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Brillante Mendoza nous a habitués à son style documentaire rugueux au service de polars empreints de réalisme social. Récemment, ces derniers semblent particulièrement inspirés par la sanglante lutte contre la drogue livrée par les autorités philippines. En 2016, Ma’ Rosa – qui a valu à Jaclyn Jose un prix d’interprétation à Cannes – montrait une mère de famille forcée de trafiquer de la méth pour survivre. L’an dernier, sa série Amo racontait la descente aux enfers d’un ado. Beaucoup y ont vu un écho à la politique du président Rodrigo Duterte qui prône une lutte sans merci contre la drogue, quitte à justifier le meurtre de dealers et de consommateurs. Alpha, the Right to Kill surfe sur la même thématique et tente de remettre les pendules à l’heure : non, Mendoza ne soutient pas les interventions musclées des forces de l’ordre. On y suit un policier participant à un vaste coup de filet contre un baron de la drogue et son indic, petit dealer qui tente de survivre dans un bidonville de Manille. Le style est là, vif, nerveux. La caméra (à l’épaule) de Mendoza se faufile dans les ruelles, monte sur les toits, descend dans les recoins cachés. Aucun doute, ce cinéaste sait comme personne nous embarquer avec lui. Dommage qu’il n’ait pas apporté le même soin à l’écriture de son récit. En dressant un parallèle entre le policier corrompu et le jeune délinquant, Mendoza se fait moraliste : « Voyez les dégâts du trafic sur deux pères de famille de bonne volonté. » Et on finit par gentiment s’ennuyer, sentiment auquel ce cinéaste clivant ne nous avait pas habitués...