Affiches Films à l'affiche mercredi 31 mai 2023
Sony Pictures Entertainment/ Memento/ The Walt Disney Company France

Ce qu’il faut voir en salles.

L’ÉVÉNEMENT
SPIDER-MAN : ACROSS THE SPIDER-VERSE ★★★★☆

De Joaquim Dos Santos, Kemp Powers et Justin K. Thompson

L’essentiel

Cinq ans après le premier volet, Spider-Man revient tisser sa toile dans une suite spectaculaire et émouvante, boostée par un travail d’orfèvre sur l’animation.

En 2018, Spider-Man : New Generation était l’un des premiers films à explorer l’idée du multiverse. Le résultat était déjà prodigieux, traversé par un génie provenant aussi bien des comics que du manga, ne se contentant pas d’être un simple “film d’animation”. Imaginer une suite à ce petit chef d'œuvre était donc risqué. Mais le risque ici paye car Across the Spider-Verse est une petite merveille d’animation, qui va bien au-delà de ses ambitions de simple suite pour aller puiser dans un scénario d’une richesse incomparable, aidé par une multiplication de coups de théâtres tous plus bluffants les uns que les autres, où l’on croise un Spider-Man indien, un Spider-Man punk, une Spider-Woman agissant avec un casque de réalité virtuel et même un Spider-Man papa, vu à travers la figure de Peter Parker tentant de raisonner Miles Morales face aux dangers du multiverse. Autant de personnages et de récits dans le récit qui permettent aussi de mixer brillamment les styles d’animation, allant du côté pop des comics d’origine jusqu’à des styles plus modernes, moins immobiles. Inutile de dire donc qu’on attend déjà avec impatience la deuxième partie du film, prévue pour 2024.

Yohan Haddad

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

LYNCH/ OZ ★★★★☆

De Alexandre O. Philippe

Dans la foulée de l’excellent 78/52 (qui analysait de façon obsessionnelle la scène de la douche de Psychose), Alexandre O. Philippe a donc décidé de dédier un film à la passion jamais démentie du réalisateur de Lost Highway pour Le Magicien d’Oz. S’y succèdent en voix off divers critiques et cinéastes (David Lowery, John Waters, Karyn Kusama…), invités à réfléchir, à divaguer, tandis que Philippe met ce flot de parole en perspective en accolant des extraits de films, provoquant de fascinants courts-circuits esthétiques ou théoriques : il y a ici du Oz et du Lynch, bien sûr, mais aussi Max et les Maximonstres, Indiscrétions, Le Cheval de fer, des vieux films noirs méconnus, quelques Kubrick, et puis aussi, tant qu’on y est, le Trois hommes et un bébé de Leonard Nimoy… C’est stimulant, fou, envoûtant, et ça nous dit que l’histoire du cinéma et l’analyse filmique peuvent être des activités aussi trippantes et transcendantes qu’une balade à Twin Peaks ou au-delà de l’arc en ciel.

Frédéric Foubert

 

PREMIÈRE A AIME

L’ÎLE ROUGE ★★★☆☆

De Robin Campillo

L’Île rouge pourrait être un film historique (1971, Madagascar) et (auto)biographique, mais c’est d’abord un récit d’initiation vu à hauteur d’enfant… Le quotidien d’une communauté d’expatriés vu à travers les yeux de Thomas, un gamin qui vit avec ses parents sur une base militaire française. Il capte le monde, l’intime - sa mère et son père, son frère – comme le lointain – les collègues militaires de papa, les amies de maman et les ados qui s’échangent des baisers dans une futaie. L’Île rouge c’est donc cet espace clos, cette base qui vit repliée sur elle-même. Campillo y égrène ses souvenirs irrémédiablement perdus, raconte une famille qui tangue, un milieu sur le point de s’effondrer (le système colonial moribond) et pendant une heure trente, porté par des acteurs extraordinaires le film trouve une grâce et une note émotionnelle aussi fragile qu’entêtante. Quand il passe les grilles de la base pour embrasser le cours du monde et mettre en image ce qui n’était jusqu’ici qu’un grondement sourd et menaçant, il perd paradoxalement en intensité. Mais le voyage dans ce monde perdu vaut le déplacement.

Gaël Golhen

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RENFIELD ★★★☆☆

De Chris McKay

Comment se débarrasser d’un boss toxique ? Au service de Dracula depuis près d’un siècle, son homme-à-tout faire Renfield (Nicholas Hoult) aimerait bien prendre le large. Mais difficile de couper les ponts avec un pervers narcissique quand celui-ci est le Prince des Ténèbres en personne… De ce pitch absurde, Chris McKay parvient à tirer une série B très marrante, où le décorum transylvanien a été délocalisé dans une Nouvelle-Orléans gangrénée par des gangsters qui semblent tous avoir été recalés du casting du dernier John Wick. Geysers de sang, corps démembrés, bande-son bourrine… Le film se présente comme un défouloir bis, mais jamais décérébré, nourri d’un amour palpable pour la tradition des monstres Universal. Nicolas Cage joue Dracula en rock-star gothique, le ton est humble et malin, et pile au moment où on se dit que le film va se mettre à tourner en rond, hop, il est fini.

Frédéric Foubert

SICK OF MYSELF ★★★☆☆

De Kristoffer Börgli

Découverte l’année dernière dans la section Un Certain Regard, alors que paradait au même moment Sans filtre de Ruben Ostlünd en compétition, cette comédie norvégienne affichait une même volonté de caricaturer frontalement les travers de nos sociétés occidentales. Là où le nihilisme et le cynisme du Suédois ne produisent que des tartes à la crème, Kristoffer Borgli, plus empathique avec ses personnages, lui, explore un malaise bien plus profond et signe une insidieuse satire sur la représentation. Il n’est d’ailleurs ici question que d’apparence, donc de transformation possible, que sa jeune héroïne, Signe, va expérimenter à l’extrême. Cette dernière va ainsi provoquer une maladie de peau pour attirer l’attention d’un entourage totalement envahi par l’aura de Thomas, son fiancé, artiste-designer égocentré. Signe devient dès lors un être paradoxal, à la fois ultra-visible et défigurée, objet de curiosité et bientôt de convoitise. Borgli, toujours à bonne distance de son personnage, provoque du rire, sans chercher la facilité. On regrettera juste que son récit se révèle in fine un peu trop sage, le jeune cinéaste ayant pu aller encore plus loin dans cette entreprise jouissive à souhait de destruction voire de mystification.

Thomas Baurez

INVINCIBLE ETE ★★★☆☆

De Stéphanie Pillonca

Comme elle l’a déjà prouvé dans ses fictions pour le petit écran (Apprendre à t’aimer, J’irai au bout de mes rêves, Handigang…), Stéphanie Pillonca sait trouver le ton juste pour parler de handicap. Et elle le prouve encore avec superbe dans ce documentaire consacré à Olivier Goy, un entrepreneur à succès dont l’existence a basculé un matin de décembre 2020 quand on l’a diagnostiqué atteint de la maladie de Charcot, synonyme de disparition à court terme (trois ans maximum) faute de traitement existant. « Du cinéma au cimetière, il n’y a qu’un pas mais je n’ai pas peur. Pour apprendre à vivre, il faut apprendre à mourir », ses mots qui concluent ce documentaire le résument à merveille. Invincible été montre un homme qui, alors que la mort se rapproche inexorablement, a décidé de profiter de chaque seconde de son existence. Et la réalisatrice se hisse à la hauteur de cette force de caractère inouïe en sachant poser sur lui et ses échanges tant avec son entourage (sa famille, ses amis), des figures du monde religieux (le bouddhiste Mathieu Ricard, la rabin Delphine Horvilleur) ou une personne atteinte du même mal que lui (le père de l’animatrice Malika Ménard) un regard qui ne se limite jamais au seul registre émotionnel. Alors que tout forcément pousse ici aux larmes. Ou comment être empathique et profond sans jamais en rajouter.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

SPARTA ★★☆☆☆

De Ulrich Seidl

On connaît depuis Dog days la capacité d’Ulrich Seidl à créer un malaise étouffant et dérangeant au fil de ses récits. Mais depuis plusieurs films, comme trop conscient de ce talent- là, il peine à se renouveler. A l’image de ce Sparta qui traite de la pédophilie à travers un quadra ouvrant un centre de judo pour jeune garçons en Roumanie où l’ambiguïté va régner en maître. Sa mise en scène reste puissante mais il s’enferme dans des figures imposées qui illustrent son propos au lieu de le transcender.

Thierry Cheze

AUX MASQUES CITOYENNES ★★☆☆☆

De Florent Lacaze

Aux masques citoyennes aurait pu être un film d’aventure, sur ce pari fou qu’ont relevé des centaines de femmes : coudre des masques, en pleine pandémie. Un thriller aussi, sur les cadences effrénées et les aléas d’une usine improvisée, où des vies sont en jeu. Mais la gestion de leur patron exigeant, presque trop, flirte surtout la comédie burlesque ; lui qui s’invente conférencier en développement personnel pour motiver ses « lionnes ». Le résultat se révèle brinquebalant et mais séduisant.

Lou Hupel

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

LE CROQUE- MITAINE ★☆☆☆☆

De Rob Savage

On y est : l’esthétique pop 80’s de Stranger Things a définitivement contaminé toute une génération de jeunes cinéastes. Si l’action du Croque-Mitaine se déroule pourtant à notre époque, tout le film respire la production d’horreur de cette décennie devenue objet de fantasme, en partie initiée par le grand manitou Shawn Levy, à la fois producteur sur la série désormais culte de Netflix et sur ce film. Pour le reste, aux commandes, Rob Savage, multiplie des poncifs devenus insupportables, tels que celui de la jeune adolescente maltraitée par ses soi-disant « amies » du lycée, la peur du noir, ou encore le traumatisme familial tout récent qui aura une influence considérable sur l’intrigue. Et la menace du Croque-Mitaine se révèle tellement abstraite qu’elle ne raconte rien sur les traumatismes de cette jeune femme et de sa sœur, affrontant un ennemi visible seulement au travers de jump-scares prévisibles qui ne provoquent aucun effroi, à part peut-être celui d’une industrie qui semble n’avoir plus grand-chose à raconter. 

Yohan Haddad

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L’IMPROBABLE VOYAGE D’HAROLD FRY ★☆☆☆☆

De Hettie Macdonald

Pour son retour sur grand écran… 27 ans après son premier long (Beautiful thing, film gay culte de toute une génération), Hettie MacDonald, la co- créatrice de Normal people a choisi de porter à l’écran un best- seller de Rachel Joyce. Les aventures d’Harold, un retraité menant une vie sans aspérité auprès de son épouse qui, après avoir reçu lettre de Queenie, une vieille amie mourante, décide d’entreprendre à pied le voyage vers l’hôpital où elle a été admise, certain que ce voyage la maintiendra en vie tout en redonnant un sens à la sienne. Si le scénario dévoile habilement le lien secret qui unit Harold et Queenie, le parti pris d’appuyer les choses (une BO aussi omniprésente que pénible…)  au lieu de privilégier la retenue transforme cette odyssée en long pensum lacrymal. Et malgré les efforts de Jim Broadbent pour distiller de l’ambiguïté et du mystère, ce mélo fonce dans le mur.

Thierry Cheze

 

Et aussi

Comme une vague, de Marie- Julie Dallaire

De l’eau jaillit le feu, de Fabien Mazzocco

Mon père et moi, de Laura Terruso

Reprises

Fleur pâle, de Masahiro Shinoda

Inland Empire, de David Lynch