Première
par Sylvestre Picard
Les Cowboys va prendre des dimensions immenses, rares. Le film commence en 1994 et s’achève vers 2005 : un long voyage de onze ans où l’on va suivre la quête d’Alain pour retrouver sa fille et qui nous entraîne avec une ambition littéraire (le métrage est chapitré par les noms des personnages) dans un labyrinthe de fausses pistes. (...) Les Cowboys est mélancolique, mutique, flippant, un peu comme une variation française et étouffée de Zero Dark Thirty -autre quête terrifiante et impossible de dix ans- évidemment sans les Navy SEAL.
C’est d’autant plus brillant qu’on ne sait pas où l’on nous entraîne, à l’image des héros de l’histoire : Les Cowboys nous embarque dans des territoires angoissants et inquiets (au son de la BO remarquable de Raphaël, comme quoi tout arrive) et malgré ses jolis plans d’autoroutes belges nocturnes et de corps menaçants, il ne sacrifie jamais au look post-Carpenter (plutôt post-Refn, en fait) synthétique qui empoisonne tant de films de genre français, ni à la surécriture bordélique qui peut menacer un premier film de scénariste. C'est lent, c'est dense et exigeant mais ça colle facile une bastos dans le bide des polars rutilants Europa Corp auxquels on pensait être condamnés. En cela, même s'il a évidemment été conçu avant, Les Cowboys pourrait être un marqueur, devenir, malgré lui, le premier polar post-Charlie, un film de genre qui se saisit du réel et qui tente intelligemment de prendre en compte les bouleversements esthétiques et mentaux induits par une société qui a accouché de la tuerie du 7 janvier.
Première
par Sylvestre Picard
Le premier long métrage du scénariste Thomas Bidegain (coauteur d’Un prophète, de Jacques Audiard) est évidemment un remake de La Prisonnière du désert, de John Ford,dans une version terrorisme contemporain. Sujet casse-gueule, traitement mélancolique, mutique, flippant, un peu comme une variation française, populaire et étouffée, de Zero Dark Thirty (mais sans les US Navy SEALs !)... L’année de Dheepan, de Jacques Audiard, et de Made in France, de Nicolas Boukhrief, Les Cowboys, le moins ouvertement politisé des trois, complète cette "trilogie" post-Charlie. Traversé de visions noires et impressionnantes,Les Cowboys est un film de cinéphiles qui dessine implicitement une frontière invisible mais certaine entre les initiés et les non-initiés. C’est néanmoins une vraie réussite !