Première
Souvenez-vous, c’était en 2004 : Eddie Murphy était un agent immobilier devant cohabiter avec une série de fantômes farfelus dans Le Manoir Hanté et les 999 fantômes, comédie familiale délirante qui fut un échec critique majeur à sa sortie. En 2010, Guillermo del Toro est pourtant choisi pour écrire et produire une toute nouvelle adaptation de la célèbre attraction de Disneyland « The Haunted Mansion », avec un film qui aurait dû être interdit aux moins de 13 ans (PG-13) aux États-Unis. Le scénario finira par changer plusieurs fois de mains, avant d’être finalement remanié par une nouvelle scénariste, Katie Dippold, afin de toucher le plus grand nombre de spectateurs.
Avec ce Manoir Hanté nouvelle génération, Justin Simien, tête pensante de la série Dear White People pour Netflix, s’empare à nouveau de l’attraction en alignant un casting de stars à toute épreuve, jonglant entre gloires d’antan ayant su rebondir au cours de ces dernières années (Jamie Lee Curtis, Danny DeVito et Winona Ryder) et nouveaux espoirs affirmant leur singularité à Hollywood, Lakeith Stanfield en tête. Depuis presque dix ans, l’acteur a réussi à gravir les échelons en interprétant des rôles de grand bonhomme perdu dans le cosmos humain, à l’image du drolatique Darius dans la série Atlanta ou du télémarketeur bizarre de Sorry to Bother You. Il est ici l’intérêt principal de ce nouveau blockbuster live-action made in Disney, imposant sa patte éminemment personnelle dans un film qui hésite à trouver la sienne, aidé par sa grandeur physique et son charme destructeur, usant de son corps comme pouvait le faire Buster Keaton au début des années 1920.
Derrière cette performance, il n’y a pourtant pas grand-chose à se mettre sous la dent. À force de vouloir s’adresser à un public aussi large que possible, le film peine à trouver un ton qui le caractérise pleinement. L’humour, constamment poussif, est empreint d’un caractère enfantin, reposant sur des comiques de situations destinés à faire rires les plus jeunes, contrastant avec un ton horrifique qui mise sur des jumpscares, des séquences de poursuites rocambolesques, et des questionnements autour des professions de voyantes, spécialistes et autres escrocs.
Et si la première partie de ce Manoir Hanté attise la curiosité, rappelant cette mode du film de bande des années 1980 à la sauce Goonies et Breakfast Club, sa deuxième mi-temps sombre dans un spectacle tristement brouillon, où chaque comédien cabotine franchement, Owen Wilson en tête dans le rôle d’un prêtre plus escroc que catholique, et Tiffany Haddish en voyante excentrique poussant le trait humoristique à outrance. En fin de compte, mieux vaut retourner faire un tour dans l’attraction de Disneyland Paris.
Yohan Haddad