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Bérénice Bejo se met à l'italien dans Fais de beaux rêves de Marco Bellochio, en ouverture de la Quinzaine des réalisateurs de Cannes 2016. Rencontre.

Dans Fais de beaux rêves de Marco Bellocchio, qui fait l'ouverture de la Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes 2016, Bérénice Bejo joue -en italien dans le texte- une femme médecin qui apporte la lumière à un journaliste marqué depuis son enfance par la mort subite de sa mère.

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Comment définissez-vous votre personnage?
C'est un personnage solaire et positif qui arrive à un moment où le personnage principal joué par Valerio Mastandrea n'arrive plus à avancer. Il est au bord du gouffre. Soit il saute, soit il s'en sort. Mon personnage va savoir trouver les mots pour lui parler simplement et directement. Le problème de beaucoup de relations qui ne marchent pas vient de l'incapacité à se dire les choses. On enrobe la réalité, un petit mensonge devient un grand mensonge et au fil du temps, c'est trop tard. Mon personnage lui dit: "il serait temps que vous demandiez à quelqu'un comment votre mère est morte".

Comment avez-vous fait pour vous préparer si vous ne parlez pas italien ?
Je comprends assez bien l'italien, parce qu'entre le français et l'espagnol, je me débrouille plutôt bien. Mais en pratique c'est différent. Donc j'ai appris bêtement par coeur toutes mes scènes avec un coach deux fois par semaine pendant un mois. Ca m'inquiétait parce que quand on joue dans une langue étrangère, on ne veut pas être diminué, on veut pouvoir continuer à nuancer son jeu, apporter des choses. Donc je ne voulais pas du tout être sur le texte. Mais malgré la préparation, je n'étais pas très détendue parce que quand je suis arrivée pour seulement dix jours de tournage, le reste de l'équipe était là depuis longtemps. Et Marco (Bellocchio) aime bien improviser, alors il rajoutait des choses au dernier moment, il disait "action" avant même que je sache qu'il y avait une improvisation à laquelle je ne comprenais rien. Ca n'était pas facile, mais en même temps ça ne fait pas de mal, ça met un peu en danger, comme les premières fois.

Pourtant, ce n'est pas la première fois que vous tournez à l'étranger ?
C'est la première fois que je tourne dans une langue étrangère. Je ne compte pas l'anglais parce que c'est tellement présent dans la vie, dans les chansons, dans les films. Et quand on est comédien, on doit parler anglais tout le temps.

Comment expliquez-vous que vous soyez demandée en dehors de la France ?
Quand on m'a proposé le film de Bellochio, un autre réalisateur italien m'avait sollicité, et comme j'étais déjà engagée sur le Joachim Lafosse (L'Economie du couple, également à la Quinzaine), il a fallu que je choisisse. J'étais étonnée moi-même que les Italiens viennnent me chercher. Je pense que ça doit venir du fait que je suis argentine, que j'ai joué en anglais, que j'ai tourné avec l'Iranien Asghar Farhadi. En tout cas, je suis très contente. Je pars bientôt tourner en Allemangne. Mais avant, ça se faisait beaucoup, les acteurs partaient tourner dans toute l'Europe. Ca revient, voyez Alicia Vikander qui tourne beaucoup aux Etats-Unis. C'est important, parce que ça veut dire qu'aujourd'hui, on peut dépasser les frontières. On fait tous le même travail, donc pourquoi ne pas interchanger si c'est possible.

Que vous a apporté Cannes?
Ca a attiré l'attention sur un petit film que j'ai fait avec Michel Hazanavicius (NDLR : The Artist), alors qu'on pensait que personne ne le verrait! Ca peut mettre en lumière un film de façon incroyable, tout comme ça peut le tuer avant même qu'il sorte. C'est le casino. Personnellement, je ne suis pas très joueuse. Je me sens bien à la Quinzaine. Pour aller en compétition, il faut être solide et avoir un sacré tempérament. Je préfère y aller en étant sûre qu'il ne va pas se passer trop de choses dramatiques.

Interview Gérard Delorme