Le cinéaste allemand remet sa folie destructrice à l'oeuvre dans Independence Day Resurgence. Rencontre.
Si je vous dis que malgré des similarités évidentes, vous êtes l’opposé de Michael Bay, ça vous inspire quoi ?
L’opposé de Michael Bay ? C’est étonnant, on m’a pourtant souvent comparé à lui. Je le connais un peu mais c’est vrai que nous sommes très différents. J’essaie de faire passer un message dans mes films. Je crois que lui s’en moque un peu (rires) !
Et chez Bay, les personnages n’existent qu’à travers l’action, ce qui n’est pas le cas dans vos films.
Vous avez raison. C’est intéressant, parce que quand je sortais le premier Independence Day, Michael Bay était dans les salles avec The Rock - que j’adore - et on m’a rapporté qu’il disait qu’Independence Day était le genre films qu’il devrait faire (rires). Je ne crois pas qu’il ait vraiment pris cette direction.
Contrairement à lui, on a l’impression que vous aimez pirater vos films avec de petits détails, des messages un peu subversifs sur l’écologie, les luttes sociales…
C’est pas mal d’être un peu subversif, non ? J’y prends beaucoup de plaisir. On est là pour s’amuser, aucun problème, le cinéma est un spectacle avant tout. Mais ajouter un peu de sens ne fait pas de mal. Et je m’amuse comme un gamin à « pirater » mes films, comme vous dites. C’est parfois un peu puéril mais j’ai besoin de ça pour continuer à prendre du plaisir à travailler sur des projets aussi gros.
Independence Day Resurgence : la critique
Il y a des choses si bien cachées que personne ne s’en est rendu compte ?
Plein ! Il y a des tas de choses très bien planquées dont je ne parle jamais à personne, surtout pas aux studios (rires). C’est aussi une façon de marquer que je suis indépendant, que personne ne me possède. Je ne mords pas la main qui me nourrit, mais je la griffe gentiment ! N’insistez pas, je ne vous donnerai pas d’exemple.
Vous n’aviez jamais cédé aux sirènes des suites. Pourquoi avoir fait exception avec Independence Day ?
J’ai toujours été contre les suites par principe. Là, j’ai senti qu’on pouvait faire quelque chose de différent, tout en gardant le même feeling. C’est d’ailleurs une continuation plus qu’une suite. Aujourd’hui, les studios ne vous donnent de l’argent que s’il y a la possibilité d’installer une franchise. Ce que je comprends très bien. Donc on a ouvert l’univers, on en apprend plus sur ce qui existe au fin fond de l’espace. Peut-être que je réaliserai d’autres suites, je n’y suis pas opposé si les idées sont bonnes. Ils m’ont déjà demandé en fait, mais je n’ai pas encore pris de décision. Ça porte la poisse de s’engager sur la suite avant même que le film ne soit sorti !
D’où vous vient cette fascination pour la destruction à grand échelle ?
J’ai toujours voulu faire de gros films, avec de nombreux effets spéciaux. Et pour faire ça à Hollywood, on n’a finalement pas beaucoup le choix. Je n’aime pas les films de super-héros, je ne les comprends pas et je n’ai pas grandi en lisant des comics. Et puis j’ai fait Independence Day, un film d’invasion alien avec de très grosses scènes de destruction. J’ai créé un nouveau genre en quelque sorte, une marque de fabrique. Ce sont les films que j’aime et Hollywood a immédiatement adhéré, car ils gagnent beaucoup d’argent avec. Je fais ce que je veux en fait, ils ne mettent pas de pression. C’est très plaisant d’avoir une certaine liberté. J’essaie de créer quelque chose de différent à chaque fois mais les thèmes reviennent. Il y a sûrement chez moi une forme de peur de la fin du monde. Je fais une thérapie de choc avec mes films (rires).
Tourner une grosse scène de destruction, c’est le summum pour vous ?
Je m’amuse plus avec les acteurs. Les grosses scènes, c’est assez ennuyeux en fait. C’est génial de les imaginer et les préparer, mais c’est incroyablement difficile de leur donner vie. À l’heure où je vous parle (NDLR : en mars dernier), les effets spéciaux d’Independence Day Résurgence sont terminés à 8 ou 9 %, et il nous reste en gros deux mois pour les finir ! C’est assez fou.
On vous avait critiqué pour le côté américano-américain du premier ID. Resurgence est beaucoup plus global…
Oui… Beaucoup de scènes se passent aux États-Unis mais c’est sûrement plus global, comme vous dites. La mécanique est aussi différente parce que cette fois les gens s’attendent à une nouvelle attaque, ils s’y sont préparés. Il était important d’ajouter un peu d’imprévisible, sinon ce serait ennuyeux. J’aime bien tromper le public et jouer sur ses attentes.
Un truc qu’on n’attendait pas chez vous, c’est Charlotte Gainsbourg !
Je suis fan d’elle ! Je fonctionne ainsi : je prends des acteurs dont je suis fan. J’ai eu beaucoup de chance qu’elle accepte. Gamin, j’étais fou de son père et de sa mère. J’écoutais leur musique quand je venais dans le sud de la France. J’ai trouvé Charlotte fascinante dans plusieurs films et j’ai eu un bol fou : on a le même avocat qui est l’un de ses amis. Il lui a expliqué qui j’étais et elle a dit oui. Vous savez ce qui m’a surpris chez elle ? Sa timidité. C’est vraiment étonnant de la part d’une artiste de ce calibre.
Le thème de Résurgence est l’union entre les peuples. Vous pensez qu’il nous faudrait une bonne grosse guerre contre les aliens pour unir les êtres humains ?
L’unité, c’est exactement ce qui nous manque. Parfois je me dis qu’on aurait besoin d’une menace alien pour qu’on réussisse à s’entendre. C’est un peu triste. J’aime cette idée que tout le monde marche main dans la main, sans frontières. C’est un peu le message du film : la beauté des êtres humains enfin unis.
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