Jour2Fête / Pathé Distribution / Universal Pictures International France

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

MEKTOUB MY LOVE – CANTO UNO ★★★★★ 
D’Abdellatif Kechiche

L’essentiel
Abdellatif Kechiche transcende l’héritage naturaliste français en lui conférant la texture et les dimensions d’un film-trip.

Alors que l’internationale cinéphile, prise dans les remous du mouvement #MeToo, s’interroge aujourd’hui plus que jamais sur le « male gaze » (ce « regard masculin » qui oriente et façonne les films depuis l’invention du septième art), Mektoub My Love arrive à point nommé pour rendre le débat un peu plus brûlant encore. A la Mostra de Venise déjà, en septembre dernier, on sentait les critiques anglo-saxons un peu gênés aux entournures par la façon dont le film regarde ses actrices (ses acteurs aussi, mais surtout ses actrices) sous toutes les coutures, amoureusement, frénétiquement, dans une sorte d’affolement érotomane débridé.   
Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A ADORÉ

LES BONNES MANIÈRES ★★★★☆
De Juliana Rojas et Marco Dutra

Julia Ducournau (Grave) nous confiait récemment qu’elle se reconnaissait dans le cinéma crossover anglais et sud-coréen, qui avait érigé le mélange des genres et la transgression en modèles esthétiques et narratifs. Elle aurait également pu citer le nouveau cinéma brésilien qui, sous l’impulsion de Kleber Mendonça Filho (Aquarius), tente de sortir les récits des carcans imposés par Hollywood et le grand cinéma d’auteur international. Avec Les Bonnes Manières, le duo Juliana Rojas et Marco Dutra pousse la logique de l’hybridité au maximum.
Christophe Narbonne

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THE CAPTAIN – L’USURPATEUR ★★★★☆
De Robert Schwentke

A travers l'histoire vraie d'un déserteur de 19 ans qui, usurpant l'identité d'un officier pendant les quinze derniers jours de la guerre, enclenche une succession d'atrocités, The Captain raconte rien moins que le fonctionnement du nazisme. Même si le système a été conçu au départ par une minorité, il s'appuie bel et bien sur l'ensemble de la population qui, consciemment ou non, par peur ou par intérêt, applique une logique guerrière primitive, transmise par une chaîne de commandement implacable. Après des débuts comme mercenaire compétent aux Etats-Unis, Robert Schwentke (Flight Plan, Red) trouve enfin un sujet d'importance qu'il met en valeur avec des choix très judicieux ; un noir et blanc approprié à l'enjeu binaire (tuer ou être tué), une direction d'acteurs intense et non naturaliste, et une écriture précise qui évite la psychologie pour aller à l'essentiel. On regrette presque de ne pas en savoir plus sur certains personnages comme le suiveur Freytag ou l'opportuniste Kipinski, exemples de gens ordinaires qui, ayant échappé par miracle à la condition de victime, se comportent en bourreaux sans aucune arrière-pensée. Le film pousse l'absurde de la situation jusqu'aux limites de la décadence morale. En 2001, L'expérience avait traité la question de l'abus d'autorité sous l'angle de la fiction. En la situant dans un contexte réel, The captain aborde non seulement un sujet historique sensible, mais il interroge sur la façon dont ces mêmes mécanismes sont encore à l'oeuvre aujourd'hui.
Gérard Delorme

LA PRIÈRE ★★★★☆
De Cédric Kahn

Cédric Kahn a fait ses armes comme stagiaire sur le tournage de Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat. Il a donc vu le mysticisme à l’œuvre. Un mysticisme qui jusqu’ici semblait en jachère, même si ses deux derniers films, Une vie meilleure - sur le surendettement - et Vie sauvage   - sur une famille vivant en dehors des clous de la société capitaliste -  semblaient indiquer la voie d’un ailleurs souhaité. Le voilà ici sur les traces d’un jeune adulte - Thomas - qui essaie de combattre son addiction à la drogue en intégrant une communauté isolée dans la montagne avec la prière comme thérapie. Thomas, tête souvent baissée, va devoir donc apprendre à regarder en haut pour se dégager des contraintes terrestres. Autour de lui, ses condisciples lui parlent tels des prêtres en confession, prêts à se flageller plutôt que de sortir de leur gonds. Thomas, d’abord rétif, doit lui aussi devenir cet esprit Saint. Signe de cette fragilité à l’œuvre,  Cédric Kahn traduit l’accomplissement de cette conversion via une ellipse aussi brutale que mystérieuse. Thomas isolé en montagne cherche alors un signe de Dieu. Seul le cinéma peut le lui donner via ce point de montage. Kahn ne juge pas, sa caméra s’intéresse aux visages, à la façon dont la parole se synchronise ou non à la pensée profonde des êtres. Prier est une route possible pour trouver ce point d’équilibre. Mais Kahn n’est pas prosélyte. Ce n’est pas tant le message de Dieu et les rites qui soignent, que la façon dont Thomas va s’en servir pour se libérer. Passionnant.
Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIMÉ

PACIFIC RIM UPRISING ★★★☆☆
De Steven S. DeKnight

L’humanité est une fois de plus menacée dans ce deuxième opus. Pour la sauver, Jake Pentecost (John Boyega) et une armée d’apprentis pilotes se lancent dans des combats tous spectaculaires, à l’aide de leurs super-robots badass. Le principe reste le même que celui du film réalisé par Guillermo del Toro en 2013.  On retrouve avec plaisir Gipsy Danger (qui s’est refait une beauté pour l’occasion) ainsi que des petits nouveaux tous plus cool les uns que les autres, qui dévoilent de nouvelles armes et de nouveaux atouts.
Alexandre Bernard

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9 DOIGTS ★★★☆☆
De F.J. Ossang

« Ne pas comprendre c’est la clé ». Cette phrase lancée dans le nouveau F.J. Ossang (Dharma guns) résume parfaitement le voyage cinématographique auquel ce dernier nous convie. Une balade pour laquelle il est recommandé de laisser tout esprit cartésien au vestiaire afin d’en savourer les tours et les détours. Au départ, se profile pourtant un film noir on ne peut plus classique. On y voit un homme tomber par hasard sur un paquet d’argent, s’en emparer avant de se faire courser par la bande cherchant à récupérer le magot. De cette bande, il deviendra l’otage puis le complice lorsqu’après un braquage raté, il embarque avec eux sur un cargo transportant une cargaison irradiée. Et c’est là que le film bascule. Que ce voyage vers un hypothétique Eldorado – dont le nom Nowhereland suffit à comprendre ce qu’ils vont y trouver - prend des chemins de traverse, à l’image de ces malfrats irradiés semblant avoir fait fi de toute logique. La narration classique s’effiloche et laisse la place à une atmosphère aussi anxiogène que fascinante. Avec ce sublime noir et blanc signé Simon Roca (le directeur de la photo de La fille du 14 juillet), on se croirait dans un Bob Morane revu et corrigé par l’expressionnisme allemand. Le résultat est parfois longuet, souvent intriguant, toujours surprenant. Comme le travail d’un chercheur en images et en récit dont ce film pourrait être le laboratoire. Artiste multiple (l’homme est aussi poète et chanteur), F.J. Ossang tourne peu – 5 longs métrages en 33 ans – mais marque à chaque fois nos pupilles.
Thierry Cheze

VINCENT ET MOI ★★★☆☆
De Gaël Breton et Edouard Cuel

Entre 2012 et 2015, Edouard Cuel (avec Gaël Breton) a filmé le parcours de son fils trisomique pour l’accès au travail auquel il avait normalement droit. Ce documentaire montre avec humilité les réticences du monde professionnel, pas encore mûr pour accueillir les handicapés, et les obstacles légaux et administratifs auxquels les deux hommes ont été confrontés. Il témoigne surtout de l’amour infini d’un père pour son fils, et réciproquement. Vous n’êtes pas prêt d’oublier la scène où le premier craque, réconforté par le second... Vincent et Gaël, deux vrais héros au quotidien.
Christophe Narbonne

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

APRÈS LA GUERRE ★★☆☆☆
D’Annarita Zambrano

En 1985 le président français permet aux anciens activistes d’extrême-gauche italiens des années de plomb, d’éviter une extradition vers leurs pays d’origines pour peu qu’ils aient exprimé leur désengagement vis-à-vis de la cause. Baptisée pompeusement « doctrine Mitterrand », celle-ci sera remise en cause en 2002 avec l’autorisation d’extradition de l’écrivain Cesare Battisti, depuis réfugié au Brésil. L’action d’Après la guerre se déroule entre l’Italie et la France cette même année, et tourne autour de la figure de l’ex-gauchiste Marco (Giuseppe Battiston) rattrapé par son passé sanglant. A la journaliste (Marilyne Canto) qui lui demande s’il nourrit des regrets, il répond sans ambages : « Chacun de nous a eu ses morts, comme dans toutes les guerres. » Tout ici, on s’en doute, est affaire de perspectives.  Lorsque le film regarde à travers les yeux fatigués et désespérés de Marco, c’est un monde clair-obscur qui s’offre à la caméra. L’obscurité permet aussi bien de se cacher physiquement que de mettre au chaud les contradictions de toute une vie faite de violence et de calme relatif. « La France nous a hébergé, nous a permis de changer de vie. Elle ne peut pas donner sa parole et revenir dessus 20 ans après ! » s’énerve Marco. De l’autre côté du miroir, il y a l’Italie où le meurtre d’un professeur d’Université ravive les tensions passées et menace la famille de Marco restée au pays. L’image évite cette fois les contrastes et déploie un hors champ plus vaste. Un petit appartement devient ainsi un lieu assiégé par des ennemis invisibles. Si le film un poil didactique d’Annarita Zambrano pèche par prudence historique (le sujet est très sensible en Italie), il a le mérite d’éviter la surenchère et de rester à hauteur de l’intime. Celles et ceux qui voudraient du Romanzo Criminale ne seront pas servis.
Thomas Baurez

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

PAS COMME LUI ☆☆☆☆☆
De Franck Llopis

Léo retrouve son père 13 ans après l’avoir vu pour la dernière fois. Lorsqu’il emménage chez lui, à Paris, le jeune homme découvre que ce dernier cache un lourd secret. Prenez un scénario bancal parsemé d’histoires annexes pas nécessaires et non abouties (comme la relation entre Léo et sa patronne), une poignée d’apprentis comédiens (dont le niveau tutoierait celui d’acteurs de séries Z indiennes) et leurs personnages caricaturaux (directement inspirés du cas d’école "Marion Cotillard meurt dans TDKR"). Ajoutez à cela des dialogues aussi drôles qu’aberrants (comme cet échange entre deux flics sur la cigarette), ainsi que des défauts de cadrage et de son (où l’on a l’impression qu’une tempête souffle dans un appartement), vous obtenez Pas comme lui.
Alexandre Bernard

Et aussi
La Finale de Robin Sykes
Demons in Paradise de Jude Ratnam
Vincent et moi d’Edouard Cuel
Dokhtar de Reza Mirkarimi
Willy et les gardiens du lac de Zsolt Palfi
Prochain arrêt : Utopia d’Apostolos Karakasis
Auzat l’Auvergnat d’Arnaud Fournier Montgieux

Reprises
Cinq femmes autour d’Utamaro de Kenji Mizoguchi
L’élégie d’Osaka de Kenji Mizoguchi