Wes Anderson sera l'invité d'honneur du Festival d'Annecy
ABACA

Le cinéaste texan a donné une masterclass dans le cadre de son exposition inédite à la Cinémathèque française. L’occasion de revenir plus en détail sur Asteroid City, son dernier long métrage…

La semaine dernière, la Cinémathèque lançait son exposition consacrée au monde extravagant de Wes Anderson. Disponible jusqu’au 27 juillet, elle s’accompagne notamment d'une rétrospective et d’autres évènements à découvrir sur le site officiel. C’est la projection d’Asteroid City, suivie d’une masterclass d’une heure avec ce maître de la symétrie et des couleurs, qui a démarré cette nouvelle édition. Tout comme pour James Cameron l’année dernière, on y est allé pour vous ! 

L’écran de la salle de cinéma de l’institution française - remplie à bloc pour l’occasion - s’est élargi pour laisser place à Asteroid City, le dernier OVNI en date du cinéaste aux couleurs pastels et aux décors rétro. L’histoire prend place en 1955, dans une minuscule ville en plein désert situé au sud-ouest des États-Unis, où trône le cratère d’un astéroïde qui donne le nom du lieu. Comment résumer le film ? Des essais nucléaires, une convention de jeunes scientifiques passionnés, un alien qui débarque, une actrice à la Marilyn Monroe et un photographe en deuil, mais tout cela n’est qu’une pièce de théâtre… Au casting on retrouve Jason Schwartzman et Adrien Brody, fidèles collaborateurs du réalisateur, Scarlett Johansson, Tom Hanks, Maya Hawke ou encore Margot Robbie

Ce film à double niveau dialogue avec un bon nombre d'œuvres de Wes Anderson, comme le souligne justement Matthieu Orléan, co-commissaire de l’exposition et animateur de cette conférence qui nous a permis de mieux connaître les dessous de ce désert andersonien. Voici les cinq points qui nous ont marqués… 

Une leçon de cinéma by Wes Anderson
Lisa Gateau

1 - Wes Anderson a le théâtre ancré en lui

Tous les films de Wes Anderson ont un rapport - plus ou moins visible - avec le monde du théâtre. Dans Rushmore, le jeune Max Fischer, interprété par Jason Schwartzman, se met à faire du théâtre. Les décors de ses long et court métrages, souvent visibles et mobiles, font penser à un spectacle en train de se dérouler sous nos yeux. Dans Asteroid City, le clin d'œil est plus qu’évident, puisqu’une pièce est en train de se monter. À la question de Matthieu Orléan sur l’hommage au théâtre New Yorkais des années 50, le cinéaste à répondu : “Je ne sais pas si c’est un hommage, car c’est simplement une évidence”, avant de compléter : 

“Quand j’étais jeune, j’ai toujours voulu faire partie de ce monde du théâtre. J’écrivais même des pièces, ce que j’ai abandonné en grandissant. Je n’ai jamais pu y participer directement mais je me suis peut-être résigné au fait que ma version du théâtre se situe dans le cinéma.” 

Fun fact, Wes Anderson s’est dit impressionné de la vitesse à laquelle la traductrice retranscrivait sa parole : “Il me semble que le français prend plus de mots… mais vous êtes si rapide !” (Rires).  Le cinéaste dandy bien apprêté dans son ensemble marron avait l’envie d'interagir avec le public, et de glisser des petites blagues par-ci par-là… 

Asteroid City : Photo Hong Chau, Adrien Brody
Pop. 87 Productions LLC

2 - Wes Anderson est un “voleur” de costumes

Le monde du théâtre n’est pas la seule référence ou inspiration qu’on retrouve dans Asteroid City. Quand on regarde Scarlett Johansson dans le rôle d’une actrice célèbre, impossible de ne pas penser à Grace Kelly ou plus encore à Marilyn Monroe, et ce malgré ses cheveux bruns. Marilyn a d’ailleurs tourné dans un western qui se passe également dans le Nevada des années 50 : Les Désaxés de John Huston. Les robes des deux actrices sont aussi très similaires… À propos des costumes, le cinéaste affirme : “On parlait d’hommage mais dans ce cas c'est de l’emprunt direct, voire presque du vol !”. Pour lui, ces costumes déjà existants sont parfaits tels qu’ils sont et servent de repère temporel : “Pour évoquer une époque on peut soit réinterpréter, ou bien directement y aller”. 

En parlant de costume, Jason Schwartzman ne voulait pas quitter le sien pour rester dans le personnage d’Augie. “Il avait envie de vivre dans le film. Même quand il ne tournait pas, il était sur le plateau. Pour un cinéaste, c’est absolument génial”. Même avant d’avoir le scénario final, Wes Anderson savait qu’il voulait Jason Schwartzman au centre de son film. Il faut dire que leur toute première collaboration remonte à Rushmore (1998), alors que l’acteur n’avait que 18 ans. Si vous souhaitez les voir de près, l’exposition de la Cinémathèque expose de nombreux costumes originaux, dont une des robes de Scarlett Johansson.  

GALERIE
©2022 Pop. 87 Productions LLC/Courtesy of Pop. 87 Productions//Courtesy of Pop. 87 Productions/Focus Features

 3 - Wes Anderson s’essaie à la SF pour la première fois…mais à sa manière ! 

Asteroid City est un véritable melting pot de genres et de sujets. Wes Anderson confie d’ailleurs avec humour : “Je n’ai jamais été très bon à faire un film sur une seule chose, ni à ce que le film ne soit qu’une seule chose”. Mais pour la toute première fois, la science-fiction s’invite au sein de son univers avec cet alien qui débarque au beau milieu du film. Le motif des extraterrestres étant très présent dans l’imaginaire des années 50, l’idée d’en introduire un est donc rapidement apparu au cinéaste. 

Mais c’est un alien à la Wes Anderson, puisque ce dernier est réalisé en stop motion. Cette technique, que les cinéastes n’utilisent plus tellement au profit des effets spéciaux, fait aussi la patte du réalisateur qui l’utilise pour ces deux long métrages d’animation : Fantastic Mister Fox et L’île aux chiens. Pour réaliser cet alien plus drôle qu’effrayant, Wes Anderson fait encore une fois appel au génie d’Andy Gent. Mais l’extraterrestre est quand même joué par un acteur qui n’est nul d’autre que… Jeff Goldblum ! Le réalisateur utilise l’image de la boîte à outils : chaque film qu’il fait lui permet de la compléter. Il ne connaissait rien au stop motion quand il a voulu réaliser Fantastic Mister Fox. Désormais, c’est un outil qu’il a à sa disposition pour créer des moments un peu fous, comme l’arrivée d’un alien. 

4 -  Asteroid City n’est pas aussi américain qu’il en a l’air, tout comme son cinéaste 

Si dans la fiction la ville d’Asteroid City prend place aux Etats-Unis, son lieu de tournage est bien loin du continent américain. Wes Anderson nous a raconté son processus de recherche sur Google Maps, alors en pleine pandémie du Covid. Au départ, le réalisateur pensait trouver un paysage naturel dans son Texas natal avant de s’orienter vers l’Arizona et l’Utah. La vallée de la mort, située en Californie, a également fait partie de la liste des possibilités. Wes Anderson explique ses critères de sélection avec ironie : 

“Tu as besoin de ton désert mais aussi d’un endroit pour loger toute ton équipe, donc il faut trouver un hôtel quatre étoiles à côté de ton lieu de tournage... Il faut que ce soit assez sympa pour que les acteurs y vivent mais il ne faut pas non plus un hôtel cinq étoiles, car c’est trop cher (rires). Donc il faut trouver un hôtel quatre étoiles près du désert.” 

Plus il cherchait son désert, plus Wes Anderson peaufinait une idée précise de ce décor. Il allait donc falloir le construire de toute pièce, sur un terrain plat et vaste. Ce terrain, le réalisateur l’a trouvé en Europe, et plus précisément à Chinchón en Espagne. Il faut dire que Wes Anderson est lui-même très européen… Il vit depuis plusieurs années à Paris et on trouve plusieurs références au pays de la baguette dans ses films : Les Champs-Élysées de Joe Dassin clôture À bord du Darjeeling Limited, les ados de Moonrise Kingdom dansent sur du Françoise Hardy, on entend une reprise d’Aline de Christophe dans The French Dispatch, dont le tournage à eu lieu à Angoulême. “Je pense qu’il y a quelque chose de particulièrement français en moi” partage le cinéaste avec son audience ravie (et patriote).

AFFICHE
Universal Pictures

5 - Wes Anderson dévoile des indices sur son prochain film 

Lors du moment accordé aux questions du public, son prochain film s’est glissé parmi les interrogations. “Pouvez-vous nous en dire plus sur The Phoenician Scheme ?”, lance un des spectateurs. Wes Anderson y répond sans trop en dire : Benicio Del Toro sera au centre du film en tant qu’homme d'affaires. Il sera accompagné de Mia Threapleton dans le rôle de sa fille, ainsi que de Michael Cera. “C’est une histoire autour d’un gros projet entrepreneurial mais aussi d’une famille qui implose et de sa reconstruction, d’où le titre The Phoenician Scheme”, pitch le cinéaste, avant de révéler que la bande-annonce sortira dans les jours à venir ! Un peu de patience donc… 


Plongez dans l’univers fantasque des films de Wes Anderson à la Cinémathèque