Fluctuat
Dernier avatar d'une production française en quête d'identité, Largo Winch se la joue adaptation luxueuse, grand format, Hollywood like. Une fois encore, l'habit ne fait pas le moine et on aura du mal à sauver quelque chose de ce petit naufrage.- France/Hollywood : histoires d'un malentendu Par souci d'honnêteté, on avoue : Largo Winch connaît pas, jamais lu, pas trop envie non plus. Dans le doute donc, on ne jugera pas du travail d'adaptation, un critère généralement peu utile pour évaluer une oeuvre. Libéré de ces problèmes d'exégète, jugeons sur pièces l'objet film échoué entre les mains de Jérôme Salle, qu'on avait laissé sur Anthony Zimmer où, modeste et ambitieux, il se prenait pour Hitchcock. Notre homme a pris depuis du gallon auprès des producteurs qui n'ont pas hésité à sortir le chéquier, 24 millions d'euros, soyons précis. Et Largo Winch est bien un thriller financier, il sent le pognon de partout, l'image dégoulinant de volonté affichée de montrer l'argent sur l'écran : opulence des lieux, cascades en tous genres, Scope rutilant, tout est fait pour donner l'illusion d'assister à un bidule d'envergure hollywoodienne respectant, on imagine, l'univers cosmopolite de la BD. Il faut avouer qu'au début on a plutôt envie d'y croire, les décors, l'ambiance, les prémisses de l'intrigue, suggèrent un film qui en a sous le capot. On retrouve un ton propre à certaines BD franco-belges, un style entre réalisme et imaginaire, prenant pied dans des cadres réels revisités par une couche artificielle d'exotisme. De là à rêver d'un James Bond boursicoteur made in France, ce serait un peu exagéré, mais pendant cinq minutes on se dit : et pourquoi pas ?Mais non. Très vite, on comprend que Largo Winch aura beau jouer la carte de l'image léchée, rien ne rattrapera son côté petit bras. Une baston, prolongée d'une poursuite à moto, rappelle que l'action n'est décidément pas notre rayon. Salle met pourtant le paquet, mais à l'écran c'est plutôt zéro intensité et beaucoup de recyclage aux effets chic et toc. Côté castagne, on notera l'influence de Jason Bourne, l'absence de chorégraphie solide (alors qu'une partie du film est tourné à Hong Kong), quand ce n'est pas simplement incompréhensible, comme durant le final où il manque des plans. Pour structurer tout ça, un scénario qui se la joue Largo Begins, avec flash back intempestifs sur la bio tumultueuse du personnage, son passé, et son père archi milliardaire dont il a hérité de la multinationale - c'est le noeud de l'intrigue, il doit prouver aux actionnaires qu'il est l'héritier du padre tout en déjouant une conspiration et un plan de rachat. Plutôt mal construit, le film ne décolle jamais, parasité par trop d'allers-retours identitaires qui écrasent le suspens et peinent à imposer le personnage. Et si certains seconds rôles, la plupart étrangers, se détachent, le casting français tire le film vers le bas (Mélanie Thierry en femme fatale, c'est juste pas possible). Tomer Sisley a l'allure et le physique, mais pas le talent. Puis bon, Largo Winch en pleine crise financière, ça fait un peu tâche.Largo WinchDe Jérôme SalleAvec Tomer Sisley, Mélanie Thierry, Kristin Scott ThomasSortie en salles le 17 décembre 2008Illus. © Wild Bunch Distribution - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils adaptation, film policier sur le blog cinéma- France/Hollywood : histoire d'un malentendu