Première
par Isabelle Danel
On pense évidemment à l’enfant sauvage de François Truffaut, dont Marie Heurtin serait en quelque sorte le pendant féminin, avec son lent apprentissage du langage des signes et des codes de la vie en société. Or Jean-Pierre Améris s’intéresse autant à Marie qu’à Marguerite. Il choisit l’axe de la mise au monde d’une enfant par une femme qui n’en aura jamais, au risque de creuser ce sillon avec parfois un peu d’insistance. C’est notamment le cas lors de la scène où la nonne "rend" Marie à ses parents, à la fois émouvante et plombée. Filmer le temps, le vide, le souffle du vent du point de vue d’une enfant emmurée n’est pas chose aisée mais, en dépit d’une surenchère de musique, ces sensations captées nous parviennent et nous touchent. Ce qui est beau dans ce film inspiré d’une histoire vraie, c’est l’obstination infatigable de l’éducatrice, ce rapport à la vie qui tient plus du sacré que du religieux et auquel Isabelle Carré prête son énergie de douce tornade.