Première
par Thierry Chèze
Certes Frances Mc Dormand n'a pas volé son Oscar pour Nomadland et nul ne criera à l'injustice de l'avoir vu récompensée pour la troisième fois. Mais quel dommage que les votants soient passés à côté d'Andra Day ! Une apparition dans tous les sens du terme tant sa composition pour son premier grand rôle sur grand écran va au- delà du sans faute. Andra Day ne joue pas Billie Holiday. Elle est Billie Holiday sans pour autant jamais totalement disparaître derrière elle. A mille lieux des imitations qui peuplent les biopics, elle trouve un chemin à elle et rien qu'à elle pour exprimer Billie Holiday, la chanteuse éblouissante comme la femme tourmentée, dans toutes ses forces et toutes ses failles.
Derrière la caméra, Lee Daniels a, lui, eu la belle idée, de ne pas raconter la chanteuse de A à Z mais de se concentrer sur un pan de son existence quand, dans les années 40, après le scandale provoqué par sa chanson Strange fruit , elle est la cible du Département Fédéral des stupéfiants via une opération d'infiltration dirigée par un agent fédéral noir dont elle va tomber amoureuse. Parfait complément à l'excellent documentaire de James Erskine, Billie, cette fiction joue ouvertement avec la réalité (la love story avec l'agent infiltré n'est que spéculation) et la réalisation riche en effets de Lee Daniels épouse à merveille avec ce mélange des genres... même si sa tendance à en faire toujours un peu trop peut finir par desservir le propos. Tout en rendant l’interprétation justement dépouillé de tout artifice d'Andra Day encore plus renversante.