La plateforme était pourtant favorite.
Même Ricky Gervais, encore une fois hilarant dans son rôle de maître de cérémonie, était persuadé de la suprématie de Netflix sur les Golden Globes : « Plus personne ne va au cinéma, plus personne ne regarde la télévision. Tout le monde regarde Netflix. Cette cérémonie devrait se résumer à moi, disant : ‘Bien joué Netflix. Vous avez tout gagné’ ». Sauf que les choses ne sont pas déroulées comme prévu. Donnée favorite depuis des mois, avec un nombre impressionnant de 17 nominations entre séries et cinéma, la plateforme de streaming est pratiquement repartie bredouille, à l’exception de Laura Dern (meilleure actrice dans un second rôle pour sa prestation incroyable dans Marriage Story) et d’Olivia Colman (meilleure actrice dans une série dramatique pour son rôle dans The Crown). À titre de comparaison, la firme de Los Gatos avait remporté cinq Golden Globes l’année dernière…
Golden Globes 2020 : Les grands gagnants en cinéma sont Quentin Tarantino, Sam Mendes, Bong Joon-Ho, Laura Dern, Brad Pitt, Joaquin Phoenix…Alors que s’est-il passé ? Côté cinéma, l’échec cuisant de cette année 2020 - celle où Netflix devait définitivement s’imposer comme un acteur majeur dans la course aux prix - peut s’expliquer en grande partie par une rude concurrence, notamment de 1917 de Sam Mendes (la grande surprise), de Once Upon a time… in Hollywood et de Joker, qui sont à eux trois repartis avec sept Golden Globes, dont les plus prisés (Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleure comédie ou comédie musicale, meilleur acteur dans un film dramatique, meilleur acteur dans un second rôle…). Une tornade de grands films contre laquelle Netflix ne pouvait rien faire. Même la légende Martin Scorsese, armé de son The Irishman, dont on pensait qu’il a allait tout rafler (Al Pacino et Joe Pesci étaient notamment nommés pour le meilleur second rôle), n’a pas pu résister. Vu le budget du film estimé à 159 millions de dollars, la pilule sera dure à avaler pour Netflix, dont la stratégie consistait à produire le long-métrage ignoré par les studios pour briller dans les cérémonies.
On suppute également que de nombreux votants des Golden Globes, membres de l’Association hollywoodienne de la presse étrangère, ne voyaient pas forcément d’un très bon oeil la prédominance croissante de Netflix sur le cinéma mondial, et la potentielle extinction des salles obscures. Reste maintenant à savoir si la même claque se reproduira aux Oscars, dont les Golden Globes sont censés être l’antichambre.
Échec en séries
Pour les séries, il semblait évident que Netflix n’allait pas réussir à s’imposer : la plateforme a proposé des séries de qualité (Russian Doll, Unbelievable, The Politician, The Kominsky Method, Living With Yourself…) mais relativement oubliables, du moins pas assez marquantes pour faire taire la concurrence. La compétition était féroce car il fallait lutter contre Succession, Fleabag, Ramy, Fosse/Verdon ou Chernobyl, autrement plus ambitieuses. À l’heure où les plateformes poussent comme des champignons et qu’il n’y a jamais eu autant de séries à voir, la firme semble prise au piège par son propre business model (produire en quantité, pour garder ses abonnés captifs). La stratégie de Netflix qui consiste à tirer dans tous les coins en croisant les doigts pour produire au moins un ou deux chefs-d’oeuvre aurait-elle fait son temps ?
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