-
Sicario, Comancheria, Wind River. Les titres claquent, évidents, aussi évident que le rythme métronomique auquel on les découvre (un film par an depuis 2015), aussi évident que l’irrésistible ascension de leur auteur, Taylor Sheridan, l’un des rares scribes adulés du nouveau siècle à ne pas être issu du vivier de la télé câblée. Un type dont on guette désormais la signature avec la même avidité que les cinéphiles gourmets des 70s attendaient celle d’Alan Sharp, quand celui-ci enchaînait The Last Run, Fureur Apache et Night Moves…
Trilogie close
Wind River se savoure donc comme une nouvelle pièce du puzzle Sheridan, la conclusion de ce qu’il appelle lui-même sa « trilogie de la Frontière américaine moderne ». Sicario(signé Denis Villeneuve) explorait l’espace qui mène d’El Paso à Juarez, Comancheria (de David Mackenzie) ressuscitait les fantômes des frères James dans le Texas des vautours capitalistes. Ici, Jeremy Renner traque le salopard qui a laissé crever une amérindienne par -15 dans les étendues enneigées du Wyoming. Du point de vue des obsessions topographiques et climatiques de leur auteur, c’est un triomphe. La cartographie de la scène de crime, le bruit des pas dans la neige, l’étiquette du magasin sur la doudoune toute neuve d’Elizabeth Olsen… Un miracle d’observation socio, de caractérisation minutieuse, de conversations amères retentissant dans l’immensité désolée, soit tout l’arsenal poétique « habituel » de Taylor Sheridan, au milieu duquel se loge une scène de fusillade de première bourre qui prouve que cet homme n’est pas doué qu’avec une machine à écrire.