant super, surtout dans son duo réjouissant avec la cartomancienne trash (encore une arnaqueuse, tiens donc) jouée par Salma Hayek, sonne drôlement russe, et drôlement pesant. Le genre de performance qui finit par étouffer plutôt que renforcer le propos passionnant de House of Gucci. Un film hésitant et fascinant, donc, mais bon, après tout, "it’s all bullshit"

Sylvestre Picard

Lire la critique en intégralité

PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

L’EVENEMENT ★★★★☆

De Audrey Diwan

A la sortie de L’événement, son roman autobiographique où elle racontait son parcours pour se faire avorter clandestinement dans la France des sixties, Annie Ernaux expliquait avoir voulu résister « au lyrisme et à la colère. » En l’adaptant, Audrey Diwan voyait donc devant elle, un chemin à priori balisé sur lequel ses pas devaient tant bien que mal respecter une cadence, une humeur. Au lyrisme, la réalisatrice répond donc par une image au (presque) carré qui emprisonne un être que la caméra suit de près. Chez Audrey Diwan, le hors champ tient lieu de menace, le cadre devenant un sanctuaire où l’héroïne – jugée impure par une époque – (Anamaria Vartolomei, un événement à elle-seule !) se protège, se bat et se tient prête, avec une rage souterraine dont les vibrations fracturent le monde. Trois ans après Mais vous êtes fous, Audrey Diwan signe un survival tendu où l’enjeu ne repose pas seulement les faits relatés mais sur l’élan qui rend une résistance à l’ordre établi possible.

Thomas Baurez

Lire la critique en intégralité

ENCANTO, LA FANTASTIQUE FAMILLE MADRIGAL ★★★★☆

De Byron Howard et Jared Bush

Ca fait un petit moment que la magie de l’oncle Walt ne fonctionnait plus tout à fait correctement. Et ce n’est pas le trailer d’Encanto qui nous avait rassuré : la musique colombienne ne faisait pas rêver et les personnages n’avaient pas grand chose à vendre… Mais le numéro d’ouverture emporte tout. Les doutes et les réticences. Aux commandes, on retrouve les deux réalisateurs de Zootopie, leur humour comme le soin maniaque qu’ils apportent à la caractérisation des personnages. Encore mieux : la musique a été confiée à Lin-Manuel Miranda qui signe une partition subtile, pleine de couleur, d’énergie, de rythmes sud-américains et de clins d’œil parfaits à la pop la plus ravageuse. Bref. Humour, mélodie et aventure : la vie éclabousse la Cacita.  C’est là que se déroule l’intrigue du film. Une énorme maison magique où vit l’étrange famille Madrigal. Etrange parce que tous ses membres ont un superpouvoir. Tous sauf Mirabel. Et c’est cette absence de pouvoir qui va lancer le film. C’est ce « manque » qui l’oblige à partir à « l’aventure ». Mais à la différence des récents Disney, Mirabel ne va pas partir à l’autre bout du monde pour apprendre à se connaître ; elle va plonger au cœur de la maison pour découvrir quel rôle elle joue dans l’histoire des siens.

Le soixantième film made in Disney, prouve qu’en laissant les meilleurs membres du studio divaguer, en les autorisant à s’amuser avec les valeurs promues par Walt tout en y apportant un peu de modernité et de chaleur, la magie peut encore opérer. La maison Disney est bien vivante et n’a rien à craindre des fissures…

Pierre Lunn

Lire la critique en intégralité

PREMIÈRE A AIME

DE SON VIVANT ★★★☆☆

De Emmanuelle Bercot

Regarder la mort en face, vaste programme auquel s’attèle ici Emmanuelle Bercot. Benjamin (Benoît Magimel) est atteint d’un cancer en phase terminale. Emmanuelle Bercot ne se dérobe pas, sa mise en scène fiévreuse abolit les distances, reconfigure l’espace pour préparer l’embaumement. Autour, il y a aussi la mère, Crystal (Catherine Deneuve), là, lasse et impuissante ; le fils non reconnu qui hésite – là, pas là ? ; ou encore l’infirmière (Cécile de France) séduite in fine. A cela se greffe une touche très documentée. La barque devient lourde, trop, menace d’un naufrage. Les éclairs du mélo ne peuvent pas tout. Mais au centre, il y a Magimel et son visage impénétrable à la surface duquel la vie a pourtant pris ses quartiers. La lumière recompose à l’envi cette belle figure. De son vivant est un film étrange dont certains aspects paroxystiques évoquent même de Palma. Ce n’est pas rien.

Thomas Baurez

Lire la critique en intégralité

SOUL KIDS ★★★☆☆

De Hugo Sobelman

Grand admirateur de musique américaine, le français Hugo Sobelman a entrepris il y a quelques années un voyage outre- Atlantique sur les terres de ses sons préférés : le jazz de la Lousiane, le blues du Mississipi et… la soul de Memphis. Et c’est en se rendant comme en pèlerinage dans les locaux du légendaire label Stax Records qu’il a découvert que ceux- ci abritaient aussi désormais une école de musique, entièrement gratuite, permettant à des ados passionnés mais issus de familles pauvres d’apprendre tout à la fois les plus grands tubes soul… et l’histoire des Noirs américains. C’est le quotidien de ce lieu enchanteur qu’il a choisi de raconter dans ce documentaire. Une magnifique histoire de transmission puisque Stax, à la différence de son concurrent Motown, fut un des acteurs majeurs du militantisme noir- américain et du long combat pour les droits civiques. On retrouve cette fièvre et cet engagement dans les échanges entre profs et élèves où bien plus que mettre sur orbite de potentielles stars, il est question de former des citoyens éclairés en s’appuyant sur leur passion pour la musique. Sobelman sait aussi bien capter les moments de grâce musicaux que les confidences des profs et des élèves. Les échanges autour du rap, des dévoiements par tant de rappeurs du message originel véhiculé par ce genre musical et de la manière d’y remédier sont particulièrement passionnants, car dépouillés de tout raccourci simpliste. Un documentaire emballant.

Thierry Cheze

FRIDA, VIVA LA VIDA ! ★★★☆☆

De Giovanni Troilo

« Tout a été dit sur Frida Kahlo, tout a été écrit », souligne Hilda Trujillo Soto, la directrice du musée Frida Kahlo, en intro de Frida - viva la vida. C’est sans doute une manière, pour le réalisateur Giovanni Troilo, de s’excuser d’arriver après des dizaines d’autres biographies, expos ou célébrations diverses de l’icône de la peinture mexicaine. De fait, ce film n’apprendra sans doute pas grand-chose aux connaisseurs. Mais il peut faire office de bon point de départ pour les néophytes. Les œuvres de Kahlo y sont intelligemment disséquées, et constamment mises en perspective avec sa biographie, déroulée ici avec minutie. On regrettera juste ces scènes pseudo-poétiques, et franchement inutiles, dans lesquelles une actrice déambule dans des paysages mexicains, ainsi que le ton exagérément emphatique employé par la narratrice, Asia Argento. 

Frédéric Foubert

Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première Go

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

LIBAN 1982 ★★☆☆☆

De Oualid Mouaness

Pour son premier long, Oualid Mouaness revient sur un événement qui a marqué son enfance : ce jour de juin1982 où il fut le témoin direct à 10 ans de l’invasion de sa ville natale de Beyrouth par l’armée israélienne, dans le cadre de l’Opération Galilée visant à faire cesser les attaques de l’OLP depuis le Liban. Son Liban 1982 raconte cette journée à travers deux regards complémentaires. Celui du gamin qu’il était, préoccupé avant tout par les vacances qui arrivent et vont l’éloigner de la petite fille pour qui il a le béguin. Et celui des adultes, en l’occurrence les profs et le personnel de son école qui tentent de garder leur calme pour protéger les enfants alors que les bombes tombent et que les interrogations sur les premières victimes montent. Cet hymne à l’innocence de l’enfance ne manque pas de charme mais souffre d’une mise en scène trop plate pour que ses belles intentions se déploient visuellement à l’écran.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

SUPRÊMES ★☆☆☆☆

De Audrey Estrougo

L’archive de François Mitterrand qui ouvre Suprêmes, où le Président s’interroge sur l’état des banlieues françaises, offre un cadre socio-politique assez puissant au biopic de NTM. L’espace d’un instant, on se prend à fantasmer une fresque grand style, qui raconterait comment la musique de Kool Shen et Joey Starr a réveillé un pays endormi puis accompagné ses mutations. Mais c’est une fausse piste : le film d’Audrey Estrougo se révèle vite être un biopic musical très scolaire, qui se fade toutes les figures imposées du genre et refuse de choisir une ligne directrice, un angle qui donnerait un véritable sens à l’entreprise, au-delà de l’exercice d’admiration et du plaisir de fan. L’énergie, le talent et l’investissement des deux acteurs principaux, Théo Christine et Sandor Funtek, ne sont pas en cause, bien au contraire, ni même la reconstitution, plutôt réussie, de la France de la fin des années 80. C’est la puissance normative du biopic-Wikipédia, et sa déprimante succession de cases à cocher, qui fout tout en l’air.

Frédéric Foubert

Lire la critique en intégralité

AU CREPUSCULE ★☆☆☆☆

De Sharunas Bartas

La lenteur comme marque de fabrique… jusqu’à la caricature. Un film de plus mais rien de nouveau sous la grisaille. Les adorateurs adoreront, les pourfendeurs pourfendront. Sharunas Bartas raconte ici la montée en puissance, après la seconde guerre mondiale, du mouvement des Partisans en Lituanie, tentant de résister à l’emprise étouffante et grandissante de l’occupation soviétique. La composition des plans, la précision de la mise en scène sont inattaquables. Mais la frontière entre l’épure subtile et l’assèchement généralisé est fine. Et au fil des années et des films, le cinéma de Sharunas Bartas a tendance à la piétiner en virant à la caricature de lui- même. Un cinéma poseur à force de ne jamais se renouveler et qui finit par étouffer son récit, comme si tendre la main aux spectateurs dans un simple geste pédagogique représentait pour lui l’Antéchrist absolu.


Thierry Cheze

 

Et aussi

En attendant la neige, programme de courts métrages

Far from the tree de Natalie Nourigat

Hikikomori de Sophie Attelann

Les Mots de Taj de Dominique Choisy

Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City, de Johannes Roberts

 

Les reprises

L’Incompris de Luigi Comencini

Un sac de billes de Jacques Doillon