Adèle, Léa, tout le monde reconnaît que vos scènes de sexe sont vraiment balèzes. Est-ce que vous avez eu la trouille ?Adèle Exarchopoulos : Personnellement, je voulais tellement ce film que je n’avais pas peur. Ni avant, ni pendant. J’avais envie de ce projet. J’ai été mal à l’aise, gênée, mais je n’ai pas eu peur. Je me souviens des premières fois où on a joué ces scènes de sexe. On était prises de fou rire, embarrassées. Parce qu’on ne va jamais aussi loin dans les films normalement.Et, là, au moment des projections publiques ?Léa Seydoux : Là, c’est différent… Quand on a vu le film mercredi en public, quand on a découvert les scènes de sexe sur grand écran, on a été… choquées. On les a pourtant tournées. Mais, j'avoue, c’était gênant.A.E : Ouais. C’était… bestial ! Il y a un truc électrique, un abandon… c’est chaud franchement !Ca veut dire quoi ? Que vous ne saviez pas que ce serait à ce point là…A.E : Tu laisses parler ton corps. Tu joues. Et tu joues pour que ça ait l’air vrai. C’est marrant, depuis ce matin, tout le monde se pose la question et personne n’ose la formuler.Quelle question ?A.E : Ben je sais ce que tu te demandes : "est-ce qu’on a vraiment couché ensemble ?"Et ? A.E : Et bien non.Alors pardon d’insister, mais comment fait-on à ce point semblant ?A.E : Il y a un juste milieu. Il faut laisser parler son corps et trouver l’harmonie avec sa partenaire. Notre chance, c’est qu’Abdel nous laissait libres. Il ne fait pas de chorégraphies. Il ne nous disait pas « mets ta main là, mets ta main ici »… On se rendait bien compte que c’était intense, que ça allait loin, très loin même. Mais alors, là, dans ce que j’ai vu, c'est immense.Vous avez l’air de découvrir le film…A.E : C’est le cas. On vient de voir le film un an après l’avoir tourné, c’est complètement différent. Déjà, quand tu as fait 700 heures de rush, tu ne sais pas ce que le cinéaste va garder. Je ne savais pas que la scène de cul allait durer 7 minutes, qu’il n’y aurait pas de musique. Là, il n’y a que nos respirations et le claquement de nos mains sur nos fesses.Qu’est-ce qui est plus facile : jouer une scène homos ou hétéros ?L.S : Avec une femme sans hésitation. Et Adèle a rendu les choses encore plus simple. Elle a un rapport très libre avec son corps. On avait les mêmes peurs, les mêmes appréhensions et c’était plus facile d’échanger nos impressions, nos appréhensions.Comment vous vous êtes préparées ?L.S : Abdel ne prépare pas vraiment. Il cherche à garder l’instinct du jeu. Il m’a demandé d’apprendre à peindre, de faire du sport, il ne me trouvait pas assez musclée… Mais il veut d’abord nous mettre dans des « états »A.E : Il ne nous a pas préparées, mais il nous a mises en confiance. Il y avait une sorte d’emprise, d’affection énorme. On avait du coup envie de tout lui donner…. Il a surtout cherché à construire notre relation, d'établir un truc juste entre nous. Au début, il nous trouvait un peu trop éloignées. On s’est rapprochées, vite (rires).Vous savez pourquoi il vous a choisies ?A.E : Moi c’est la bouche. Il m’a dit qu’il m’avait choisie à cause de ma bouche et de ma façon de manger. Au début, il me jaugeait vachement. Il me regardait manger, on a pris des verres ensemble et il me parlait tout en m'observant… Il cherchait quel genre de fille j’étais et ce que je pourrais apporter au rôle.J’entends beaucoup de journalistes parler du message du film...A.E : Pour moi, c’est juste une belle histoire d’amour. Maintenant, si les gens y voient autre chose et que ça peut faire bouger les choses… on va pas se plaindre.Propos recueillis par Gaël GolhenReview : La Vie d'Adèle est un chef d'oeuvre