En octobre 2015, Première rencontrait Hugh Jackman à l'occasion de la sortie de Pan, de Joe Wright. Nous republions cette interview à l'occasion de la rediffusion du film, ce soir sur TMC.
Qu'est-ce qui vous a convaincu de jouer dans Pan de Joe Wright ?
Comme presque tous les enfants du monde, j'ai grandi avec l'histoire de Peter Pan et son adaptation parce que c'est une très belle fable qui célèbre la puissance de l'imagination. Certes, un jour il faut grandir, payer des factures et mourir, mais Peter Pan nous encourage à préserver la magie de l'enfance : c'est elle qui permet de rendre notre vie plus joyeuse. Et cette histoire qui débute dans un orphelinat me parle encore plus depuis que j'ai adopté mes enfants. Alors autant dire que ça a été une incroyable opportunité d'y participer.
Que diable vient faire Barbe Noir dans le pays du Capitaine Crochet ?
Pan éclaire une autre époque du Pays Imaginaire : celle du règne de Barbe Noire. On y raconte l'arrivée de Peter mais aussi comment le jeune Crochet est devenu ce qu'il est. Joe a imaginé toute cette histoire à partir d'une phrase très précise au début du roman de J. M. Barrie qui indique que le Capitaine Crochet était un serviteur de Barbe Noire.
Pourquoi cette adaptation de Peter Pan est aussi décalée ?
Joe apporte un point de vue très surprenant sur une histoire que tout le monde pensait connaitre. Il est parti du principe que le pays imaginaire peut être réinventé à l'infini et c'est pourquoi il a mélangé tous les styles et les genres, il y a même certaines scènes de comédies musicales déchainées (ndlr : comme lorsque Barbe Noire et ses esclaves se mettent à chanter Smells Like Teen Spirit de Nirvana en choeur...). De même, tous les adultes du film sont à la fois terrifiants et ridicules parce qu'ils sont vus à travers les yeux des enfants.
C'est un pari risqué…
C'est au contraire une représentation très intéressante du pays imaginaire : c'est un monde qui, par essence, n'a aucun sens, aucune logique, il est insaisissable et imprévisible. C'est particulièrement bien montré dans la scène où les pirates capturent les enfants : il y a quelque chose de terrifiant dans les costume de ces flibustiers, mais aussi d'étrangement joyeux et d'envolé dans la chorégraphie générale de la scène. Je pense que Joe a compris le rôle du conte de fée : extérioriser les peurs des enfants et leur donner la force de combattre le monstre qui est tapi sous leurs lits.
A-t-il été facile de recréer le pays imaginaire ?
Joe Wright a voulu abolir le fond vert et tourner le plus possible dans des décors naturels. Si bien que nous avons passé un bon moment sur une crique gigantesque sur laquelle venait se jeter des vagues immenses : c'était vraiment le pays imaginaire, on s'y perdait littéralement. Ce plateau de tournage se transformait en dance-club dès qu'on répétait les parties chantées. On y a fait rugir Nirvana pendant trois semaines. Mais ce qui m'a particulièrement marqué, c'est que ce pays imaginaire a été justement "imaginé" collectivement : acteurs et figurants, nous avons tous été libres de façonner nos costumes en piochant dans de gigantesques box. Nous avons dû apprendre à nous connaitre et à chanter tous ensemble pour donner corps à cet univers. C'est vraiment un excellent souvenir. Jamais je ne revivrai une telle expérience.
Comment rentre-t-on dans la peau de barbe noire ?
C'est un rôle très intense, beaucoup moins explosif que celui de Wolverine, mais résolument plus sombre. Il nécessite beaucoup de concentration. Barbe Noire est quelqu'un de dangereux qui fuit la lumière, qui vit en solitaire dans un bateau et se prend parfois pour une rock star pour manipuler les foules. Il est habillé comme Louis XIV et porte un maquillage blanc cadavérique. L'incarner a été vraiment divertissant, j'ai dû chanter, je me suis battu à l'épée et j'ai fait plein d'acrobaties sur le navire… si bien que je me suis fait des bleus partout et j'ai fini par me casser la voix. J'étais incapable de prononcer un mot pendant une semaine. Ma femme me détestait !
Vous êtes plutôt convainquant en rock star…
Whoua comme vous y allez ! La musique a en effet une grande place dans ma vie, en écouter me permet de transcender mes émotions, c'est un peu comme de la méditation que je pratique quotidiennement.
Après Les Misérables et The Foutain, vous vous rasez à nouveau la tête pour un rôle, avouez que vous adorez ça ?
Un peu... c'est très agréable pour nager, je vous assure (rires). Le problème c'est que je passe aussitôt pour un dealer dès que je me promène dans la rue. D'ailleurs, j'ai passé quelques jours à Disneyworld avec mes enfants, chauve et barbu. A chaque fois que je les accompagnais à la piscine nous croisions une fille, un peu stone, affalée près du bassin. Je voyais qu'elle me regardait d'un drôle d'air et puis, un jour, elle a fini par me dire d'une voix éraillée : "tu me rappelle quelqu'un… tu ressembles vraiment à un pirate, mec !"
Propos recueillis par Mathias Averty
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