"Madame, madame, votre billet s'il vous plaît".  Tapotage en règle sur l'épaule par le contrôleur, coma de sommeil survenu à la seconde où l'on s'est posé dans le train : pas de doute, on vient de quitter le Festival de Cannes et son marathon de rencontres, nuits blanches et réveils matinaux au taquet sur le ponton d'une plage. Une semaine sponsorisée par votre tube de vitamine C, boissons énergisantes et par Miss Surprise, celle qui s'invite quand on ne l'attend plus. Non, ce n'est pas l'open bar à disposition toute la journée et son Mister Cocktail impatient de vous faire découvrir sa trouvaille du jour à 11h du matin qui nous ont le plus enivrés. Ni les cinq soirées open bar par nuit cannoise. Ni les qualités de gentleman de Gilles Lellouche, qui vient à vous pour vous éviter d'enfoncer vos talons dans le sable, ni non plus le sourire de Jude Law et ses yeux bleus océan croisés en boîte de nuit. Le plus enivrant ce sont ces quelques mots emplis d'émotion accordés au détour d'une rencontre amicale, prononcés par une légende du cinéma, Jean-Paul Belmondo, pour nous dire combien il est heureux de cette marque d'attention qui lui a été donnée à Cannes.Ce n'est pas la montée des marches de Johnny Depp et Pénélope Cruz, suivie deux jours après par celle de Brad Pitt et Sean Penn, qui marquent le plus beau score sur l'échelle des frissons de la Croisette. Ni même le défilé d'Angelina Jolie, dans sa robe fendue et décolletée couleur chocolat, pour signer des dizaines d'autographes. Cela pourrait être les cris de la foule en délire lorsque Brad Pitt vient chercher Angelina pour remonter les marches avec elle ou bien à chaque apparition de Robert de Niro et de ses saluts à la Croisette, planté en haut des marches. Non, les plus grands frissons ont été ressentis lorsque la musique du Professionnel a retenti sur la Croisette, mêlée aux applaudissements des photographes et aux larmes aperçues au bord des yeux de Richard Anconina. Une seule et même envie de crier "Bravo" qui s'empare d'une foule, ça ça donne la chair de poule.Ce n'est pas une plage surbondée, en délire, aux airs de fête tropézienne au coeur de la saison estivale, se déchaînant sur les mix de Carl Cox, qui produit le plus d'euphorie. Ni un set gagnant de Martin Solveig, ni une soirée des Guetta ou bien même un mix de Bob Sinclar. Tous champions catégorie poids lourd dans la production sans faille du phénomène d'euphorie, mais battus à plates coutures par 14 minutes d'applaudissements dans une salle de cinéma du Palais. Le son d'une standing ovation pour Belmondo par le public et le cinéma français. Euphorie qui se lit dans le rire de Claudia Cardinale qui ne cesse d'applaudir, dans le sourire de Jean-Paul Belmondo qui salue la salle de tous côtés, dans les propos de Charles Gérard le lendemain : "Avec Jean-Paul on en a fait des conneries, on en a des souvenirs, mais le plus marquant de tous... c'est hier soir". A Cannes en une semaine, on en a des souvenirs, on en fait "des conneries", mais on guette ce moment qui sort du lot, celui qui contredit la règle d'or des Festivaliers : "Ce qui est à Cannes reste à Cannes". Celui-là, on l'emporte avec nous. Alexandra ApikianRetrouvez toutes les chroniques du jeudi iciLa dernière chronique du jeudi : JEUDI ÇA JE DIS RIEN... A CANNES - Le charme déroutant d'un début de Festival