- Première
Quel est le prix du silence ? Après nous avoir offert Les Intranquilles en 2021, Joachim Lafosse revient en ce début d’année pour affirmer la capacité qu’a le cinéma à se passer de mots. Cinéaste taiseux, il montre avec Un Silence la dangerosité des tabous. Au sein d’une grande maison bourgeoise dans laquelle tout le monde semble s’activer, Astrid (Emmanuelle Devos) maintient un équilibre fragile entre un fils turbulant et un mari (Daniel Auteuil) avocat au bord du gouffre. Ce dernier, officiant dans une affaire de kidnapping, se voit être la cible d’un conflit médiatique. Et c’est à peu près tout ce qui nous est dit (et ce que l’on peut dire sans gâcher le film). Pourtant, on comprend bien vite qu’un secret pèse lourdement sur la famille prête à imploser. L’histoire inspirée d’un fait divers qui a défrayé la chronique belge, donne l’occasion aux acteurs de prouver (encore une fois) leur justesse. Le spectateur est lui aussi pris en étau, cloisonné avec eux entre les murs de la villa encerclée par les journalistes. Le silence ne se caractérise pas ici par une absence, il est bien présent et claustrophobique. L’intrigue nous perd pour mieux nous troubler, dévoilant peu à peu un comportement ignoble traité avec froideur et sans jugement. Cette expérience pénible dépeint avec élégance les travers d’une femme rongée par la honte de son impuissance et qui peine à garder la tête hors de l’eau dans le tumulte.
Bastien Assié