La DVDthèque de Camille Chamoux

La grande révélation comique de l?année nous parle des cinq films qui ont forgé sa cinéphilie et inspiré l?esprit des Gazelles (en DVD et Blu-ray chez Orange le 19 août).François Grelet

Sérénade à trois d'Ernst Lubitsch

« Un film qui date de 1933 et pourtant plus moderne que la plupart des comédies actuelles. Ce qui m?a frappée en le découvrant, c?est le jeu naturel des acteurs et leur énergie dingue. Plus je le revois, plus je suis sidérée par son côté cul et trash, même à notre époque. Les films qui mettent en scène des triangles amoureux sont souvent très puritains dans leur vision du sexe, alors que là au moins, c?est clair : la fille nique avec tout le monde. C?est une figure de femme d?une liberté délirante qui a eu une influence majeure sur Les Gazelles. »

Quand Harry rencontre Sally

« C?est le long métrage que j?ai le plus vu dans ma vie. D?abord parce que c?est un modèle d?écriture comique, mais également parce qu?il s?autorise des embardées poétiques absolument géniales, comme les interviews bouleversantes de ces vieux couples qui viennent ponctuer le film. Dans Les Gazelles, il y a aussi ce rôle de vieille dame qui apparaît comme un fil rouge. C?est Mona Achache, la réalisatrice, qui en a eu l?idée à huit jours de la fin du tournage. C?est le signe d?une sensibilité commune entre nous. »

Zelig de Woody Allen

« J?aime quand Woody vise un truc un peu expérimental comme ici ou comme dans Harry dans tous ses états. Je suis un peu moins fan de sa veine classique, celle de Manhattan ou d?Annie Hall. Quand il s?autorise à partir en sucette, ça donne souvent de vraies merveilles. Dans Zelig, il passe en un éclair du burlesque à la pure mélancolie. Cette notion du décrochage poétique à l?intérieur même de la comédie m?obsède. Le genre finit en effet par se brider à force de s?interroger sur le ton. Woody, lui, s?en fout. Il s?autorise tout. »

La liste de Schindler de Steven Spielberg

« Mon plus gros choc. Je l?ai vu ado et j?ai cru que je ne m?en remettrai jamais. Je n?arrivais plus à marcher en sortant de la salle. Tellement douloureux que je n?ai jamais osé le revoir... J?ai un rapport parfois compliqué au cinéma, ça peut vraiment me plonger dans des états de déréalisation flippants. Les Lois de l?attraction m?a aussi fait ce genre d?effet. Il faut dire qu?à l?époque, j?éprouvais la même sensation de vide intérieur que les personnages. J?ai été si secouée après que j?ai arrêté d?aller au cinéma pendant quatre ans. »

Melancholia de Lars Von Trier

« Je ne sais pas quoi penser de ce cinéaste. Dancer in the Dark ou Antichrist comptent parmi les films que je hais le plus au monde, ça me fait vomir. Mais von Trier peut accoucher de choses sublimes comme Melancholia. C?est peut-être le plus beau film jamais fait sur la dépression, débarrassé de la perversité du regard qui peut me dégoûter chez ce metteur en scène. Plastiquement, c?est inoubliable, plein d?images indélébiles. Pourtant, je reste incapable de dire si ce mec est un génie ou un sale con. »