Guide des sorties du 20 août 2019
Le Pacte / Warner bros. France / Wild Bunch Distribution

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVÉNEMENT

ROUBAIX, UNE LUMIERE ★★★☆☆
D'Arnaud Desplechin

L’essentiel
Arnaud Desplechin s’essaye à la chronique policière, se perd un peu, avant de retrouver la lumière à travers l’éprouvant parcours de deux jeunes femmes en détresse. 

Arnaud Desplechin est de retour chez lui, à Roubaix, et pourtant nous ne sommes pas tout à fait en terrain connu. Un peu comme si le cinéaste de Comment je me suis disputé et d’Un conte de Noël, voulait marcher sur les plates-bandes d’Olivier Marshal. Un commissariat, la nuit, un flic fatigué mais expérimenté (Roschdy Zem, au charisme ahurissant), un nouveau venu en quête d’absolu et de vérité intérieure (Antoine Reinartz tout en mesure) et au dehors, une misère sociale qui offre son lot de détresse et de faits qui à force d’être trop divers, ne le sont plus vraiment.
Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIMÉ

LES BARONNES ★★★☆☆
D'Andrea Berloff

Le logo DC Comics, qui permet de saisir avant même que le film aie commencé qu’il s’agit d’une adaptation de bande dessinée, permet également de mettre Les Baronnes dans son genre bien à soi : celui d’un comic book movie. Un genre, donc également une esthétique et un rythme, à la façon d’une BD. Il ne faudra pas s’attendre à une grande fresque criminelle et new-yorkaise à la Scorsese, ou même à un manifeste féministe définitif qui fait sortir les femmes de la cuisine (le titre original de la BD et du film étant The Kitchen, en référence  d’abord au quartier de Hell’s Kitchen où se déroule l’action) pour prendre en main leur destin.
Sylvestre Picard

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THALASSO ★★★☆☆
De Guillaume Nicloux

Du Poulpe aux Confins du monde, de, La Religieuse à Valley of love, Guillaume Nicloux bâtit depuis près de 30 ans une filmographie éclectique. Avec Thalasso, le voici aux commandes de sa première suite. Celle de L’enlèvement de Michel Houellebecq. Et il entraîne encore l’écrivain loin de sa présupposée zone de confort, en cure de thalasso à Cabourg, en lui adjoignant un compagnon de route tonitruant : Gérard Depardieu. Dès les premiers instants, cette rencontre au sommet entre deux des personnages publics français à la parole la plus subversive (« vous êtes la honte de la France » leur balance un des curistes) tient ses promesses. Dans ce huis- clos au cœur d’un environnement aseptisé où toute consommation d’alcool est prohibée (interdiction sur laquelle ils s’assoient allègrement), ils font souffler un vent de liberté qui emporte tout sur son passage. Leurs saillies verbales qu’aucun scénariste ne pourrait écrire se marient à merveille aux situations burlesques (un vrai- faux Stallone à qui Houellebecq exprime son admiration… pour sa prestation dans L’embrouille est dans le sac, le remake d’Oscar avec De Funès !)  ou flirtant allègrement avec le fantastique imaginées par Nicloux. Car ce dernier joue à merveille avec ce qu’on croit savoir d’eux et de leurs obsessions (la bonne chère au sens large pour l’un, la certitude de devenir Président pour l’autre)  et ce qu’ils sont vraiment. Un terrain de jeu et d’exploration infinie où le prétendu vrai et le possiblement faux se répondent pour, par- delà les nombreux fous rires, offrir une troublante exploration de l’intime.
Thierry Chèze

 

LATE NIGHT ★★★☆☆
Nisha Ganatra

Katherine Newbury est une légende dans le monde des late shows. Mais son audience s’effrite et on songe à la remplacer. L’arrivée de Molly, une femme d’origine indienne, dans son équipe de scénaristes uniquement composée de mâles blancs va changer la donne. Mindy Kaling (l’interprète de Molly) est à l’initiative de ce film qu’elle a produit et écrit en s’inspirant de son expérience comme auteur de la série The Office. Late Night réussit le tour de force de traiter du sexisme dans le milieu de la télé sans être moraliste. La comédie offre surtout une des meilleures compositions d’Emma Thompson. On adore quand elle arrose son entourage de son dédain et on se régale de ses répliques cinglantes mises en valeur par la réalisation rythmée de Nisha Ganatra, venue, elle aussi, du monde de la série (Girls, Mr. Robot).
Sophie Benamon

REZA 
★★★☆☆
D'Alireza Motamedi

Reza et sa femme Fati divorcent. Ils ont cependant, selon la loi islamique, un délai de trois mois et dix jours pour se rétracter. Le temps pour Reza d’essayer de reconstruire sa vie alors que Fati n’est jamais très loin... Sur cet argument, un cinéaste iranien ordinaire (Farhadi, au hasard) aurait brodé un drame moral, mettant chacun face à ses responsabilités. Rien de tout ça dans Reza, focalisé sur le héros masculin (joué par le réalisateur) et ses doutes existentiels renforcés par sa rencontre fortuite avec une autre femme. À grands coups de plans-séquences larges et fixes (parfois exagérément étirés), Alireza Motamedi joue sur l’isolement de son personnage, seul au milieu des autres. Il recourt aussi symboliquement aux motifs du conte pour mettre en parallèle l’histoire de Reza et celle d’un vieil homme ramené à la vie par les douceurs du monde. Délicat, subtilement drôle (la rencontre dans un bar avec Violet), gentiment féroce, Reza ressemble à du Woody Allen en mode Bergman.
Christophe Narbonne

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

GOOD BOYS ★★☆☆☆
De Gene Stupnitsky

C’est écrit en gros sur l’affiche : ce premier long métrage est produit par les créateurs de Supergrave et Sausage Party. Et si cette assertion n’est en rien mensongère (les géniaux Seth Rogen et Evan Goldberg en assurent bien la production), leur ombre se révèle cependant trop écrasante dans ce récit initiatique certes sympathique, mais jamais renversant. Ces trois « good boys » de 12 ans se trouvent à un moment crucial de leur jeune existence. Le temps de la fin de l’école élémentaire et des premiers baisers. Celui aussi où leur amitié de toujours se fissure face à la construction de leurs personnalités individuelles. Stupnitsky en tire une teen comedy qui se rêve potache et régressive. Mais, comme effrayée de ses propres audaces, elle avance la main sur le frein sans atteindre cette amoralité capable de l’éloigner des eaux tièdes dans lesquelles elle évolue.
Thierry Chèze

MA FAMILLE ET LE LOUP
★★☆☆☆
D'Adriàn Garcia

Adriàn Garcia aime jouer avec nos peurs. En 2007, son chef-d’oeuvre d’animation Nocturna, la nuit magique racontait avec une poésie renversante les terreurs nocturnes de l’enfance. Dans son deuxième long, c’est la mort qui rôde, mais avec la même (excellente) idée de passer par la fable et le prisme de l’enfance. La Grande Faucheuse prend ici la forme d’un loup qui viendra chercher Sara le jour de ses 80 ans, comme elle l’a expliqué à ses petits-enfants. Ces derniers vont le traquer pour empêcher l’inéluctable, en mode Goonies du XXIe siècle. Le film était prévu en animation, mais Garcia a finalement choisi de tourner Ma famille... très majoritairement en prises de vues réelles. Et c’est son principal défaut. Car la finesse miyazakienne du scénario perd de sa subtilité dans une forme qu’il maîtrise mal : mise en scène sans relief, direction inégale des acteurs... Une fausse bonne idée.
Thierry Chèze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

LE DESERTEUR ★☆☆☆☆
De Maxime Giroux

Auteur-réalisateur remarqué du bouleversant Félix et Meira (2015), le Québécois Maxime Giroux signe cette fois un film moins évident. Il y raconte, sous la forme d’un conte cruel, les mésaventures d’un imitateur de Charlie Chaplin qui fuit un conflit armé dont on ne saura rien. L’homme, déserteur, va se perdre dans l’Ouest américain où, dépouillé, puis fait prisonnier par une mystérieuse organisation, il va se confronter à « la grande noirceur » (le titre original) de l’âme humaine... Filmé au format carré, Le Déserteur évoque Le Fils de Saul et ses cadres serrés sur un héros victime de la folie des hommes. Si le résultat est formellement brillant, il pêche en revanche sur le plan du récit, succession de saynètes morbides aux dialogues assez simplistes et à l’interprétation forcée.
Christophe Narbonne

HAUT-PERCHÉS ☆☆☆☆☆
D'Olivier Ducastel et Jacques Martineau

Dans Huis clos, Jean-Paul Sartre enfermait trois personnages dans une pièce pour nous donner une idée de l’enfer. Avec Hauts-Perchés, Olivier Ducastel et Jacques Martineau procèdent de la même façon : une femme et quatre hommes dans un appartement. Tous sont victimes du même individu, qui a déçu leurs espoirs amoureux. Chacun raconte son histoire, ses fantasmes, puis se confronte au « monstre » au cours d’une entrevue hors champ – dans une chambre. Le choix de laisser leur ancien partenaire commun à part est pour le moins mystérieux, car on ne sait s’il est malade, torturé ou juste allongé. Le récit enchaîne les monologues très inégalement joués et ressasse une série de poncifs sur les relations sentimentales. Au final, le spectateur se sent comme prisonnier, lui aussi, de cet exercice scolaire qui ne suscite pas plus d’émotion que de romanesque.
Sophie Benamon

 

Et aussi
Mes autres vies de chien de Gail Mancuso
Scary stories d’André Ovredal
L’affaire Pasolini de David Grieco

 

Reprises
La croisière du Navigator de Buster Keaton
La famille d’Ettore Scola

 

 

 

 

 

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