Ce qu’il faut voir en salles.
L’ÉVÉNEMENT
SCREAM VI ★★★☆☆
De Matt Bettinelli- Olpin et Tyler Gillett
L’essentiel
Porté par les brillantes Melissa Barrera et Jenna Ortega, le nouveau Scream fait bien son job, mais sans génie, avec un fond théorique discutable.
L’idée la plus forte de ce Scream VI... est de sortir un an après le reboot de la franchise avec le cinquième Scream. La preuve que Scream peut devenir un rendez-vous annuel, où l’on se réunit autour du slasher de la fin de l’hiver, voir des jeunes (et des vieux) se faire étriper par les nouveaux avatars de Ghostface. Soit la perspective d’un moment cool. Et de ce point de vue, c’est une réussite, puisque le film est franchement réjouissant en tant que tel : ça frappe et ça saigne très généreusement. Sans génie, d’accord, mais on sent tout de même une saine envie de faire plaisir.
Mais quid du point de vue méta ? C’est un peu là où ça coince. Pas de Scream sans son passage obligé où un personnage énumère les règles de cinéma s’appliquant au film en cours. Mais alors que les films précédents voyaient généralement juste, là, les règles sont complètement à côté de la plaque. Scream VI fonctionne mieux quand il capitalise sur sa propre micro mythologie -celle de Scream 5 - et de ses deux héroïnes, les sœurs Carpenter, campées par Melissa Barrera et la déjà star Jenna Ortega. Elles sont tout simplement parfaites, et la nouvelle franchise Scream ferait bien de ne capitaliser que sur elles -et Ghostface, bien sûr- pour le futur. Ça tombe bien, on sait déjà qu’elles reviendront pour Scream 7.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A BEAUCOUP AIME
MON CRIME ★★★★☆
De François Ozon
Après 8 femmes et Potiche, voici de nouveau François Ozon aux commandes d’une comédie, tirée d’une pièce de théâtre, et portée par des personnages féminins aussi puissants que hauts en couleur. L’histoire, dans les années 30, de deux amies en galère, Pauline et Madeleine – l’une jeune actrice sans grand talent, l’autre avocate débutante – qui se retrouvent propulsées sous les feux des projecteurs quand la première s’accuse du meurtre d’un producteur puissant aux mains baladeuses et quand la seconde obtient son non- lieu dans un procès retentissant. Mais dont la gloire soudaine se révèle fragiles car la vraie coupable rode et va vouloir récupérer sa part du gâteau. Dans un geste savoureusement ludique, Ozon parle ici de condition féminine et de déboulonnage du patriarcat dominant en traçant des parallèles entre les années 30 et aujourd’hui mais sans verser dans le discours verbeux. Son ode malicieuse à la sororité permet à Rebecca Marder et Nadia Tereszkiewciz de confirmer qu’elles sont deux des plus passionnantes comédiennes de leur génération.
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A AIME
WOMEN TALKING ★★★☆☆
De Sarah Polley
Inspiré d’un roman de l’auteure canadienne Miriam Toews, qui elle-même se basait sur des une histoire vraie, le nouveau Sarah Polley joue à plein la carte de l’isolement. Isolement spatio-temporel, d’abord, puisqu’il est impossible dans les premiers instants d’avoir une idée précise de l’époque où les faits sont censés se dérouler. Un mystère entretenu sans lourdeur par la cinéaste qui entend donner une portée universelle au drame transposé aux Etats-Unis. Les viols à répétitions subis par les femmes de la communauté religieuse et la libération prochaine de certains agresseurs, les poussent à réagir. Elles se réunissent à l’écart, dans une grange, pour décider de leur sort. Partir ou rester ? Subir ou résister ? A la manière d’un film de procès, le scénario s’apparente à un exercice de rhétorique où chacune des protagonistes tente de se faire entendre renversant incessamment les débats. Sarah Polley croit suffisamment à l’inspiration de ses actrices et aux élans de sa mise en scène pour éviter la redondance et faire oublier le côté un peu scolaire de l’ensemble.
Thomas Baurez
Lire la critique en intégralitéCHRISTOPHE… DEFINITIVEMENT ★★★☆☆
De Dominique Gonzalez- Foerster et Ange Leccia
Christophe est parti un jour d’avril 2020, victime de cette saloperie de COVID. Ses disques, survivent évidemment à ce génie passé du yéyé à l’électro, sans se départir de sa classe folle et de sa belle bizarrerie. Mais comment se faire à cette idée que plus jamais on ne le verra sur scène dans ses concerts d’une beauté si singulière que chacun semblait un prototype éphémère ? Dominique Gonzalez-Foerster et Ange Leccia (plasticiens et vidéastes auxquels il avait appel lors de son retour sur scène en 2002) parviennent à combler ce vide avec leur documentaire. On y voit et entend le chanteur sur scène, dans les coulisses, au milieu de son appartement parisien façon caverne d’Ali Baba. Un film comme un puzzle, comme un collage visuel et sonore pour raconter au plus près et au plus juste l’ expérimentateur sans relâche qu’était Christophe, tordant ses chansons comme un sculpteur malaxant la glaise pour tendre vers le sublime.
Thierry Cheze
TENGO SUENOS ELECTRICOS ★★★☆☆
De Valentina Maurel
A chaque mois ou presque, son récit initiatique. Celui nous entraîne au Costa Rica avec comme héroïne une ado de 16 ans qui, alors que ses parents se séparent, choisit d’aller vivre chez son père, artiste bohème, semblant lui- même vivre une seconde adolescence. Un personnage passionnant car, derrière sa jovialité attachante, va vite poindre sa vraie nature, bien plus cassante et violente, que la cinéaste réussit à raconter sans jamais la montrer frontalement par des coups. Tout passe ici par des mots, des gestes, des mouvements du corps au fil d’un récit riche en ambiguïté où son héroïne va peu à peu prendre conscience non sans trouble qu’elle a hérité de cette rage. Ce premier long traduit avec une grande finesse toute l’ambivalence de la puberté, ces moments où plus que jamais les certitudes volent en éclat et permettent d’ouvrir une page blanche aussi excitante que flippante.
Thierry Cheze
COMME UNE ACTRICE ★★★☆☆
De Sébastien Bailly
Thierry Cheze
FEMME DE MERE EN FILLE ★★★☆☆
De Valérie Guillaudot
Trois générations. Trois femmes. Valérie Guillaudot est l’une d’elle, et nous offre un premier long métrage autobiographique lourd de sensibilité. Cette quête familiale, elle l’introduit par Marie, la grand-mère, enfermée par sa condition de femme dans un milieu catholique. Odile, la mère, en était à l’antipode. Une opposition qui l’amène à travailler, à entretenir une relation amoureuse avec Juliette. Cette liberté, cette aversion pour le domestique, elle les transmet à sa fille, Valérie, qui a longtemps envisagé la vie de famille comme une cage. Parsemé d’images d’archives, de discussions, de bribes mémorielles, Femme de mère en fille apporte sa pierre à l’édifice féministe en évoquant la friction entre maternité et épanouissement. Une ode aux femmes, par une femme, pour les femmes.
Lucie Chiquer
NAYOLA ★★★☆☆
De José Miguel Ribeiro
Drôle de film que cette odyssée chamanique animée en Angola, qui fait le grand écart entre deux époques, 1995 et 2011, en suivant les trajectoires violentes de deux jeunes femmes -la première plongée dans les dernières années de la terrible guerre civile angolaise, la seconde luttant contre le pouvoir à l'aide du rap. Nayola est très joliment animé par le portugais José-Miguel Ribeiro (dont on n'a vu pour l'instant que quelques courts-métrages, notamment dans l'anthologie La Petite fabrique du monde en 2013), à la façon d'un livre de contes pour enfants, ce qui contraste fortement avec la dureté sourde de certaines scènes. C'est évidemment l'idée forte de ce long, dont le réalisme magique (les fantômes supposément ancestraux convoqués) est parfois un peu trop attendu. Drôle de film, oui, mais qui reste bien en tête.
Sylvestre Picard
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoPREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME
THE WHALE ★★☆☆☆
De Darren Aronofsky
Peut-on voir The Whale autrement que comme le mélo bouleversant à Oscars qu'il affirme être ? Pas vraiment. Voilà donc un acteur livrant une performance labélisée définitive dans un huis clos littéraire et larmoyant, adapté d'une pièce de théâtre racontant le crépuscule d'un prof de lettre obèse se tuant à coups de junk food dans son appart... et le problème, c'est que tout ce petit bricolage, censé être authentiquement chialant, se voit autant que la « fat suit » portée par notre Brendan Fraser adoré. Bien sûr, il n'y a rien à redire sur sa performance qui surclasse un film, vaincu par son écartèlement entre son aspect hyper académique et ses visions morbides bien typiques d'Aronofsky qui semble avoir désormais bien du mal à porter à l'écran tout son mojo de cinéma qui l'anime.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéEN TOUTE LIBERTE- UNE RADIO POUR LA PAIX ★★☆☆☆
De Xavier de Lauzanne
Deuxième volet d’une trilogie documentaire consacrée à « La vie après Daech » après 9 jours à Raqqa, En toute liberté plonge dans le quotidien d’une troupe de journalistes radio de différentes confessions religieuses, au cœur de territoires anciennement dominés par l’État Islamique dans le Kurdistan irakien. Si les témoignages se révèlent touchants, Xavier de Lauzanne choisit de les traiter au cas par cas, dans un cadre scolaire surplombé par une voix-off superflue. En résulte un récit peu édifiant, tenant le spectateur trop éloigné du quotidien de ces héros de l’information. Les images impressionnantes des ruines de Mossoul réussissent toutefois à émouvoir, tant les récits de ses habitants filmés en (très) gros plans traduisent la violence d’un conflit toujours trop peu connu en France.
Yohan Haddad
TOI NON PLUS TU N’AS RIEN VU ★★☆☆☆
De Béatrice Pollet
C’est un sujet tabou qu’explore Béatrice Pollet (Le Jour de la grenouille) dans son deuxième long. Le déni de grossesse qui a conduit, après son accouchement soudain, son héroïne - une avocate, bien dans sa vie - à abandonner son nouveau- né sur un container. L’enfant sera sauvé mais la maman malgré elle accusée de tentative d’homicide et défendue par sa meilleure amie. La réalisatrice évite le piège du film à sujet par son écriture en profondeur du personnage principal et de l’exploration des racines – multiples et complexes – de ce geste que personne autour d’elle ne comprend. Elle se révèle moins à l’aise dans sa gestion des personnage secondaires comme dans la mise en scène du procès qui pâtit bien malgré elle de la comparaison inévitable avec Saint- Omer. Mais ce film a un atout majeur qui éteint quelques- uns de ces regrets : Maud Wyler (Perdrix) impressionnante de bout en bout.
Thierry Cheze
MUSIC ★★☆☆☆
De Angela Schanelec
Chouchoute des festivals, l’allemande Angela Schanelec (déjà Ours d’argent de la réalisation en 2019 pour J’étais à la maison… mais) a vu sa collection de trophées s’agrandir avec le prix du scénario, glané par Music lors du dernier festival de Berlin. Une récompense étonnante tant si le film a des qualités indéniable de mise en scène, puissante, précise, avec un dépouillement qui évoque l’œuvre de Bresson, cette variation autour du mythe d’Œdipe se complait dans un récit elliptique. Avec une obsession pour l’abscons qui finit par jouer contre le récit tant on peine à s’attacher à son héros, jeune garçon abandonné à sa naissance par une nuit de tempête dans les montagnes et incarcéré adulte, suite à un drame, dans une prison où une surveillante prendra soin de lui alors qu’il perd peu à peu la vue. Pur film de festival, savourant sa distance avec le commun des spectateurs, Music épate autant qu’il agace.
Thierry Cheze
EN PLEIN FEU ★★☆☆☆
De Quentin Reynaud
Le deuxième long en solo de Quentin Reynaud (après l’excellent 5ème set sur le monde du tennis) porte bien son nom. Car c’est au cœur d’un feu géant ravageant les Landes que sa caméra nous entraîne. Une ambiance aussi étouffante que fascinante que le cinéaste sait parfaitement traduire à l’écran avec son chef op’ Vincent Mathias (Au revoir là). Il y a là matière à un film apocalyptique presque sans parole. Mais plutôt que de faire de ce brasier le personnage central de son récit, le cinéaste n’a choisi de l’envisager que comme le moyen d’explorer un événement traumatisant vécu par son héros (qu’on ne vous spoilera pas) et de raconter le sentiment de culpabilité qui ne le quitte plus depuis. Cette partie qui devient centrale martèle trop les choses de façon scolaire et lacrymale pour susciter l’émotion pure qu’elle ambitionne de faire naître et finit par abimer le film dans son ensemble
Thierry Cheze
ET L’AMOUR DANS TOUT CA ? ★★☆☆☆
De Shekhar Kapur
Dans une banlieue chic du Royaume-Uni, Zoe, une documentariste trentenaire en mal d’amour, filme son ami d’enfance et voisin, Kaz, un grand barbu mou et raisonnable, qui a opté pour un mariage arrangé (« un Tinder 3.0 », dit-il) avec une jeune Pakistanaise. Rien de nouveau ici sous le soleil. Et l’amour dans tout ça est une pure comédie romantique, avec tous ses archétypes vus et revus, sa musique (trop) mielleuse et sa gravité feinte. Force est cependant de reconnaître la part attendrissante du nouveau Shekhar Kapur (Elizabeth), avec ses acteurs ensoleillés (Lily James en première ligne), ses élans amoureux lascifs, ses mots dans l’ère du temps, sa gentillette et naïve morale (Kapur semble dire que l’amour ne se force pas, ne s’explique pas, ne se dessine pas même). Certes banal (passion VS pragmatisme ?), mais plutôt efficace.
Estelle Aubin
PREMIÈRE N’A PAS AIME
SEULE : LES DOSSIERS SILVERCLOUD ★☆☆☆☆
De Jérôme Dassier
Une ex-agent du renseignement (Asia Argento), retirée dans un chalet en Suisse est brutalement mise sous pression. Seule est le genre de film où les personnages passent leur temps devant des ordis à faire semblant de tapoter des noms de code compliqués. Outre la ringardise des effets, on n’est jamais pris par cette histoire et ce d’autant moins que la mise en scène peinant à se montrer à la hauteur des enjeux.
Thomas Baurez
Et aussi
En marche vers l’effondrement !, de Alessandro Di Giuseppe et Adrien Juncker
Mary Cassatt : peindre la femme moderne, de Alessandro Di Giuseppe et Adrien Juncker
Les Orphelins de Sankara, de Ali Ray
Paysans du ciel à la terre, de Hervé Payen
Reprises
The Host, de Bong Joon- ho
Commentaires