Ce qu’il faut voir en salles
L’ÉVÉNEMENT
LA PLANETE DES SINGES : LE NOUVEAU ROYAUME ★★★★☆
De Wes Ball
L’essentiel
En mêlant récit initiatique, grand film d’aventure et film d’infiltration nerveux, Wes Ball réussit son pari
Nous sommes quelques siècles après les événements de la trilogie de Wyatt et Reeves. Les hommes ont été réduits à l’état sauvage. A la place de César, mort, un nouveau chef est apparu. Proximus, un bonobo tyrannique et cruel qui ravage le campement où un jeune chimpanzé Noa vivait en paix avec son clan et oblige ce dernier à entamer un long périple où il croisera en chemin une étrange humaine…. Ce Nouveau Royaume est signé Wes Ball qui s’était distingué en réalisant le très nerveux premier volet du Labyrinthe. Sa version de la Planète des singes possède des décors et des effets spéciaux impressionnants. A la fois récit initiatique (on suit Noa à la découverte du monde), grand film d’aventure multipliant les scènes ébouriffantes et film d’infiltration nerveux , ce Nouveau Royaume rappelle au fond que le film de 1968 était autant une réflexion politique qu’une véritable série B, fun et excitante. C’est cette dernière option qu’a retenue Wes Ball.
Pierre Lunn
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A AIME
L’ESPRIT COUBERTIN ★★★☆☆
De Jérémie Sein
Comédie non-sensique sur les JO, mélange de slapstick, de satire mauvais esprit et portrait hilarant d’un inadapté social, le premier film de Jérémie Sein est un OVNI dans lequel Benjamin Voisin impose une véritable vis comica : il a trouvé son clown dans ce rôle de Paul, champion de tir surdoué, un peu gauche et très puceau, qui se retrouve au village olympique pour les JO de Paris. Alors que la délégation Française multiplie les échecs, Paul va devenir la dernière chance de médaille. Mais un voisin de chambre très embarrassant, sa coach très envahissante et un patron des sports très gênant vont lui mettre des bâtons dans les roues. Sein signe un film mordant, qui avance entre la BD ligne claire, la comédie sociale et cinglante des 70s françaises, et les classiques américains totalement régressif.
Gaël Golhen
Lire la critique en intégralitéCOMME UN LUNDI ★★★☆☆
De Ryo Takebayashi
Un film de boucle temporelle, encore un ! Ça commence à devenir un brin répétitif, mais vous nous direz, c’est l’idée… Après des variations en mode horreur (Happy Birthdead), comédie romantique (Palm Springs), SF (Edge of Tomorrow), et on en passe, Comme un lundi décline le concept façon comédie de bureau – logique, la vie en open-space ayant en soi un côté Un jour sans fin… Ici, il est question des employés d’une agence de pub japonaise qui se retrouvent à revivre indéfiniment la même semaine. L’atmosphère évoque Gondry, sans les bricolages en papier mâché, mais pour ce mélange de prosaïsme et de fantaisie, de filmage débraillé et de petites absurdités poétiques – la soupe miso effervescente sur laquelle bossent les personnages, le « flashback pigeon » qui pourrait les aider à trouver la sortie… Un film léger, charmant, sur des sujets plutôt sérieux, comme l’articulation entre l’individu et le collectif, ou les réunions clients qui rendent marteau.
Frédéric Foubert
BLAGA’S LESSONS ★★★☆☆
De Stephan Komandarev
Dans Taxi Sofia sa précédente fiction sortie chez nous le bulgare Stephan Komandarev auscultait l’absurdité et la violence de la société de son pays portant encore en elle les stigmates de sa période communiste. Son héros un chauffeur de taxi pris dans des magouilles se retrouvait acculé de dettes et choisissait d’en finir. Le film dressait le portrait d’un pays sans repère. C’est au tour de Blaga de se retrouver confrontée au chaos. Cette ancienne enseignante par forcément très sympathique est manipulée par des truands à qu’il elle donne toutes ses économies (la séquence d’ouverture est oppressante) Désemparée, Blaga est contrainte de travailler pour ceux-là même qui l’ont flouée si elle veut retrouver ses économies. Sa morale vacille et son efficacité à faire le mal transforme cet être inoffensif en monstre froid. Komandarev regarde son pays sombrer. Presque sans bouger. Terrible constat.
Thomas Baurez
SUPER LION ★★★☆☆
De Rasmus A. Sivertsen et Jean-Luc Julien
Tout droit venu de Norvège, Super Lion, c’est le coming-of-age d’Evie, issue d’une famille de justiciers. Son rêve ? Prendre la relève. Du moins, c’est ce dont on l’a persuadée. Entraînée par une mamie rock’n’roll, Evie va faire tout son possible pour cocher toutes les cases d’une normalité établie par un papa à la M. Indestructible pas si « super » que ça. Malgré une structure quelque peu redondante, Rasmus A. Sivertsen et Jean-Luc Julien ont réussi le pari d’un film hybride dans son utilisation de l’animation et résolument moderne, explorant à la loupe – mais sans jugement – les besoins et comportements d’une jeunesse qui a grandi avec le numérique. Une réflexion ludique sur la marginalité et l’acceptation commune à beaucoup de films jeunesse, mais qui, ici, semble adressée aux grands plus qu’aux petits.
Chloé Delos- Eray
LA MEMOIRE ETERNELLE ★★★☆☆
De Maite Alberdi
Elle, l’actrice et politicienne Paulina Urrutia, entretient la mémoire. Lui, le journaliste chilien Augusto Góngora, la perd. Dans ce documentaire intimiste, Maite Alberdi suit leur couple sur plusieurs années alors qu’Augusto lutte sans relâche contre Alzheimer. Mais plutôt que de dramatiser la maladie, la réalisatrice l’aborde avec légèreté et ausculte le dévouement sans faille de Paulina. Et de ces moments de tendresse et de rire, parsemés d’une affliction déchirante, seul l’amour inconditionnel demeure.
Lucie Chiquer
FILM ANNONCE DU FILM QUI N’EXISTERA JAMAIS : DRÔLES DE GUERRE ★★★☆☆
De Jean- Luc Godard
La voix de Godard est intimement liée à ses images depuis les fameuses Histoire(s) du cinéma de 1998, où, positionnée en surplomb, elle véhiculait ses pensées dont la caverneuse diction imprimait un rythme solennel. Godard, homme de mots, de son et d’images-mouvements « qui viendraient de loin » comme on l’entend dans un murmure au début de cette « bande-annonce » d’un film qui n’existera donc jamais. Cela devait s’appeler Drôles de guerres, libre - forcément libre - adaptation du roman goncourisé du belge Charles Plisnier, Faux passeports (1937), réflexion crépusculaire sur les idéaux communistes déchus. « J’ai été intéressé par ces portraits imaginaires ou réels de quelques militants de l’époque qu’il avait connus vers 1920, dit Godard de sa voix chevrotante à mi-film, C’était plus comme un peintre en littérature, il faisait des portraits de visages ou d’allures... » Ne reste donc de ce projet que des fragments épars dont l’organisation échappe forcément, des collages visuels, des sons éruptifs montés au hachoir, de musiques pénétrantes, où les mots s’entrechoquent. Un film qui s’écoute et se regarde.
Thomas Baurez
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoPREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME
UN HOMME EN FUITE ★★☆☆☆
De Baptiste Debraux
La ville de Rochebrune est en colère : le braquage d’un fourgon par un ouvrier contestataire provoque de violentes divisions. Un inconnu ténébreux et une flic tenace mènent l’enquête… Sous influence nordique, ce polar évolue maladroitement entre flashbacks et flashforwards, enchaîne les retournements de situations improbables, et peine à développer un véritable propos politique. Reste l’incroyable Pierre Lottin en voyou flegmatique, qui vole nettement la vedette au reste du casting.
Yohan Haddad
LA VIE SELON ANN ★★☆☆☆
De Joanna Arnow
Une comédie new-yorkaise sur le monde du travail et le BDSM. La rencontre entre Woody Allen et Lena Dunham ? En partie, la détresse existentielle du premier et l’acidité de la seconde en moins. Toutes les situations visent à souligner quelques malheurs contemporains ; et une vie sexuelle qui déroge un tantinet à la norme passerait presque pour un égarement. Quel dommage que l’actrice- réalisatrice choisisse une résolution si simpliste, alors que le cadre laissait à rêver tellement plus subversif…
Nicolas Moreno
PREMIÈRE N’A PAS AIME
BLUE & COMPAGNIE ★☆☆☆☆
De John Krasinski
Avec le carton de Sans un bruit et un Sans un bruit 2 pas trop mal dans le genre, John Krasinski essaie de se réinventer en racontant l’histoire d’une gamine partie à la rescousse des amis imaginaires délaissés par leurs enfants devenus adultes, Blue & compagnie n’est réellement intéressant lorsqu’il est sur le point de basculer vers le film d’horreur. Mais on dirait qu’il ne s’en rend même pas compte, qu’il a jugé bon qu’il serait plus lucratif de tout miser vers le mélo, aussi pesant soit-il. Au programme : multiplication de petits gimmicks d’arrière-plan censés soutenir le propos, jeu somnambulique de Ryan Reynolds, pathos à tous les étages au son d’une mélodie de Michael Giacchino mise en boucle, étirée, ralentie, martelée jusqu’à ce qu’elle ne produise, ou ne réinvente, plus rien. A l’image du film tout entier.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéNEUILLY- POISSY ★☆☆☆☆
De Grégory Boutboul
Neuilly Poissy. Bel oxymore géographique, qui résume les tensions de ce film-entonnoir (attrapant toutes les ritournelles sociétales du moment). On commence sur une histoire d’arnaque, on bifurque vers le film de prison façon OZ (la violence, le racisme), avant d’enchaîner sur un traité de cohabitation religieuse (car on est tous frères, au fond) qui s’abolit dans une hypothétique rédemption. Ca ne fonctionne jamais à cause de la caricature, des incohérences mais surtout parce que, à Neuilly comme à Poissy, les bons sentiments n’ont jamais fait de bons films.
Pierre Lunn
MON PIRE ENNEMI ★☆☆☆☆
De Mehran Tamadon
Mojtaba, Hamzeh, Zar (Amir Ebrahimi, l’héroïne des Nuits de Masshad), ont en commun d’avoir été violemment interrogés par des agents de la République Islamique d’Iran. Entre témoignages et reconstitutions, Mehran Tamadon invite les victimes à se mettre dans la peau des tortionnaires et à faire souffrir les faux interrogés pour nous faire comprendre la violence du régime. Un dispositif qui crée le malaise sans hélas permettre de mieux appréhender l’ampleur de l’horreur en cours dans le pays.
Emma Poesy
JEUNESSE, MON AMOUR ★☆☆☆☆
De Léo Fontaine
Une bande d’amis de jeunesse qui se retrouvent, après des années qui ont peu à peu distendu le lien qui les unissait, le temps d’une après midi où les non- dits d’hier vont remonter à la surface. Pour son premier long métrage, Léo Fontaine a choisi d’arpenter un terrain tellement arpenté par le cinéma qu’il se révèle incapable de faire entendre une petite musique singulière, la faute à des personnages, des situations et des échanges trop enfermés dans des archétypes.
Thierry Cheze
LA COULEUR DANS LES MAINS ★☆☆☆☆
De Nora Hamdi
Une jeune peintre en herbe nouvellement installée dans un studio parisien, se voit obligée de franciser le nom qui apparaît sur sa boîte aux lettres. Yasmine Bellifa devient ainsi Janine Beli. Un “détail” qui la renvoie à la mémoire de parents qu’elle n’a pas connus, victimes du terrorisme en Algérie, et qui transforme son expérience de la bohème en crise existentielle. Pour son troisième long, la romancière Nora Hamdi adapte l’une de ses œuvres dans une littérarité qui ne laisse aucune place aux sous-entendus que permettent les images. Ici, l’errance dans la Ville Lumière – dont on ne voit que les recoins – se constitue journal intime didactique sans jamais réussir à dissimuler les fragilités techniques de ce tâtonnement de film, ou la langueur du personnage se transforme en longueur.
Chloé Delos- Eray
Et aussi
Toutes les couleurs du monde, de Babatunde Apalowo
Un jour fille, de Jean- Claude Monod
Wake up, de RKSS
Reprises
Aloïse, de Liliane de Kermadec
Le jardin qui bascule, de Guy Gilles
Sans rien savoir d’elle, de Luigi Commencini
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