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Les mouvements de caméra virtuoses qui laissent le souffle court et les yeux exorbités ; le sens tétanisant du montage pop ; une pensée se déployant selon un rythme quasi hallucinatoire... Dès les premiers plans de La grande bellezza, on comprend que c’est gagné. La page This Must Be the Place est tournée, l’escapade new wave avec Sean Penn n’est déjà plus qu’un lointain souvenir. Paolo Sorrentino est de retour à la maison en compagnie de son acteur fétiche, le génial Toni Servillo, pour une nouvelle dérive mentale dans le cerveau en surchauffe d’un homme au soir de sa vie. Un fi lm jumeau d’Il divo ? En partie, oui, même si la rage punk qui animait le brûlot du cinéaste sur les magouilles de la Démocratie chrétienne est ici tempérée par l’empathie totale de Sorrentino pour son personnage, sorte de mix romain de Salinger et de Bret Easton Ellis, écrivain dandy qui vit sur le souvenir d’un chef-d’oeuvre écrit il y a quarante ans. À travers lui, ses déambulations mélancoliques, ses conversations baroques, ses ruminations amères, ses aphorismes cyniques, le metteur en scène observe une Italie post-Berlusconi en pleine déconfi ture culturelle et morale. Et c’est bien sûr tout sauf un hasard si Céline est cité en exergue. Comme l’auteur du Voyage au bout de la nuit, le cinéaste vomit la médiocrité de ses contemporains. Comme lui, il part au combat avec pour seule arme la suprématie de son style. En l’occurrence, un cortège de visions folles, d’embardées opératiques et de décrochages sensuels, à la fois hanté par la littérature et totalement électrisant, sans aucun équivalent dans le cinéma de la Péninsule (scusi, Nanni). Pour un peu, cette hauteur de vue esthétique, ce désespoir crépusculaire donneraient à La grande bellezza des allures de film somme, d’oeuvre testamentaire d’un vieux maître revenu de tout. Sauf que le « vieux maître » en question a 42 ans et pète manifestement la forme, exactement comme Fellini quand il tournait 8 ½... Et si on pense ici au créateur de La dolce vita et d’Intervista, ce n’est finalement pas tant pour le déchaînement bouffon et le défilé de saintes, de freaks et de putains, que parce que Sorrentino donne l’impression d’errer, seul, dans les décombres fumants de l’âge d’or du cinéma italien. En cela, il est raccord avec son alter ego incarné par Servillo, un homme obsédé par une chimère, un esthète à la recherche de l’idéal insaisissable qui donne son titre au fi lm. En bout de course, il finira par la trouver, et nous avec lui. « La grande beauté » ? Elle est là, sous nos yeux.
Toutes les critiques de La grande bellezza
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Paolo Sorrentino dispose d’une distribution exceptionnelle d’acteurs italiens. Son comédien fétiche, Toni Servillo, homme de théâtre napolitain, déploie un jeu stupéfiant de retenue, d’élégance et de cruauté feutrée, sur les ruines d’une société en perdition. Vers la fin, Paolo Sorrentino esquisse, pour son héros, la possibilité d’une île et l’espoir, pour la Ville éternelle, d’une renaissance esthétique et spirituelle.
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Sur le fond, le propos est d’une extrême richesse. Un peu trop même, tant le récit s’empêtre parfois dans des dialogues que les interprètes, tous bien inspirés, déclament en rafales nourries. D’autant que la durée du film, deux heures vingt-deux, ne semble pas s’imposer. Comme si Sorrentino n’avait pas fait le tri dans tous ses personnages et leurs discours, témoins d’une Italie en pleine décomposition. Mais il retrouve les folies, l’imagination et la fantaisie inspirés par quelques-uns de ses maîtres, de Fellini à Scola, pour tenter de croire à l’émergence d’un futur
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Paolo Sorrentino filme les destins croisés d'un homme vieillissant et d'une ville éternellement belle... Splendide.
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Après l’échec de « There Must Be the Place », Paolo Sorrentino revient avec une odyssée existentielle, opératique et grotesque peuplée de naines compatissantes, de saintes subclaquantes, d’artistes contemporaines à moitié siphonnées et de flamants roses. Les vacheries abondent dans ce vertige immodeste (Sorrentino, selon ses détracteurs, ne serait qu’un poseur), un poil long mais esthétiquement galvanisant d’un cataclysme post berlusconien, qui dépasse de loin le seul spectre italien.
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Avec La Grande Bellezza, l'italien Paolo Sorrentino signe un hommage à la ville de Rome, temple fellinien par excellence. Sans retrouver la puissance expressive et poétique du maestro, il livre un film spectral porté par une mise en scène virtuose et un Toni Servillo aux petits oignons.
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Superbe film dépressif sur la putréfaction de la société romaine post décadente dans la droite lignée de Fellini. Et Toni Servillo y est juste génial.
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Paolo Sorrentino présente (...) sa version de la dolce vita romaine, avec, pour amphytrion, un journaliste napolitain exilé à Rome, qu'incarne avec son brio habituel le grand Toni Servillo.
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"La Grande Bellezza" sublime le désenchantement d'un chroniqueur mondain dans les vertiges faisandées de la Ville éternelle.
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Sur plus de deux heures, cette rumination très littéraire, extrêmement lucide sur la condition d'artiste, nourrie de regrets, de bile noire et de frustration amère, est sans doute trop longue pour son propre bien, le discours ruminant ayant un peu tendance à s'épuiser sur la durée, et aurait gagné en force avec une demi-heure de moins. Mais les fulgurances qu'elle contient sont inoubliables.
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A la fois pesant, énervant, séduisant et magique, ce film est à l'image de Rome et de son personnage central : vampirisant.
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Ce film ambitieux - trop, jugeront certains - vous réserve des scènes d'une beauté et d'une singularité époustouflantes. Quel voyage que cette "Grande beauté"! La beauté du diable...
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On a là une déclaration d’amour au cinéma italien, mais sans doute encore plus à la ville de Rome (...). L’unique problème de l’œuvre est le poids écrasant de ces références, qui alourdissent cet essai au lieu de l’aider à décoller.
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On se perd parfois dans ce défilé baroque de personnages de toutes sortes, au rythme inégal et balisé de clins dil aux grands cinéastes italiens (Fellini, Scola, Ferreri). Un film bilan et ironique.
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Si le projet de Sorrentino est construit intégralement sur une nostalgie qu’on imagine douloureuse, l’usage qu’il en fait est trop inégal pour donner au film une architecture séduisante.
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L’italien Paolo Sorrentino présente une vision critique et inquiétante de son pays avec La Grande Belleza, film sublime mais déséquilibré.
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Malgré quelques personnages intéressants (la stripteaseuse d'âge mûr, le clone de mère Teresa), il n'évite pas les caricatures faciles ni les survols de la caméra, qui évoquent parfois un clip touristique.