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Difficile de parler de cette expérience de cinéma radicale dont le récit et les personnages échappent aux stéréotypes. Essayons. Le héros, Emil, travaille dans une mine de calcaire avec son frère. Il est bizarre, Emil. Il mate une jeune voisine et regarde des VHS de cours de tir. Il vend aussi de l’alcool frelaté à ses collègues qu’il élabore à partir d’un produit chimique volé sur son lieu de travail. Le jour où un consommateur est empoisonné, ça tourne au vinaigre pour lui… Dit comme ça, on a l’impression que Winter Brothers déroule la mécanique narrative habituelle, à base de tension qui va crescendo. Ce n’est pas vraiment ça. Dès l’introduction, plongée claustro dans l’univers sombre des mineurs, éclairée à la lampe de leurs casques, où les repères spatiaux sont effacés, on comprend qu’on est face à une œuvre où l’atmosphère importe avant tout. La suite le confirme : des vignettes, entre burlesque et fulgurances de violence, instaurent un climat anxiogène, renforcé par une intrigue de moins en moins lisible qui épouse l’âme tourmentée d’Emil. Véritable œuvre de plasticien, Winter Brothers déroute et fascine en même temps. Vous êtes prévenus.