Rambo : Last Blood (2019)
Metropolitan Filmexport

Sly dit encore une fois adieu à Rambo, et massacre un cartel mexicain à l’occasion.

La dernière séquence de John Rambo (2008) était bouleversante. Le vétéran revenait à la maison familiale, sans que l’on sache très bien si ce retour était pour de vrai ou ne se déroulait que dans l’imagination de Rambo. Réel ou fantasmé, ce coming home était le parfait épilogue du film, tout comme John Rambo était le parfait épilogue d’une série envers laquelle Stallone avait des sentiments ambivalents. Plus jamais Rambo ! disait-il dans les années 90. Histoire de se dissocier d’un personnage devenu après Rambo III symbole d’une Amérique triomphante -celle-là même qui foutait Rambo en prison à son retour du Viêt-Nam. Le doublé Rocky Balboa et John Rambo donnait à Stallone l’occasion de donner à ses deux personnages des funérailles nationales. De ce point de vue-là, le plan a raté : le succès des deux films allait relancer les franchises. En 2010, Sly avait beau dire que le personnage était "fini" à ses yeux parce qu’il était rentré à la maison à la fin du premier film, l’industrie réclamait un cinquième Rambo. Voilà donc Rambo : Last Blood, fidèle à son pitch inchangé depuis une décennie : John massacre un cartel mexicain pour sauver une jeune femme kidnappée par les narcos (il fut question un temps d’envoyer Rambo traquer une créature génétiquement modifiée, mais on ne sait pas trop si Sly, qui a laissé la réalisation du film à Adrian Grünberg, réalisateur de Kill the Gringo avec Mel Gibson, avait proposé ce pitch pour que les producteurs lui fichent la paix).

John est donc revenu à la maison. Mais il n’y habite pas, laissant la demeure à Maria, une vieille amie mexicaine. Il vit, débarrassé en apparence du look Rambo (plus de cheveux longs ni de bandeau), dans des tunnels creusés sous le terrain de la ferme familiale au milieu d’armes à feu, forgeant des couteaux et tentant de résister encore aux cauchemars du Viêt-Nam. A la veille de son départ pour la fac, Gabrielle, la fille de Maria -élevée par Rambo ces dix dernières années- se fait kidnapper au Mexique par un cartel en essayant de retrouver son père biologique. Bien évidemment, Rambo va tenter de la retrouver, et affronter les membres du cartel dirigé par deux impitoyables frères. Tout cela va se terminer dans un terrible massacre. Tout comme son héros, Rambo : Last Blood applique son plan d’attaque à la lettre. La première heure, dénuée de toute forme de violence armée, fait monter la pression pour que le public accepte totalement le déchaînement de violence de Rambo envers les affreux narcos, qui n’échappent pas à une vision stéréotypée du Mexique contemporain tel que le voient les scénaristes de fiction américaine. Ceci dit, cela fonctionne et l’on éprouve une vraie colère lorsque le film bascule dans sa dernière partie, où Rambo attire les méchants dans son domaine pour les transformer en hachis parmentier au cœur de ses tunnels truffés de pièges mortels. C’est l’une des belles idées du film : Rambo, minotaure en PTSD, utilise le labyrinthe de sa folie et de ses souvenirs pour y broyer ses ennemis.

Stallone ne tente pas de faire autre chose que du Stallone. Ce n’est pas John Wick : par rapport aux autres films d’action contemporain, Last Blood est court (1h40, alors que John Wick 3 durait 2h11), direct, efficace. Il va droit au but : donner un épilogue à la saga Rambo. Encore une fois. Combien de fois va-t-on voir Stallone réciter le kaddish de ses personnages à côté d’une tombe, à l’ombre d’un arbre ? C’est encore un film-épilogue dans la filmo de Sly, qui ne semble pas vraiment décider à mettre un point final à la saga. Comme Creed, comme Creed II, comme Expendables 2 et 3. Encore un épilogue. Rien ne finit jamais. Le joli prologue où Rambo, à cheval, tente de sauver des randonneurs perdus dans la forêt pendant une tempête nocturne, est l’autre belle idée. "C’est un pisteur bénévole, cramé par la guerre ", dit un flic à son sujet. A partir de là, on aurait pu imaginer un Rambo sans armes à feu, sans meurtres, un survival dans la nature où la silhouette massive de l’ancien béret vert aurait pu devenir celle d’un véritable sauveur plutôt que celle d’un massacreur. Le film en est conscient. Dans une autre très belle scène, Rambo pénètre dans un bordel clandestin pour sauver Gabrielle. Marteau à la main, il cogne les clients et les narcos, et crie aux filles de s’échapper. Elles refusent toutes, l’une après l’autre. "Ils nous tueront", disent-elles. Stallone semble donc délivrer la violence dans Last Blood à contrecoeur, comme s’il voulait satisfaire son public. La violence du métrage oscille donc entre gratuité pure (Rambo torture un Mexicain pour lui faire avouer un renseignement en lui pétant la clavicule, effet garanti), et ellipses (heureusement !) sur des scènes de prostitution qu’on a aucun mal à s’imaginer atroces. Rambo le dit texto dans le film : "j’ai essayé de rentrer chez moi, je n’y suis pas arrivé". Il ne lui reste plus qu’à massacrer le plus de bad guys possibles et d’attendre la mort. Ou, comme toute la filmo récente de Stallone semble nous le signifier, y compris ce Last Blood, à repousser la fin, le plus longtemps possible.

Rambo : Last Blood sort le 25 septembre en salles. Bande-annonce :