Pierre Lescure
Abaca/DR

"J'ai très envie de voir Tenet de Christopher Nolan. Et aussi Benedetta de Paul Verhoeven"

Et si notre éloignement forcé avec les salles de cinéma pouvait finalement se révéler bénéfique ? S’il montrait que rien ne remplacera jamais le bonheur unique de découvrir un film sur un grand écran au milieu d’inconnus, guidés par la même curiosité. C’est en tout cas ce que nous, à Première, croyons et défendons. Alors, on a eu envie d’interroger ceux qui font le cinéma au quotidien. Pour qu’ils nous racontent leur lien intime à la salle et nous expliquent pourquoi y retourner sera une priorité pour eux une fois ce cauchemar quelque peu dissipé. Après Juan Antonio Bayona et Pierre Niney, on continue avec Pierre Lescure, président du Festival de Cannes, alors que les salles rouvriront en France le 22 juin prochain.

Quelle est la meilleure raison de retourner au cinéma après le confinement ?
Vivre une émotion sans avoir aucun risque à être à côté les uns des autres dans une salle bondée et de rêver ensemble devant un écran. Toutes les valeurs d’émotions humaines sont réunies dans une salle obscure face à un écran éblouissant.

Qu’est-ce qui vous manque le plus en ce moment dans le fait de ne pas y aller ?
Le fait qu’on n’en sorte jamais le même – à quelques nanars près, évidemment – après avoir fait la queue tous ensemble sans se connaître, mais en échangeant un regard. Ce qui me manque ce sont ces livres de souvenirs communs. À la maison, on n’a pas le même rapport à l’image en général et au cinéma en particulier.

Quel film avez-vous le plus envie de voir en premier ?
Tenet de Christopher Nolan. Et aussi Benedetta de Paul Verhoeven.

Dans quelle salle ?
Une des salles du Quartier latin parce que je suis né dedans et que je mourrai sans doute dedans…

Quel est votre plus beau souvenir de projection ?
La projection à Cannes de Manhattan de Woody Allen. C’est une salle particulière, mais je suis sûr que le film m’aurait fait la même impression à L’Isle-surla-Sorgue ou à Londres. On est en 1979. Une édition exceptionnelle où j’ai vu Le Tambour, Apocalypse Now, Les Moissons du ciel, Série noire, La Drôlesse… Et dans la rue, je croise Gilles Jacob qui m’arrête et me dit : « J’espère que vous êtes là tout à l’heure pour le Woody Allen. » Je me précipite donc à la projection de presse. Et j’en sors à la fois heureux comme un enfant et pleurant comme une madeleine.