La Révolution
Netflix

France. 1789. Les morts reviennent à la vie dans cette uchronie "bleu blanc rouge" soignée, ambitieuse, mais loin d'être totalement réussie.

Après les pérégrinations parisiennes d'Emily, débarque aujourd'hui sur Netflix une autre série qui fleure bon le drapeau tricolore. Il s'agit cette fois d'une création originale française, mais qui saura aisément parler aux abonnés du monde entier ! Car La Révolution nous plonge dans l'Histoire passionnante du Royaume de France des années 1780, celle des têtes qui tombent et du peuple qui se soulève. Enfin pas tout à fait celle qu'on a appris en CM1 dans nos manuels, puisque dans cette uchronie imaginée par Aurélien Molas - et co-écrite avec Gaïa Guasti (le duo qui avait signé le très beau Une Île, sur Arte) - les morts du Royaume de Louis XVI reviennent à la vie. Et à en croire la narratrice, c'est cette épidémie zombifique qui est à l'origine de la chute de la Couronne...

En attendant de voir des "Walkers" en bonnets phrygiens s'emparer de la Bastille, La Révolution nous ramène en 1787. Joseph Ignace Guillotin est le médecin de la prison du Comté de Montargis, qui va accueillir un étrange prisonnier accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis. Alors qu'il tente de prouver son innocence avant son exécution, il va faire la découverte du « sang bleu », qui semble capable de ramener les morts à la vie...



La subtilité n'est pas le point fort de La Révolution. Les symboles les plus grossiers de l'époque sont pétris à l'envie sous la plume des auteurs, pour former une drôle de Poule au pot. On a ainsi Guillotin - futur inventeur de la guillotine - mué en docteur héroïque. On a Marianne, dans la peau de la chef des rebelles de la forêt - qui se font appeler la Fraternité (c'était ça ou La Liberté...). Et au centre de tout, il y a ce fameux « sang bleu », célèbre locution idiomatique désignant une personne issue de la noblesse, utilisée cette fois au premier degré, puisque les gens de la Haute ont ici littéralement le sang de couleur bleue, symbolisant leur puissance carnassière sur les petites gens, qu'ils dévorent ad vitam... C'est la base d'une mythologie alléchante, qui reste malheureusement trop longtemps confinée à l'état de promesse. Il faut attendre la fin de l'épisode 4 pour avoir le commencement d'un début d'explication et trop souvent on a le sentiment que la narration s'enlise et rechigne à dérouler ses mystères.

La Révolution
Netflix

La série souffre de ces lenteurs, de cette figure de style qui se contente de remixer les poncifs de La Révolution pour servir un propos fantastique un peu gauche. On nous ressert encore des morts-vivants, qui boulottent de la paysanne innocente, entre deux séquences de dialogues balourdes, du genre : "La noblesse ne domine que parce que le peuple est à genoux..." Des échanges boursouflés entre Comtesse et Baron, qui sont bien loin des joutes de Ridicule. D'ailleurs, la série aurait plutôt tendance à rappeler Le Pacte des Loups. Dans sa réalisation souvent clipesque, mais aussi parce qu'elle mise sur une bonne dose d'action presque anachronique, à base de gun fights digne du Far West. Déconseillée aux moins de 16 ans, La Révolution multiplie ainsi les séquences sanglantes, d'une violence cinglante, dans la veine de ce que les dramas historiques ont l'habitude de faire désormais (n'est-ce pas Vikings ?).

En soit, cette approche très graphique est plutôt louable, dans une série de genre avec des morts-vivants. D'autant qu'elle se marie bien avec l'ambiance renaissance très soignée de la production. La série jouit d'une esthétique remarquable, des costumes aux décors, en passant par la lumière méticuleusement pensée. D'une manière générale, La Révolution fait preuve d'une ambition réjouissante, et sa mise en scène est bien souvent à la hauteur des moyens, même si on aurait aimé que le "scope" soit plus vaste. Que l'histoire ne se limite pas à quelques semaines, au sein du Comté de Montargis. Après 8 heures, la série est encore bien loin de la Bastille ou de Versailles. Espérons que la saison 2 arrivera à prendre la mesure des ambitions de cette Révolution.