Little Jaffna
Zinc Film

Un film de gangster franco-tamoul qui s'inspire autant du cinéma de James Gray que des scènes d'action spectaculaires de Kollywood.

Tout démarre par une manchette. Au coeur de Paris, deux gangs s'affrontent en pleine rue sans retenir leurs coups. Bienvenue à Little Jaffna, quartier tamoul de la capitale, déjà au coeur du court métrage éponyme de Lawrence Valin, primé à Clermont-Ferrand en 2018 mais aussi… à Kollywood, le Bollywood du sud de l'Inde, où le cinéma se vit comme une expérience extraordinaire. Après cette entrée coup de poing, la caméra va suivre Michael, jeune flic infiltré dans un groupe criminel pour tenter de faire tomber son boss, Aya (Vela Ramamoorthy) accusé de détourner de l'argent vers le Sri-Lanka afin de nourrir un conflit trentenaire. Avec, en toile de fond, la fin de la guerre entre l'armée locale et les Tigres, mouvement séparatiste se battant pour l'indépendance du nord du pays. Plongé dans cette communauté secrète, le protagoniste va peu à peu interroger sa propre identité, lui qui, comme la plupart des membres du gang, est né après le début des affrontements, mais vit au quotidien l'impact de la guerre et de l'exil.

Little Jaffna de Lawrence Valin
Guy Ferrandis/ Zinc

Né en France et élevé par sa grand-mère indienne, Michael est attiré par le monde qu'il doit infiltrer, tout en sachant qu'il ne peut pas en faire pleinement partie. Par une multitude d'idées aussi simples qu'efficaces (la tache de naissance du héros qui symbolise sa double identité…), Valin développe ce mélange des genres et des cultures dans sa mise en scène. Il puise dans le meilleur des thrillers italo-américains ou coréens pour les mixer aux couleurs et au rythme exagérément intense du cinéma sri-lankais. S'en dégage une vitalité impressionnante. Et si certains rebondissements peuvent sembler trop gros pour être vrais, on se laisse embarquer dans ce monde qu'on connaît peu, en collant au plus près de ce personnage-éponge, qui s'exprime peu mais ouvre grands ses yeux et ses oreilles, observant cette communauté avec un mélange de crainte et de curiosité. Parsemé de scènes choc à la Tarantino ou à la Bong Joon-ho, qui savent mêler pics de violence et humour, Little Jaffna se révèle d’abord et avant tout le portrait intime d'un jeune homme dont la mission qui lui a été confiée a tout d’impossible. Un constat doux-amer dans la lignée directe de La Nuit nous appartient, référence assumée de ce premier long aussi bien pensé qu’orchestré.

De Lawrence Valin. Avec Lawrence Valin, Radhika Sarathkumar, Marilou Aussilloux… Durée 1h39. Sortie le 30 avril 2025