Drame surréaliste, farce métaphysique teintée de mythologies littéraires, conte bouffon peuplé de spectres (Giono, Mallarmé et Borges), rêve obsédant sur la mort et la renaissance... Voilà à quoi ressemble La Nuit d’en face, le dernier Raoul Ruiz. N’importe quoi ? Un petit peu, forcément.Mais cette oeuvre testamentaire est surtout très drôle, très douce et d’une intelligence épatante. Un fi lm qui regarde la mort droit dans les yeux, comme on sait le faire en Amérique du Sud. Impossible de ne pas penser aux derniers longs de Coppola pour l’ambiance mortifère et la relecture, au bord de l’abîme, d’une très riche carrière. Mais là où l’auteur du Parrain semble avoir abandonné toute prétention cinématographique, Ruiz, jusqu’au bout, aura cru dur comme fer au pouvoir des images et à sa perversion magique. Il faut marcher une dernière fois avec luiau coeur de l’épaisseur mystérieuse de cette Nuit d’en face.