Lynne Ramsay emprisonne un couple dans la faille spatio-temporelle de leur relation chaotique. Jennifer Lawrence tient fiévreusement Robert Pattinson en respect. C’est déjà ça ! En compétition.
Scènes de la vie conjugale arty et désespérées. Ce Die, My Love présenté en compétition carbure aux sautes d’humeur d’une mise en scène au diapason d’un sujet que l’Ecossaise n’envisage que dans ses retranchements. Lynne Ramsay enferme d’emblée Jennifer Lawrence et Robert Pattinson dans une bicoque à la campagne, les regarde un peu de loin tels des souris de labo. Le film s’ouvre ainsi sur un plan strict et immobile d’un home (peu) sweet home dont la perspective échoue lamentablement sur un salon défraîchi. Nos deux tourtereaux font le tour du propriétaire.
A l’étage on entend des rongeurs circuler librement. Les corps s’échauffent un peu, beaucoup... En fait (déjà) peu passionnément. Le couple est au bord d’un gouffre que lui n'a pas vu venir, trop heureux d’avoir hérité de la maison de son oncle fraîchement décédé où il pourra mené une vie petite bourgeoise (combo : enfant et animal de compagnie) Elle, sent déjà dans sa chair que le truc est mal barré : "Ça fait combien de temps que l’on n’a pas baisé ?"
Le titre programmatique, comme le plan d’ouverture, ont déjà tout dit. Il y aura des hurlements, un gamin qui crie, un chien qui aboie, des beaux-parents circonspects... Ramsay (We Need to Talk About Kevin, A Beautiful Day…), on le sait, n’est pas une dentelière. Le roman de l’argentine Ariana Harwicz qu’elle adapte ici s’articule en un long monologue d’une mère désespérée. L’occasion pour la cinéaste de 55 ans d’envisager le récit comme un lent vacillement mental dont la redondance assumée se chargerait d’électricité à chaque tour de piste. Pour que cela produise autre chose que du cliché, il faut savoir chercher - et trouver ! - du mystère au milieu du tableau. Ces failles, Ramsay s’installe dessus et s’emploie à boucher tous les trous avec ses gros sabots.
Jennifer Lawrence arpente le gazon familial telle une féline, un couteau entre les dents. Robert Pattinson, en falot de service, essaie de donner le change. Mais la partie est inégale. L’actrice, géniale, emporte tout. Le film est de son côté. La mise en scène se voudrait brutale mais baigne en réalité dans l'afféterie : travail sur le son trop étudié, musiques additionnelles trop à propos, points de tensions trop attendus et allégories trop pubardes (les flammes comme représentation d’un enfer domestique, au secours !) Ce Die, My love est un objet auteuriste maniéré limité dans son propos. À la périphérie, Sissy Spacek en belle-mère désolée et un peu larguée illumine ces ténèbres. Le temps d’une séquence chaotique, Nick Nolte ne rassure pas, en revanche, sur son état de santé. Et pendant ce temps-là, bébé pleure mais a fini par sortir du cadre. Il a bien raison.
Ecosse. De Lynne Ramsay. Avec : Jennifer Lawrence, Robert Pattinson, Sissy Spacek, Nick Nolte... Durée : 1h58. Sortie indéterminée.







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