John Carter (2012)
C’est quoi ? Première réalisation en live action d’Andrew Stanton (Le Monde de Nemo), avec Taylor Kitsch (alors belle gueule de Friday Night Lights) dans le rôle-titre, John Carter est adapté du "Cycle de Mars", série de romans d’Edgar Rice Burroughs, créateur de Tarzan : les aventures d’un ancien soldat de la Guerre de sécession qui se retrouve téléporté sur Mars, ou "Barsoom" comme l’appellent les différents peuples aliens qui l’habitent et passent leur temps à se massacrer. Carter va prendre part à un conflit planétaire orchestré par une secte d’êtres surpuissants…
Pourquoi ça s’est planté ? Hollywood rêvait de l’adapter depuis (au moins) 1936. John McTiernan, Tom Cruise, Robert Rodriguez, Benicio Del Toro et Jon Favreau s’y sont essayé, sans succès. Andrew Stanton, fou amoureux des bouquins, fit le siège de Disney pour que le studio récupère les droits auprès de la Paramount afin d’en fait son passage au live action. Le projet démarre en 2008. Quatre ans et plus de 300 millions de dollars de budget plus tard, Stanton et Disney s’écharpent sur la façon de vendre John Carter auprès du grand public. John Carter of Mars est renommé John Carter trois mois avant la sortie, signe que Disney avait lâché l’affaire niveau promo. En mars 2012, John Carter démarre à 30 millions de dollars au box-office US. Les jeux sont faits : avec des recettes mondiales de 284 millions, le film est un énorme flop.
Pourquoi c’est bien ? Difficile à résumer, parfois maladroitement construit (le prologue bancal, les ruptures de ton), John Carter reste un film d’aventures bourré de trouvailles visuelles et de passages flamboyants. La partition de Michael Giacchino est sublime, les scènes d’action sont canon, le mélange de western alien steampunk est surexcitant, la fin joliment méta est bien trouvée… Les anglo-saxons disent que le Cycle de Mars appartient à un style de SF nommé planet opera : ça convient parfaitement à John Carter, véritable opéra planétaire dont les splendeurs semblent infinies.
Lone Ranger : Naissance d’un héros (2013)
C’est quoi ? L’adaptation d’une saga radiophonique diffusée dès 1933 (John Reid et Tonto sont aussi vieux que Superman !), absolument culte aux Etats-Unis depuis le carton de son adaptation en série télé, qui a couru de 1949 à 1957, mais méconnue chez nous. En 2010, fort du carton de la trilogie Pirates des Caraïbes, Gore Verbinski se voit confier par Disney les rênes d’une ambitieuse version cinéma. Il retrouvera sur ce projet Johnny Depp, alors en pleine gloire grâce au rôle de Jack Sparrow qui, fier de ses origines Cherokee, voit dans le rôle de Tonto l’occasion de rendre hommage aux Indiens d’Amérique. Voire de réparer leur représentation faite par Hollywood depuis des décennies.
Pourquoi ça s’est planté ? Parce que ça a coûté très cher au studio, déjà : 215 millions d’euros de budget officiel, sans compter sa publicité, et que Disney ne savait pas trop comment vendre cette histoire de cowboys et d'indiens pas tendre avec les Américains, et pas vraiment destinée aux enfants, du coup : une scène de massacre a choqué une partie du public, créant une polémique à sa sortie aux Etats-Unis. Il était pourtant déconseillé aux moins de 13 ans non accompagnés d'un adulte, mais la mention de Disney a dû induire des spectateurs en erreur... En France, Lone Ranger est sorti sans interdiction particulière, mais est à présent estampillé -10 ans lors de ses diffusions télé. Sa durée (2h30), l'image "trop classique" des westerns et le retour de Depp dans un rôle extravagant et grimé après trois opus en Jack Sparrow ont sans doute aussi joué en sa défaveur. Bref, à l’été 2013, le film a eu du mal à franchir les 250 millions de dollars dans le monde, là où les Pirates 2 et 3 flirtaient avec le milliard de recettes.
Pourquoi c’est bien ? Les sommes colossales engagées sur ce projet se voient à l’écran, Gore Verbinski multipliant les scènes d’action mémorables : la course poursuite sur le toit d’un train est notamment digne des meilleurs combats orchestrés pour Pirates des Caraïbes. Le talent du réalisateur est aussi palpable dans les détails, par exemple lors d’une scène de transition où un plan sur une montre cassée illustre autant le recours au flashback que la symbolique de la mémoire brisée du personnage qui raconte l’histoire (Tonto). En une idée, qui paraît simple sur le papier, le réalisateur exprime toute la fragilité du personnage. C’est beau, malin, parfois vraiment fort et souvent surprenant (on ne s’attendait pas forcément à un message anti-capitaliste au cœur d’une telle production, par exemple). Sans compter que le duo est très bon, le côté ingénu et trop parfait d’Armie Hammer s’associant parfaitement au personnage plus fou -et finalement attachant- de Depp. Qui n’en fait d'ailleurs pas des tonnes, contrairement à ce que pouvait laisser penser la promo, qui ne tournait qu’autour de lui.
A la poursuite de demain (2015)
C’est quoi ? Un film de SF 100% original (bien que vaguement inspiré de la partie futuriste des parcs Disney, Tomorrowland) signé Damon Lindelof (Lost, Prometheus, The Leftovers…) et réalisé par Brad Bird, alors connu pour ses films d’animation de qualité (Le Géant de Fer, Les Indestructibles, Ratatouille). L’histoire suit une jeune fille (Britt Robertson, une révélation) trouvant un pin’s qui la transporte dans un monde plein de technologies inconnues. Et donc plein promesses. Quand cette trouvaille lui cause des ennuis, elle va chercher de l’aide auprès d’un inventeur farfelu joué par George Clooney.
Pourquoi ça s’est planté ? Si les bandes-annonces étaient intrigantes, avec notamment une vision de la Tour Eiffel transformée en base de lancement de fusée et ses visions d’un monde rétro-futuriste, il était difficile de savoir à quoi s’attendre. Difficile de faire rentrer le concept d’A la poursuite de demain dans des cases, difficile de le vendre à un public habitué aux adaptations et franchises bien établies ? Comme John Carter, le projet a changé de titre dans les pays francophones juste avant sa sortie, "Tomorrowland" évoquant plus un festival de musique électro par chez nous que de la science fiction. Résultat, pour 190 millions de dollars de budget, le film n’en a rapporté que 209 sur la planète. Ouille.
Pourquoi c’est bien ? Tomorrowland n’est pas sans défauts (des longueurs dans sa mise en place, la morale de fin un peu balourde…), mais il vaut le coup d’œil pour sa vision optimiste de l’avenir, qui s’inspire de la manière dont les artistes et scientifiques de la fin du XIXe siècle/début du XXe siècle imaginaient le monde de demain : Thomas Edison, Gustave Eiffel, Walt Disney… Une excellente idée sur le papier. D'ailleurs, l'équipe prend visiblement un malin plaisir à jouer avec ce concept, au sens propre : on n’avait pas vu Clooney s’amuser autant à l’écran depuis Burn After Reading, des frères Coen, et le réalisateur s’en donne lui aussi à cœur joie, en filmant par exemple la maison de l'inventeur, pleine de gadgets (la scène de la baignoire est particulièrement mémorable !) ou un combat dans une boutique geek, où les figurines (de R2D2, par exemple) deviennent des armes improvisées. Les bonnes idées fusent, surtout au début du film. Brad Bird était déjà célèbre pour sa mise en scène ludique (sa fameuse exposition en trois temps, décryptée ici) et il prouve avec ce film qu’il sait aussi bien l’exploiter en live qu’en animation.
Au programme, de la science-fiction rétro, un western punk et un ambitieux planet opera qui ont fait raquer Disney. Pour une fois !
Cette semaine, M6 diffusait A la poursuite de demain, ambitieuse épopée de science-fiction avec George Clooney, suivi de Lone Ranger, un western mis en scène avec brio par Gore Verbinski. Deux productions importantes des studios Disney qui ont connu un gros flop en salles. Dommage, parce que ces films valent largement mieux qu’une ligne en négatif dans le bilan comptable du studio Disney : ces échecs les rendent même encore plus beau, à l’instar John Carter, sorti un peu avant eux. Ces trois films, produits alors que Disney était en train de conquérir la planète de l’entertainment à l’aide du Marvel Cinematic Universe, sont moins des anomalies que de vrais films d’auteur, passionnants, complexes, spectaculaires. De vrais films Disney comme on n’en fait plus, donc.
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