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C’est bientôt la fin de l’enfance. A la fin de l’été en tout cas, c’est sûr, celle-ci ne sera plus qu’un lointain souvenir. Falcon Lake, film de mue, de crépuscule, premier long-métrage de Charlotte Le Bon, veut saisir ce moment où un presque ado brise sa chrysalide. Bastien (Joseph Engel), un Français de 13 ans, vient passer les grandes vacances au bord d’un lac canadien avec ses parents et son petit frère, dans le chalet d’amis de la famille. Là, il retrouve Chloé (Sara Montpetit), 16 ans, une beauté qui lui coupe le souffle. Ils ont trois ans d’écart ; à cet âge-là, c’est comme si elle habitait sur une autre planète. Adapté d’une BD de Bastien Vivès (Une sœur), Falcon Lake donne une fébrilité nouvelle au genre très rebattu du coming-of-age movie, en en soulignant la dimension mortifère, en l’envisageant comme un conte néo-gothique, spectral, fantomatique. C’est l’été, le soleil brille, et pourtant les ténèbres sont partout, les présages de mort abondent. Charlotte Le Bon nimbe la nature entourant les protagonistes de teintes fantastiques pour mieux raconter ces émotions teenage extraordinaires, qui donnent à ceux qui les éprouvent un sentiment d’absolu, d’éternité, tout en autant par nature vouées à disparaître presque instantanément, au moment même où on les éprouve avec le plus d’intensité. Depuis les bords d’un lac de la région des Laurentides, au nord-ouest de Montréal, elle jette un pont vers les rives du mouvement Southern Gothic, illustré ces dix dernières années aux Etats-Unis par des cinéastes comme Jeff Nichols ou David Lowery.