Affiches sorties de films du 9 février 2022
Metropolitan Filmexport/ Kinovista- The Jokers- The Bookmakers/ Gaumont

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
MOONFALL ★★☆☆☆

De Roland Emmerich

L’essentiel

Un blockbuster qui décolle bien mais perd sa trajectoire en route.

A l’heure où les blockbusters se font rare en salles, un spécialiste du genre tente sa chance en ce mercredi : Roland Emmerich. Avec un objectif de cinéma limpide :  provoquer, ne serait-ce qu’un instant, un sincère ébahissement. Mais cet ébahissement-là, Moonfall ne parvient qu’à l’effleurer, malgré son sujet qui le conjure de tous ses vœux : la Lune quitte son orbite et va se fracasser sur la Terre. Le début du film est prometteur. Une mission spatiale se fait attaquer par une colonne de matière noire surgie de la Lune… C’est l’occasion justement d’un beau jeu d’échelle, avec cette explosion lunaire que l’on aperçoit sur le reflet du casque d’un astronaute. Ensuite, dix ans plus tard, les anciens astronautes de cette mission doivent sauver la Terre de la chute de la Lune avec l’aide d’un pseudo-scientifique. Du "classique et sans surprise" qui fonctionne très bien dans sa première partie, tant que le film se borne à suivre le compte à rebours d’un film-catastrophe .

Mais tout cela s’effondre peu à peu lors du dernier tiers du film, qui précipite Moonfall dans le domaine de la science-fiction la plus délirante en pillant aussi bien le final de 2001, L’Odyssée de l’espace que de Mission to Mars - il fallait le faire ! Comme s’il sortait de la trajectoire plaisante qu’il avait esquissé au démarrage, le film-catastrophe se divise de fait en deux arcs narratifs imbriqués : l’un au sol, suivant une bande de survivants cherchant à échapper à la chute de la Lune, et l’autre en l’air, qui devient une odyssée galactique métaphysique. L’aventure terrestre est trop mollassonne et celle dans l’espace est trop absurde. La combinaison des deux ne fonctionne jamais. Plus dur est l'atterrissage !

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A ADORE

THE INNOCENTS ★★★★★

De Eskil Vogt

Un été, dans une cité HLM norvégienne (, un couple vient d’emménager avec leurs deux filles : la plus âgée est handicapée mentale, et elle subit les cruautés plus ou moins conscientes de sa petite sœur. Cette dernière va rencontrer deux autres gamins, jouer avec eux le long des longues journées de l’été norvégien. Et il s’avère que les gamins détiennent de mystérieux pouvoirs. The Innocents est un thriller surnaturel qui se déploie dans un grand récit épique sur l’enfance, ses montres et ses peurs. A l’ère où le cinéma de genre s’autodétruit par ses références nostalgiques, étouffantes et morbides à un passé fantasmé, Eskil Vogt évite les vieux clichés et fait le choix de la radicalité. Pas de néons ou de playlist rétro au programme, mais la volonté d’un réalisme absolu : la caméra se met à hauteur d’enfant, et ce point de vue devient tout l’enjeu du film. Non seulement The Innocents fait vraiment, salement, flipper, mais son ambition rayonne au-delà du simple coup de pression. C’est un vrai drame de l’enfance aux dimensions épiques, aussi excitantes et terrifiantes que ce que votre imagination prépubère pouvait faire surgir de l’ombre d’un arbre.
Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

ENQUÊTE SUR UN SCANDALE D’ETAT ★★★★☆

De Thierry de Peretti

Enquête sur un scandale d’état s’inspire, d’un livre enquête co-écrit par Hubert Avoine, ex-infiltré des stups plus ou moins repenti (campé ici par Roschdy Zem) et Emmanuel Fansten (Pio Marmaï), journaliste à Libération. Ce sont eux qui ont suivi et rendu publique l’affaire dite « François Thierry », du nom de cet ancien patron de la lutte anti-drogue accusé d’avoir sciemment organisé un vaste trafic de stupéfiants sous couvert de démanteler des réseaux. L’affaire avait débuté le 17 octobre 2015 avec la saisie spectaculaire en plein Paris de plusieurs tonnes de cannabis. Il s’agissait en réalité d’un écran de fumée pour épater la galerie et donner le change, alors qu’en coulisse des dizaines de tonnes de drogues atterrissaient sur notre territoire au vu et au su des autorités dédiées, sans faire de bruit mais avec beaucoup de profits. C’est là que le cinéma, formidable usine à créer elle-aussi des mirages et des trompe-l’œil, entre en jeu et « déjoue » le film. Puisque tout ce qui est montré dans ce réel reconstitué n’est qu’apparence, il convient donc d’interroger les objets et les formes représentés. Le regard du spectateur se substitue à celui cinéaste et scrute plus qu’il n’observe. Plus que sur des actes, le film de Thierry de Peretti repose donc sur des intuitions. Le cinéaste ne cherche pas à trancher, encore moins à juger qui que ce soit. Aidé de sa chef opératrice, Claire Mathon, logiquement récompensée pour son travail au Festival de San Sebastian, il nous présente un monde masqué, heurté, dont le surgissement angoissé des signaux de reconnaissance, finit par nous terrasser. Tout ici tient de l’hypnose. Un grand film sur la frustration.  

Thomas Baurez

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WHITE SNAKE ★★★★☆

De Ji Zhao et Amp Wong

Dans la Chine médiévale mythique, un paysan recueille une femme-serpent amnésique et se retrouve plongé dans un conflit immémorial entre démons de tous bords. Que White Snake (sorti en Chine en 2019) soit une énième nouvelle adaptation d'un récit déjà adapté de nombreuses fois sur les écrans asiatiques (Kenji Mizoguchi comme Tsui Hark s'y sont frottés) n'enlève rien à l'excitation provoquée par cette version animée : visuellement somptueuse, son rythme est épique à crever, enchaînant les bastons en forme de morceaux de bravoure, chacune semblant vouloir enterrer la précédente en termes d'ampleur. On n'oubliera pas de sitôt White Snake, surtout avec des personnages inoubliables comme son démon-renard artisan au double visage. La suite du film, Green Snake, est déjà dispo sur Netflix -mais, soyez prévenus, c'est tout de même bien meilleur sur grand écran.

Sylvestre Picard

 

PREMIÈRE A AIME

MORT SUR LE NIL ★★★☆☆

De Kenneth Branagh

Bis repetita. Le succès public du boursouflé Crime de l'Orient-Express en 2017 a donc donné le feu vert à sa suite directe Mort sur le Nil -exactement comme en 1974, quand le carton du Crime de L'Orient-Express de Sidney Lumet d'après Agatha Christie engendra quatre ans plus tard Mort sur le Nil de John Guillermin.

Et dès sa séquence d'ouverture, on comprend que Kenneth Branagh (acteur et réalisateur) a l'air de prendre son film extrêmement au sérieux. Un flashback en pleine Guerre de 14-18, épaississant le passé du personnage d'Hercule Poirot à l'aide d'outils de mise en scène pas vraiment subtils (le noir et blanc, un plan-séquence dans les tranchées, le rajeunissement peu crédible de Branagh...). Avant un retour en 1937 pour que l'enquête commence, en couleurs et pour de bon, autour d'un crime commis dans la haute société sur un bateau flottant sur le Nil. Franchement, qui ne voudrait pas voir le top des actrices et des acteurs du moment s'étriper joyeusement au fil d'une intrigue machiavélique ? Le problème, c'est que Branagh semble donc prendre son film très au sérieux. La caméra virevolte et fait des tours autour des suspects lors des interrogatoires pour montrer que la logique de Poirot les encercle. Et pourtant : malgré toute sa pompe, sa vulgarité et ses tirades fiévreuses, on ne peut pas s'empêcher de prendre un sacré pied. Dès qu'on se décide à se prendre au jeu et à jouer au détective avec Poirot. Mais aussi grâce à son casting impeccable. Mort sur le Nil se révèle donc incontestablement supérieur au Crime de l'Orient-Express. Peut-être qu'il fallait un réalisateur avec un égo aux dimensions de Branagh pour provoquer un plaisir aussi sympathique que complètement frivole ?

Sylvestre Picard

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POUR TOUJOURS ★★★☆☆

De Ferzan Ozpetek

Après un départ en fanfare (Hammam, Harem et Tableau de famille), Ferzan Özpetek n’avait jamais retrouvé la vista à l’œuvre de ses premiers films. Jusqu’à ce Pour toujours où les planètes paraissent de nouveau parfaitement s’aligner. On y suit un couple homosexuel en pleine crise qui se voit confier par une proche amie - en rupture avec sa mère grande bourgeoise - ses deux enfants alors qu’elle doit se faire hospitaliser. Et Özpetek réussit parfaitement à mêler chacune des histoires composant ce film choral pour signer une ode aux familles recomposées, aux liens du cœur qui prennent le pas sur ceux parfois viciés du sang, grâce à une écriture subtile de ses personnages dont il met en avant les faces sombres pour ne jamais verser dans la guimauve. Et ses comédiens (dont Jasmine Trinca, sacrée meilleure actrice 2020 en Italie) donnent corps avec superbe à ce mélo attachant.

Thierry Cheze

LES VEDETTES ★★★☆☆

De Jonathan Barré

Six ans après La Folle aventure de Max et Léon, le deuxième long métrage du Palmashow est peuplé de personnages qu’on pourrait croire échappés de l’une de leurs vidéos. A commencer par Stéphane (David Marsais) et Daniel (Grégoire Ludig). L’un est employé du mois dans un magasin d’appareils électroménagers, tandis que l’autre se voudrait chanteur sans y arriver. Deux parfaits contraires qui se détestent mais finissent par s’attirer lorsque Daniel a l’opportunité de participer à un célèbre jeu télé. Embarquant Stéphane avec lui, le duo part conquérir l’audiovisuel français, envers et contre tout. Si tout cela rappelle les sketchs du Palmashow, la morale de l’histoire, elle, se situe bien ailleurs. Car sous leurs airs niais, Daniel et Stéphane ne sont jamais moqués. Par leur marginalité, ce sont eux qui rendent les autres bizarres. Revanche de la « France d’en bas », nouvel emblème des loosers : Les Vedettes est une sorte de deuxième premier film. Musique, humour, émotion : tout est dosé, et ça se sent. Seul bémol : la réalisation qui, pour le coup peine à sortir des clous du Palmashow comme l’y invitait à le faire plus spontanément La Folle aventure de Max et Léon. La marge de progression existe donc largement pour le troisième opus de la joyeuse bande.

Mathilde Trocellier

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GOLDA MARIA ★★★☆☆

De Hugo et Patrick Sobelman

En 1994, le futur producteur (de Solveig Anspach, Lucas Belvaux…) Patrick Sobelman a filmé pendant 3 jours avec sa caméra amateur sa grand- mère Golda Maria en lui demandant de raconter sa vie, de son enfance de petite fille juive en Pologne à l’horreur des camps. Celle- ci est décédée en 2010. Et Sobelman a eu le désir de se replonger dans cette archive inestimable avec son fils Hugo (Soul kids) pour parvenir à ce film aussi passionnant qu’essentiel. La parole limpide de Golda Maria y transcende la forme aride (des confidences face caméra, avec la qualité dégradée des VHS de l’époque) de l’exercice. Les souvenirs sont vifs, le refus de tout apitoiement sur son sort, poignant. A son retour des camps, elle n’avait rien raconté à sa famille. « C’était impossible, on ne nous aurait pas cru, on ne voulait pas nous-mêmes y croire ». 50 ans après, ses confidences font de Golda Maria un document d’intérêt public.

Thierry Cheze

GREAT FREEDOM ★★★☆☆

De Sebastian Meise

La « Grande Liberté » du titre, c’est celle dont ont été privés les homosexuels en Allemagne à cause du Paragraphe 175 du Code Civil, seulement abrogé en 1969. Si on sait que les homosexuels ont été persécutés par le régime nazi, on ignore souvent que ceux d’entre eux qui survécurent aux camps de concentration ne recouvrèrent pas la liberté après-guerre, mais furent transférés en prison afin de finir de purger leur peine légale. Un phénomène cauchemardesque raconté dans Great Freedom à travers le parcours de Hans Hoffmann, un gay qui ne sort de prison que pour mieux y revenir, montré à trois moments de son histoire, en 1945, 1957 et 1969. Le réalisateur Sebastian Meise échappe à l’horizon du film à thèse grâce à sa façon très élégante de glisser d’une époque à l’autre, d’une peine à l’autre – construction sophistiquée qui lui permet de décrire 25 ans d’histoire de la répression de l’homosexualité en Allemagne comme une promenade absurde dans un labyrinthe temporel, sans début ni fin.  Un beau film au classicisme tranquille dominé par le visage romantique et les manières félines de Franz Rogowski (Transit).

Frédéric Foubert

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VOUS NE DESIREZ QUE MOI ★★★☆☆

De Claire Simon

Neuf ans après Gare du Nord, Claire Simon renoue avec la fiction en s’intéressant à la figure de l’écrivain Yann Andrea, ultime compagnon de Marguerite Duras. Elle met en images ses échanges avec son amie Michèle Manceaux qu’il avait provoqués pour raconter cette histoire d’amour pas comme les autres et qui donnera lieu à un livre, Je voudrais parler de Duras. Les mots de Yann Andrea frappent par leur puissance pour raconter cette passion qui l’animait autant qu’elle le torturait. Mais l’exercice de les porter au cinéma est complexe. Claire Simon semble ainsi ne pas savoir quoi faire du personnage de Manceaux, lui rajoutant des scènes inutiles hors de leur face à face. Mais elle réussit pourtant son pari. Grâce à la composition impressionnante de Swann Arlaud mais aussi à la manière, inventive dont elle réussit à faire vivre hors cadre la figure de Duras. Un exercice tout en délicatesse.

Thierry Cheze

BULADO ★★★☆☆

De Eché Janga

L’action de ce deuxième long-métrage du néerlandais Eché Janga après Helium en 2014 (resté inédit) se déroule intégralement sur l’île caribéenne de Curaçao, état autonome appartenant au Royaume des Pays-Bas. Jadis plaque tournante du commerce d’esclaves venant d’Afrique, cette terre porte en elle des blessures plus ou moins secrètes que les générations actuelles ne veulent peut-être plus entendre. C’est justement ce que raconte le sensible Buladó, qui voit Kenza, 11 ans, obligée de composer avec les croyances ancestrales et mystiques de son grand-père, le pragmatisme de son père et la mémoire de sa mère défunte. La mise en scène use autant de la force magnétique des paysages majestueux et changeants que celui de son interprète principale. Kenza, butée mais sensible, reste constamment au centre d’un film dont elle prend en charge l’apparent mystère.

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

L’HORIZON ★★☆☆☆

De Emile Carpentier

A 18 ans, Adja se cherche cet horizon dont il est question dans le titre, coincée entre son grand frère footballeur qui monopolise toute l’attention familiale et sa meilleur amie influenceuse qui cartonne sur les réseaux sociaux. Jusqu’à ce que se rapprochant d’un ami du lycée, elle découvre avec lui la ZAD installée près de son quartier, en lointaine banlieue, avant de s’engager de plus en plus aux côtés de cette Génération Climat. Plein de bonnes intentions et révélant le talent de Tracy Gotoas dans le rôle central, ce premier long métrage se révèle, une fois l’intrigue posée, trop programmatique pour convaincre. Malgré ses efforts, Emilie Carpentier peine à transcender les poncifs qui ont tendance à étouffer ses personnages. Son film ne manque pas de charme mais le mélange entre comédie romantique et portrait de la jeunesse engagée d’aujourd’hui manque de liant.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

LA DISPARITION ? ★☆☆☆☆

De Jean- Pierre Pozzi

Alors que la gauche française aborde mal en point la Présidentielle de 2022, ce documentaire entend apporter sa contribution au débat en racontant la chute de la maison PS en partant de l’élection de Mitterrand en 81. Encapsuler 40 ans de socialisme en mêlant images d’archives et témoignages (recueillis par Mathieu Sapin) tient de la gageure. Et La Disparition ? ne parvient pas à faire de miracle et ne dépasse jamais la banale compilation d’infos et d’analyses vues et revues. On reste tout autant sur sa faim sur le choix des intervenants qui font tous pâle figure face à deux figures écrasantes : le communicant Gérard Colé qu’on adore prendre un malin plaisir à fracasser Séguéla et surtout Julien Dray, le fameux inspirateur de la série Baron noir. Dès qu’il prend la parole, on se dit qu’il est le vrai sujet de ce documentaire. Dommage que ses propos pertinents soient noyés sous une collection d'idées reçues

Thierry Cheze

 

Et aussi

Des films en campagne, de José Burgarel

Jean- Michel le caribou et les histoires d’amour interdites, de Mathieu Auvray

Marry me, de Kat Coiro

Ruptures, de Arthur Gosset

Reprises

Le Journal de Bridget Jones, de Shanon Maguire

Lettre d’une inconnue, de Max Ophüls

Satyricon, de Federico Fellini