Le clown Pennywise est de retour dans une adaptation majestueuse du livre de Stephen King.
« Il » revient. Pennywise. Le croquemitaine préféré de la génération « jeudis de l’angoisse ». Alors qu’Hollywood se reprend de passion pour les écrits de Stephen King (La Tour sombre au ciné, les séries Mr Mercedes, The Mist, Castle Rock…), il s’agissait d’offrir un écrin digne de ce nom au joyau de la couronne King, le plus terrifiant et adoré des bouquins du Roi. C’est le petit génie argentin Andrés Muschietti (réalisateur du bouleversant Mama en 2013) qui a été choisi pour ressusciter le scary clown traumatique. Et ce sont les années 80 qui ont été élues comme setting du film (le livre originel se déroulait dans les années 50), ce qui paraît logique dans un monde obsédé par les succédanés d’E.T. (et de E.T. à IT, il n’y a qu’un pas). Un monde où les Duffer Brothers triomphent avec une série, Stranger Things, qu’ils ont conçue par dépit, frustrés et amers que l’industrie refuse de leur confier les rênes d’un nouveau Ça…
L’histoire industrielle de cette deuxième adaptation (27 ans après le téléfilm culte Il est revenu) est d’ailleurs un feuilleton à part entière. Arrivé tardivement sur le projet après avoir fui la production de La Momie (où il a été remplacé par Alex Kurtzman), Muschietti a hérité de certains choix artistiques de son prédécesseur, Cary « True Detective » Fukunaga, qui, dit-on, voulait mettre l’accent sur le drame plutôt que sur l’horreur, contre l’avis du studio… Cette volonté de se colleter à ce que Ça (le livre) a de plus dur, de plus violent, de plus cruel, se ressent dans l’atmosphère poisseuse du film, cet atroce climat de deuil, d’inceste et de violences domestiques. Les jeunes acteurs sont tous impeccablement castés, leur alchimie fonctionne à merveille, et le film restitue admirablement ce sentiment universel de « dernier été avant la fin de l’enfance », qui était le sujet du livre originel, et se retrouve ici nimbé du même brouillard mélancolique qui flottait déjà sur Mama.
Mais le film frappe surtout par l’aisance avec lequel il dépasse son apparent paradoxe : échouant régulièrement à remplir le premier de ses contrats (flanquer une trouille bleue), il assoit néanmoins Muschietti en beau faiseur de monstres, créateur de visions d’horreur majestueuses. L’amour des freaks, l’immense générosité avec laquelle ceux-ci sont dépeints (comme des astres fascinants, des sirènes ensorcelantes) assurent déjà au film une place de choix au panthéon de l’horreur. Pour la première fois, ce carnaval de cauchemars « kingien », ce bazar cosmogonique qui se définit aussi par son abondance, prend corps à l’écran avec une grandeur et une autorité (et un budget) dignes de ce nom. Un jour, c’est sûr, on citera Ça dans la même phrase que les plus grandes adaptations ciné de Stephen King, aux côtés de Carrie, Shining et Stand by me.
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