Ryuichi Sakamoto
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Le musicien japonais était également l’un des pionniers de la musique électronique.

Les premières notes de Merry Christmas, Mr. Lawrence ! sont tellement implantées dans l’histoire du cinéma qu’on en oublierait presque d’où vient ce morceau d’aspect féérique, presque irréel. En 1983, Nagisa Ōshima met en scène David Bowie et Ryūichi Sakamoto dans Furyo, film de guerre à l’allure romantique devenu l’un des plus reconnus du genre. Derrière la bande-originale se cache Sakamoto lui-même, musicien japonais de légende décédé ce dimanche 2 avril à l’âge de 71 ans. Depuis 2015, l’artiste se battait contre un cancer oropharyngénal, qui, s’il le bloquait physiquement, n’a jamais entravé sa création musicale, avec un dernier album sorti en janvier dernier.

Si son travail résonne sur les territoires occidentaux à partir des années 1980, la carrière de Ryūichi Sakamoto démarre pourtant bien avant 1983. Dans les années 1970, il fait partie des instigateurs du mouvement électronique avec son groupe Yellow Magic Orchestra, révolutionnant le synth pop et parcourant différents genres allant de l’acid house jusqu’au hip-hop alors naissant. En 1978, il sort un premier album solo, Thousand Knives, qui continue d’explorer les sous-genres de la musique électronique en la mêlant au folklore musical japonais. Les décennies qui suivront lui permettront de devenir l’un des artistes les plus respectés de son temps, inspirant aussi bien Iggy Pop qu’Afrika Bambaataa, qui le solliciteront dans leurs propres créations.


En 1983, sa rencontre avec Nagisa Ōshima change la donne : le cinéaste japonais lui propose le second rôle de son film de guerre Furyo, sa première apparition au cinéma, aux côtés de Takeshi Kitano, Tom Conti et David Bowie, réunissant deux rock-stars dans une confrontation inoubliable, où le soldat japonais incarné par Sakamoto va tomber sous le charme irrésistible de l’anglais blond peroxydé incarné par Bowie. Avec en point d’orgue une séquence où Bowie use de son charme pour déstabiliser celui qui le retient prisonnier. Inoubliable, tant les années 1980 sont retenues dans un moment d’une sensibilité immuable, consacrant deux musiciens de renom en icônes d'un cinéma nippon réinventé. La bande-originale de Sakamoto pour le film reste aujourd’hui sa plus reconnaissable, avec le thème principal Merry Christmas, Mr. Lawrence ! régulièrement repris, interpolé, imité et samplé, jusqu’à aujourd’hui avec le groupe de rap PNL qui reprend la célèbre mélodie sur l’un de leur morceau.


La carrière de Ryūichi Sakamoto en tant que compositeur de musiques de films s’est par la suite étoffée, composant des bandes-originales pour Pedro Almodovar (Talons Aiguilles), Brian de Palma (Snake Eyes, Femme Fatale), Alejandro González Iñárritu (The Revenant), ou encore Alice Winocour (Proxima). Sa rencontre avec Bernardo Bertolucci sur Le Dernier Empereur, dans lequel il interprète également un petit rôle, lui permettra de remporter l’Oscar de la meilleure musique en 1987, la seule nomination de sa carrière.

Depuis les années 1990 jusqu’à aujourd’hui, Ryūichi Sakamoto a continué d’expérimenter les genres dans son travail. Au final, c’est pas moins de 23 albums solo que l’artiste réalise en 45 ans de carrière, avec certaines mélodies restées aujourd’hui inoubliables tant elles portent l’empreinte d’un esthète musical unique en son genre. Afin de lui rendre hommage, terminons par l’évidence, pour célébrer à la fois l’héritage de Bowie, Ōshima et Sakamoto :

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