Cannes 2024 - jour 1
Abaca/DR

Tous les jours, le point à chaud en direct du 77e festival de Cannes.

La star du jour : Meryl Streep

Cannes 2024 est ouvert. Camille Cottin a introduit la soirée avec un joli texte sur la folie cannoise, avant de présenter le jury présidé par Greta Gerwig, accueillie par une interprétation de “Modern Love” de David Bowie (utilisée dans une scène culte de Frances Ha) par la chanteuse française Zaho de Sagazan. Mais, la vraie star de l’ouverture du 77e Festival de Cannes c’était bien la grande Meryl Streep. Elle a eu droit à un hommage très appuyé de Juliette Binoche, qui a fini en larmes en revisitant presque exhaustivement la filmographie de l’actrice aux trois Oscars - Raphaël Quenard était à deux doigts de "faire une Yannick". Streep lui a rendu la pareille en disant tout son amour pour La Passion de Dodin Bouffant, avec son délicieux accent mid atlantic, avant de recevoir sa Palme d’or d’honneur. C’était presque aussi long que le film d’ouverture de Dupieux, mais l’assistance du Grand Théâtre Lumière a tenu le coup. Courage, le Festival ne fait que commencer.


Le film du jour : Le Deuxième acte de Quentin Dupieux

Pour ouvrir Cannes, Dupieux a donc proposé sa Nuit américaine. Aux antipodes de celle de Truffaut donc puisque dominé par le cynisme et la misanthropie - enfin assumés comme jamais sous le vernis de la coolitude - qui traverse son cinéma. Et si on y retrouve tous ses travers habituels (une incapacité à finir, la sensation que même avec une durée réduite, le récit traîne en longueurs…), il signe pourtant son film le plus intéressant depuis Au poste ! Parce qu’il ose pour la première fois des gestes vraiment kamikazes : ses allusions à #metoo qui devraient hérisser y compris certains de ses fans hardcore. Mais surtout parce qu’à côté de Raphaël Quenard, son héros de Yannick, à qui il a donné une partition ne lui permettant jamais de se renouveler, le trio Vincent Lindon-Léa Seydoux-Louis Garrel, qu’il dirige pour la première fois, fait merveille. En transformant des dialogues et des situations flirtant plus souvent qu’à leur tour avec les clichés éculés et réacs à souhait sur les acteurs forcément vaniteux, égocentriques et méprisants en bijoux de comédie, grâce à une maîtrise absolue de l’auto-dérision.

Cannes Jour 1 : Vincent Lindon, Léa Seydoux et Quentin Dupieux (Le Deuxième acte)
Abaca

Le mythe du jour : Napoléon vu par Abel Gance 

Le premier véritable acte du festival, c’était lui : la première époque du Napoléon vu par Abel Gance (son titre officiel), soit 3h40 de métrage restauré après des dizaines d’années d’attente. La vie de Bonaparte de l’école d’artillerie jusqu’au siège de Toulon (là où commençait le Napo de Ridley Scott), et la version la plus proche de celle de 9h présentée à sa sortie en 1927. Le résultat est assez dingo, par sa durée, son ampleur, ses passages affolants (la bataille finale dans la boue et son filtre rouge, la scène de la Marseillaise aux Cordeliers…) rattrapant largement des moments plus mous (normal sur une telle durée, finalement un brin plus longue que Babylon). La restauration, effectuée dans des ateliers répartis sur toute la planète, est absolument nickel (c’en est même flippant : pas un saut de bobine ou une tache sur la pelloche…), et  accompagné d’une toute nouvelle partition on fire (le film s’achève sur la marche funèbre de Siegfried de Wagner). En passant, c’est aussi un film obsessionnel pour un certain Coppola (Francis). Bon, c’est quand la deuxième époque ? 

Napoléon vu par Abel Gance
La Cinémathèque française

L’espoir du jour : Mohammad Rasoulof 

Où est Mohammad Rasoulof ? Viendra-t-il à Cannes ? Condamné par son pays à cinq ans de prison et à des coups de fouet, le cinéaste a fui l’Iran et serait sur le chemin de la Croisette où il est en compétition pour la Palme avec le très attendu (et plus long film de la compét’ à 2h50) The Seed of the Sacred Fig. Dans un post Instagram, Rasoulof a dénoncé la “tyrannie religieuse" subie par les lraniens et annoncé son exil : "à partir d’aujourd’hui, je suis un résident de l’Iran culturel." De son côté, Thierry Frémaux a affirmé que tout était fait pour l’accueillir : "le ministère des Affaires étrangères nous aide pour assurer son cheminement, nous l'espérons, jusqu'à Cannes". The Seed of the Sacred Fig est projeté le 24 mai. D’ici là, tout est possible.

Mohammad Rasoulof
Abaca

Power of the Dog 

A Cannes, 2024 sera l’année du chien. Messi oblige. Avant que le border collie d’Anatomie d’une chute ne devienne le toutou préféré de l’internationale cinéphile, la Palme Dog (qui récompense la meilleure prestation d’un chien-acteur vue dans un film projeté sur la Croisette) était un sympathique prix alternatif, qui donnait un os à ronger aux plumitifs ciné avant l’annonce du vrai palmarès. Mais depuis que Messi a foulé le tapis rouge des Oscars, reçu les compliments et les caresses des plus grandes stars (Emma Stone en tête), le petit prix canin rigolo est en passe de devenir un sujet médiatique de premier plan.

Messi est d’ailleurs de retour cette année, il a monté les marches pour la cérémonie d’ouverture et s’apprête à réaliser des interviews pour France Télé, dans une pastille où il sera doublé par Raphaël Mezrahi (à sa place, on changerait d’agent). Pendant ce temps, les bookmakers cynophiles parient gros sur Le Procès du Chien et Black Dog, les deux films a priori les mieux placés dans la course. Mais attention : un cabot génial peut surgir à tout moment là où ne l’attend pas. Au cours des dix prochains jours, nos reporters auront donc les yeux grands ouverts et la truffe au vent pour vous tenir informés ici même des dernières tendances canines cannoises.

En attendant, Greta Gerwig raconte dans Libération que des films de chiens ont déjà été montrés hier soir à Cannes : “Ça a été merveilleux de rencontrer le reste du jury hier soir autour d’un dîner. On a fait connaissance en se montrant des vidéos de nos chiens, tout le monde adore les chiens dans ce jury, ça ne peut que bien se passer.” Les vidéos de toutous qui traînent dans les smartphones de Hirokazu Kore-eda et Juan Antonio Bayona sont-elles éligibles à la Palme Dog ? 

Aujourd'hui à Cannes :

Tout le monde n'attend que ça ici (en tout cas nous, chez Première, on est chauds comme une baraque à frites) : vroum vroum, Furiosa : une saga Mad Max va rouler sur la Croisette en fin de journée, en présence du seigneur George Miller et de ses acteurs Anya Taylor-Joy et Chris Hemsworth. Un tapis rouge qui s'annonce forcément explosif.

En début d'après-midi, la compétition officielle démarrera avec Diamant Brut d'Agathe Riedinger : l'histoire une jeune femme de 19 ans qui cherche désespérément à devenir quelqu'un et passe le casting d'une télé-réalité, Miracle Island. Alléchant.

L'autre star de la journée sera ENCORE Meryl Streep qui, après avoir reçu sa Palme d'or d'honneur, retracera sa carrière dans une masterclass très attendue (et évidemment pleine à craquer). Que voulez-vous, y a pas plus forte. Et sur le temps de midi, si le coeur vous en dit, Quentin Dupieux viendra avec son équipe discuter du Deuxième Acte. Evénement rare, car c’est le seul moment où le réalisateur parlera de son film en public.

Côté sélections parallèles, ne loupez surtout pas l'ouverture de La Semaine de la critique avec Les Fantômes de Jonathan Millet, et celle de La Quinzaine des cinéastes avec Ma vie, ma gueule de Sophie Fillières. L'Acid lancera quant à elle les hostilités avec Kyuka - Before Summer's End du Grec Kostis Charamountanis.