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À Hardborough, à la fin des années 1950, Florence Green, une veuve de guerre, ouvre, non sans peine, une librairie dans la plus vieille demeure de la bourgade. Les notables n’apprécient guère le vent de nouveauté qu’elle fait souffler. C’est cependant la mise en vente du Lolita de Nabokov qui les fera définitivement sortir de leurs gonds. Mais tout doucement, sous cape. Car le film d’Isabel Coixet, adapté du roman de Penelope Fitzgerald, préfère jouer sa partition en sourdine. Il privilégie les sous-entendus, les non-dits et les sourires éteints. Pas grand-chose ne se passe dans cette ville, et non plus dans ce film. Et pourtant. Sous la surface bouillonne une vraie force mélancolique. Le film s’enivre de la poésie du « tout ce qui n’aura jamais lieu », qu’il s’agisse ici d’un amour disparu, d’un destin impossible ou encore d’une vocation refrénée. The Bookshopvaut pour son ambiance de bord de mer du Nord de l’Angleterre, à la fois froide, émouvante et corrosive, comme la société qu’il décrit, celle de l’après-guerre, traumatisée, entre tradition bien ancrée et volonté de changement frémissante, coincée dans un statu quo morne où la manipulation l’emporte sur la confrontation. Mais c’est aussi une ode à l’amour de la lecture et à la capacité des livres à anticiper la marche du monde, comme le Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, célébré dans le film, et préfigurant la fin de manière inattendue.