Fernando Trueba et Javier Mariscal racontent l’histoire de ce documentaire animé racontant la vie et la disparition mystérieuse d’un pianiste brésilien longtemps oublié, Francisco Tenorio Jr.
Aviez- vous déjà entendu parler de Francisco Tenorio Jr avant de vous lancer dans They shot the piano player ?
Fernando Trueba : Absolument jamais !
Comment alors l’avez-vous connu ?
Fernando Trueba : En 2004, j’ai tourné à Salvador de Bahia un documentaire, Le Miracle de Candeal. Or à cette époque, ils étaient en train de rééditer pas mal de musique brésilienne des années 60 qui a longtemps été introuvable. Et c’est en achetant plusieurs de ces disques que j’ai découvre ce pianiste dont je n'avais jamais même entendu le nom. J’ai donc commencé à me renseigner sur lui. A découvrir qu’il avait disparu soudainement et mystérieusement six jours avant le coup d’Etat argentin de 76, pays où ce pianiste brésilien, pilier de la bossa nova, vivait. Puis en échangeant avec mon ami Caetano Veloso, j’apprends qu’ils avaient un projet ensemble qui ne s’est pas fait précisément à cause de sa mort brutale. Sa vie s’est mise à m'obséder et j’ai donc commencé à faire des interviews filmées. Dans l’idée d’un livre ou d’un documentaire. J’en ai fait 140 entre 2005 et 2007. Puis je laisse tout cela de côté pour réaliser El baile de la Victoria et Chico et Rita avec Javier Mariscal.
Et comment retournez- vous à l’histoire de Francisco Tenorio Jr ?
FT : Grâce à Chico et Rita ! Je me suis dit que l’animation allait être la forme la plus appropriée pour raconter cette histoire car en passant par le documentaire, j’aurais simplement enchaîné les interviews de gens qui parlent d’un mort, entrecoupées d’archives. Ca n’aurait rendu grâce à Francisco et lui aurait fait vivre, d’une certaine manière, une nouvelle injustice après qu’il a été assassiné et oublié. Alors que l’animation, elle, allait me permettre de lui redonner vie, le montrer avec sa famille, jouer avec ses copains musiciens. Alors j'ai commencé à rêver à ça. Sans en parler à personne pendant des mois car je pensais que peu à peu cette obsession allait me quitter. Mais plus les mois passaient, plus j’y pensais. Alors j’ai fini par en parler avec Javier que je connais depuis 2000 quand on a travaillé ensemble sur Calle 54.
Comment avez- vous réagi ?
Javier Mariscal : Outre le bonheur de travailler avec Fernando, cette histoire m’a tout de suite passionnée. J’aimais l’idée qu’avec ce film on allait oublier l’oubli ! Qu’on allait enfin redonner vie à Francisco, permettre qu’on réentende sa musique.
THEY SHOT THE PIANO PLAYER: UN INGENIEUX MELANGE DES GENRES [CRITIQUE]Pourquoi avez- vous choisi un journaliste américain pour mener cette enquête à l’écran ?
FT : L’idée m’est venue au début de l’écriture. Ca allait m’aider à rendre cette histoire plus compréhensible car les spectateurs allaient pouvoir la vivre avec lui, au rythme de ce qu’il découvre.
Qu’est ce qui change le plus quand vous écrivez un scénario de film d’animation ?
FT : Au fond pas grand-chose. Car, en écrivant, mon obsession était que ça soit très cinéma avec un côté très bande dessinée. Mêler ces deux esthétiques et trouver le bon mariage. Javier a travaillé un an avant d’attaquer l’animation.
JM : J’aimais cette idée qu’il fallait inventer quelque chose dans le domaine de l’animation pour adultes qui reste encore chez nous, contrairement à la France, un parent pauvre du genre. De faire à la fois un film d’enquête, un film musical, un film noir. Et comme Fernando ne vient pas de l’univers de l’animation, il n’est pas formaté et sort des cadres
FT : Quel est l’intérêt que je vienne sur ce terrain et que je fasse de l’animations comme les autres ? Par contre, ça donne plus de travail avec Javier qui doit dessiner beaucoup plus de choses que dans un film d’animation classique. Il a travaillé un an avant de commencer à proprement l’animation avec cette idée géniale d’associer à chaque intervenant une couleur dominante. Ce qui donne à l’écran au final ce foisonnement de couleurs.
Pourquoi avoir fait appel à Jeff Goldblum pour prêter sa voix au journaliste qui mène l’enquête ?
FT : J’ai tourné avec lui en 1989 Le Rêve du singe fou à Paris. On est devenus amis et on est toujours resté en contact. Dès que j’ai commencé à écrire ce scénaeio, j’ai donné son prénom au personnage car je rêvais qu’il le fasse. Car outre son talent et sa voix magnifique, c’est quelqu’un qui joue – et très bien – du piano. Donc cela avait beaucoup de sens et j’ai eu la chance qu’il soit libre et qu’il accepte !
They shot the piano player. De Fernando Trueba et Javier Mariscal. Avec les voix de Jeff Goldblum, Roberta Wallach, Tony Ramos… Durée : 1h43
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