Le préquel de Game of Thrones est un peu trop bavard pour son propre bien, mais sa vision de l'univers de Westeros est très prometteuse.
Difficile de lancer le premier épisode de House of the Dragon sans réveiller quelques mauvais souvenirs : trois années de silence n'auront pas suffi pour nous remettre pleinement de l'ultime saison de Game of Thrones, qui avait méthodiquement détruit à peu près tout ce qu'on aimait de la série. Son préquel débarque donc avec un déficit de sympathie totalement injuste, mais solidement ancré. Nous sommes environ 200 ans avant la naissance de Daenerys Targaryen, et pourtant le royaume de Westeros ne manque pas de dragons. La Maison Targaryen est au pouvoir depuis des siècles et s'y maintient grâce à ces énormes bestioles cracheuses de feu, alors que le roi Viserys (Paddy Considine), monarque gentiment ahuri, attend désespérément que sa femme lui donne un fils.
Forcé de prendre les devants, il nomme son unique fille Rhaenyra (Milly Alcock puis Emma D'Arcy) comme successeur. De son côté, le frère du roi, le prince Daemon (Matt Smith), estime qu'en tant que seul autre homme de la lignée, il devrait à terme hériter du Trône de fer... Et les choses se compliquent un peu plus quand Viserys décide de se remarier pour consolider sa position : il épouse Lady Alicent Hightower (Emily Carey puis Olivia Cooke), amie de Rhaenyra, qu'il met enceinte.
Matt Smith flamboyant
Moins ésotérique que Game of Thrones, House of the Dragon fonce bille en tête dans des intrigues de cour légèrement labyrinthiques, et complexifiées par de nombreux sauts dans le temps. Les six premiers épisodes que nous avons pu voir couvrent ainsi une dizaine d'années, certains personnages changeant d'interprètes pour s'adapter à leur vieillissement. Le dispositif peut paraître étonnant, mais la série semble vouloir foncer le plus vite possible vers sa véritable raison d'être : la Danse des dragons, une guerre civile de succession entre deux branches rivales de la Maison Targaryen, décrite par G.R.R. Martin avec le roman Feu et sang. Il faudra s'armer de patience, les premières heures sont denses et bavardes, et entièrement centrées sur quelques protagonistes. Au point de transformer des personnages secondaires pourtant prometteurs (Otto Hightower, joué par Rhys Ifans, et Corlys Velaryon, incarné par Steve Toussaint) en simple figurants.
Dans cet espace narratif à la fois temporellement vertigineux et physiquement réduit au minimum - à l'exception de scènes de dragons et de bastons sanglantes, tout se déroule à peu près à Port-Réal -, Matt Smith est celui qui tire le mieux son épingle du jeu, donnant vie assez magistralement à ce prince dégénéré aux cheveux blonds/blancs, qui partage sa vie entre les champs de bataille et les bordels (malgré quelques sérieux problèmes d'érection). Un peu moins flamboyant, le reste du casting ne démérite cependant pas.
Qui seront les personnages de House of the Dragon ?Drama familial
Visuellement, le show a de la gueule quand le scénario laisse aux réalisateurs la capacité de s'exprimer, et arrivé à l'épisode 6 - oui, il faut vraiment être patient -, House of the Dragon semble avoir réglé la plupart de ses problèmes de rythme. Pour autant, si tout le folklore de Game of Thrones est bien présent (un peu d'inceste, du gore, du sexe à outrance et des têtes qui roulent), il lui manque encore le souffle épique de la série-mère, avec ses mystères insolubles (les Marcheurs blancs !) et son sens de l'aventure XXL. Difficile cependant de lui en vouloir : si tout l'objet de GOT était de proposer une réponse au Seigneur des anneaux et de dépoussiérer la fantasy, House of the Dragon semble plutôt viser le drama familial à l'échelle des Sept Couronnes. Angle pas inintéressant dans ce contexte, qui ne fonctionne pour le moment que par bribes, mais dont on perçoit régulièrement tout le potentiel.
House of the Dragon, dix épisodes (un par semaine), à voir à partir du 22 août sur OCS.
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