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Le cinquième long métrage de Nicole Garcia a été présenté au dernier Festival de Cannes où il reçu un accueil plutôt froid. Depuis il a été remonté et sort en salles allégé de 20 mn. Pour autant, Selon Charlie ne convainc toujours pas. Peines de coeur, dépressions et infidélités..., il déborde de sentiments mais reste trop éloigné de la réalité pour toucher.
- Vos impressions ? discutez du film Selon Charlie dans les forums cinémaDepuis quelques années, le cinéma français croule sous une multitude de films centrés sur la communauté. De Comment je me suis disputé (ma vie sexuelle...) au Coeur des hommes en passant par Fauteuils d'orchestre et Célibataires, les cinéastes sillonnent un genre typiquement seventies dans lequel Claude Sautet (Vincent, François, Paul & les autres) et Yves Robert (Un éléphant, ça trompe énormément) étaient passés maîtres. Parmi eux, on trouve l'une des principales héritières du genre, l'actrice/cinéaste Nicole Garcia. Ses réalisations se caractérisent par des gueules attachantes (Gérard Lanvin, Jacques Dutronc, Daniel Auteuil...), un scénariste fidèle et réputé pour le film choral (Jacques Fieschi, acolyte de Sautet) et une tendance à dénuder l'être humain, filmant ses douleurs insondables, ses non-dit stoïques et autres regards vidés. Elle fait des films pour répondre à cette question, thème récurrent de sa filmographie : « Comment les hommes peuvent se tromper, emprunter une histoire, un rêve, un fantasme qui n'est pas le leur, et comment ils peuvent, dans cet égarement, remonter à eux-mêmes ? » (extrait du dossier de presse de Selon Charlie)Dans son cinquième opus, Nicole Garcia examine donc à nouveau le groupe et ses conditions d'existence. Pour survivre, un groupe se doit d'être homogène : cohérence des échanges, des images, d'une certaine représentation de l'amitié (ou de l'inimitié). Ici, quelques silhouettes éparpillées dans une ville, microcosme provincial, à la recherche d'une lumière, d'un apaisement, d'un objectif certain. Ils se prénomment Jean-Louis, Serge, Pierre et Joss. A la virilité fragile, il sont les personnages esseulés d'une société qui ne croit plus en l'amour. Composer des rôles afin de se montrer sous un jour nouveau (un maire, un professeur de sciences naturelles, un escroc...), rudoyer le destin de peur d'être avalé par la solitude des heures perdues, telles sont les mobiles des personnages principaux de Selon Charlie.Ce film est un fourre-tout narratif. Quelque chose qui ressemblerait à une fanfare de province, tentant par tous les moyens de produire un son enivrant, en quête de la plénitude. En chef d'orchestre scrupuleux, Nicole Garcia applique de la pommade sur des cicatrices intérieures et oriente ses choix vers une psychologique sans nuances. Quelques notes apportent du sens au spectateur et diverses pistes justifient les comportements passés et présents des protagonistes. Ces alibis plombent l'atmosphère d'un film qui finit par nous désorienter, entre autres par sa caricature des sentiments humains.Selon Charlie résulte d'un enfermement princier, celui d'une réalisatrice cloîtrée dans sa bulle, préférant filmer l'intériorité, et donc les silences et autres détériorations de l'âme. Tout cela finit par sentir l'académisme et la narration poussiéreuse. Car, pour Garcia, chacun a ses raisons dans ce bas monde, surtout si elles vont dans le sens du happy end. Si Jean-Louis, le maire (Jean-Pierre Bacri) trompe son épouse avec une simple fleuriste, c'est pour mieux retrouver la simplicité du bonheur populaire ; si Serge (Vincent Lindon) se complaît dans une histoire d'infidélité prenant à témoin son fils Charlie, c'est pour délimiter son territoire paternel ; si Pierre (Benoît Magimel), ancien paléontologue, décide de tirer un trait sur son passé, c'est pour ne pas finir comme ces cadavres préhistoriques, seuls et déracinés.D'adultère en dépression nerveuse, il n'y a qu'un pas. Une limite observée par Charlie, un enfant angélique et faussement serein. Il scrute attentivement les aléas d'un monde qu'il devra un jour côtoyer, celui de l'adulte hésitant, de l'homme irresponsable, du chef de famille infidèle, de l'aventurier dépressif. Un monde qu'il rejette du haut de son enfance mais qu'on le contraint à caresser. Charlie, c'est un peu le spectateur incrédule, celui dont le regard fuit faute de situations originales, qui sourit discrètement face à l'absence évidente de finesse, de recul ou bien de véracité dans le traitement. Ainsi Selon Charlie est un film qui aurait pu être simple, si son auteur avait laissé de côté la sempiternelle musique des bons sentiments, trop convenus.Selon Charlie
Un film de Nicole Garcia
Avec Benoît Magimel, Jean-Pierre Bacri, Vincent Lindon, Benoit Poelvoorde, Patrick Pineau, Ferdinand Martin, Jean-Louis Foulquier
France, 2006 - 115 mn
Sortie en salles : 23 août 2006[Illustratrions : © Mars distribution]
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