Toutes les critiques de La Verónica

Les critiques de Première

  1. Première
    par Thierry Chèze

    L’exercice n’est pas simple. Comment s’attaquer aux dérives du monde des influenceurs sans enfoncer des portes ouvertes et ne pas uniquement tirer sur une ambulance mal en point ? Leonardo Medel s’en tire ici non sans superbe en tirant le portrait d’une Victoria Beckham chilienne, femme de footballeur prête à tout pour recruter le million d’abonnés qui lui manquent sur son compte Instagram pour décrocher un juteux contrat d’égérie pour une marque de cosmétiques. D’abord par son parti pris de mise en scène très payant : ne filmer son héroïne que par des plans- séquences fixes à l’image des vidéos de Youtubeurs, où elle se retrouve le plus souvent seule à l’écran, ses interlocuteurs s’exprimant hors champ ou de dos, traduisant ainsi par l’image le caractère mégalomaniaque associé à cette pratique. Ensuite par l’écriture tout en finesse de ce personnage, perverse narcissique de compétition certes mais soumise aussi à des injonctions étouffantes qui vont la pousser à aller encore plus loin sur la pente du cynisme qu’elle emprunte naturellement. Notamment ce besoin impératif d’apparaître comme une « bonne mère » pour ne pas être mis au banc des internautes et plus largement de la société alors que l’instinct maternel lui est totalement étranger. Et dans ce rôle, Mariana Di Girólamo, la révélation d’Emma de Pablo Larrain en 2019, livre une composition époustouflante.