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Le 2e opus de la saga avec Jennifer Lawrence revient ce soir sur C8.

En 2015, Première avait fêté les 40 ans du blockbuster en proposant l'analyse d'un film événement par an. Pour 2013, nous avions choisi le deuxième opus d'Hunger Games, qui reviendra ce soir, à 21h, sur C8.

En juillet 2011, Harry Potter fait marcher sa baguette pour la dernière fois au cinéma après une décennie de règne sur les spectateurs adolescents, partagé sur la fin avec les vampires de Twilight, qui retourneront dans leur nuit éternelle en novembre 2012. Entre les deux déboule un nouveau prétendant au trône du royaume Young Adult fort des mêmes arguments que ses prédécesseurs : comme Harry Potter et Twilight, Hunger Games est adapté d’une série de livres à succès, écrits par Suzanne Collins, vendus à 16 millions d’exemplaires aux Etats-Unis et traduits dans 38 pays. L’enjeu est colossal pour Lionsgate qui vient de racheter Summit Entertainment, le studio de Twilight.

Le potentiel de Hunger Games est plus fort : contrairement à Twilight, bluette adolescente aseptisée dont l’enjeu principal est la romance entre ses deux héros, dont le public se compose donc essentiellement de filles de moins de 16 ans, la saga SF de Suzanne Collins raconte une histoire, dont les enjeux sont politiques et sociaux avant d’être sentimentaux, et renferme sa propre mythologie. Dans un décor hybride inspiré de Rome Antique et de France sous l’Occupation, Hunger Games s’inscrit dans la tradition ancestrale du récit théorisée par Joseph Campbell dans Le Héros aux mille et un visages, l’idée d’une trame unique sur laquelle marchent presque tous les héros mythiques : comme Star Wars, Le Seigneur des anneaux, Matrix, Mad Max…, Hunger Games place un/une élu(e) face à un destin qui le/la dépasse. Soit, dans un monde dévasté où le pouvoir répressif maintient la population, découpée en « districts », dans une misère totale, une grande sœur qui se sacrifie pour éviter à sa cadette de participer aux Jeux de la faim, réactualisation des jeux du cirque dans lesquels s’affrontent 24 candidats âgés de 12 à 18 ans, tirés au sort, dans une lutte à mort, le tout retransmis en direct à la télé. Katniss Everdeen, c’est son nom, triomphe à la fin du premier volet, et devient malgré elle un symbole de la résistance au pouvoir. L’adaptation de ce premier tome sort en mars 2012 et encaisse presque 700 millions de dollars, faisant de Jennifer Lawrence la star la plus powerfull d’Hollywood. 

Hunger Games - le film appelle à l’indulgence (critique)

C’est le deuxième atout majeur de la saga : son actrice, déjà nommée à l’Oscar quand elle arrive sur la franchise, est devenue à la fois la plus puissante et la plus cool de l’industrie. Après le succès du premier Hunger Games, elle part tourner pour un cinéaste qui monte, David O. Russell, et rafle l’Oscar (qu’elle va chercher en se cassant magistralement la gueule dans sa jolie robe, ce qui ne l’empêche pas de rester drôle et digne). Quand elle revient pour le tournage du 2e épisode, L’Embrasement, elle est déjà au sommet. Son cachet a décuplé depuis le premier, elle est entrée dans le top 100 du Times des personnalités les plus influentes de la planète, elle est traquée par les paparazzis et adulée par toute une génération, mais elle garde sa fraîcheur. Quelques années avant, elle était de l’autre côté de la barrière en regardant Harry Potter : « Quand je vois les fans hurler au Comic Con, je me dis que j’aurais été dans le même état si j’avais croisé Daniel Radcliffe à 15 ans… », nous disait-elle à l’époque. Le film, sorti en novembre 2013 – spot hautement symbolique occupé jusque là par Harry Potter et Twilight – est le plus gros succès de l’année au box office américain et récolte plus de 860 millions de dollars dans le monde.

Hunger Games 2 : un tournant dans le monde si formaté des films dits Young Adult ? (critique)

Mais faire du fric avec un best-seller et un gros budget marketing n’est plus un exploit. Le succès de la saga n’est pas que là. Contrairement aux Twilight qui ont gagné des centaines de millions de dollars mais jamais le respect, Hunger Games est vraiment apprécié ; par la critique et, au-delà, par quelques intellectuels qui en font un objet d’analyse : des universitaires américains commencent à s’intéresser aux vertus pédagogiques d’un univers qui convoque l’Antiquité et invoque la conscience politique des jeunes. De l’entertainment adolescent intelligent. En plus de la galvanisation de son cœur de cible – la promo de L’Embrasement se joue notamment au Comic-Con de San Diego comme toutes les franchises hollywoodiennes surpuissantes -, le marketing a toutes sortes d’arguments pour courtiser le public qui ne lui est pas encore acquis : le film est écrit par le scénariste de Toy Story 3 et celui de Slumdog Millionaire, Philip Seymour Hoffman (dont c’est le dernier film sorti de son vivant) a rejoint le casting, la BO fait résonner les sons pop de groupes plus ou moins hype comme Coldplay, The National, The Lumineers, Antony & The Johnsons… Avec L’Embrasement, la franchise Hunger Games, ce produit young adult qui s’avère un peu moins inoffensif que les autres, devient surtout un objet cool, faisant pour la première fois du blockbuster pour ados une oeuvre de cinéma respectable.

Vanina Arrighi de Casanova

 

On retrouvera bientôt Jennifer Lawrence dans Red Sparrow, le nouveau film de Francis Lawrence, qui a justement réalisé Hunger Games 2, 3 et 4.

Après Mother !, Jennifer Lawrence est une espionne dans la bande-annonce de Red Sparrow